Art moderne

DÉBUT DU XXE SIÈCLE

La Fresnaye, auteur d’une “peinture d’amateur” ?

Par Élisabeth Santacreu · Le Journal des Arts

Le 12 décembre 2018 - 521 mots

VILLEFRANCHE-SUR-SAÔNE (RHÔNE)

Autour de ses œuvres les plus apparentées au cubisme, le Musée Paul-Dini présente la diversité des recherches du peintre.

Villefranche-sur-Saône (Rhône). Roger de La Fresnaye (1885-1925) est né au Mans au hasard d’une affectation de son père, militaire de carrière. C’est cependant dans la Loire, au château de Beauvernay situé à Saint-Nizier-sous-Charlieu, propriété de sa mère, qu’il avait ses racines et venait peindre chaque année. Le musée municipal Paul-Dini de Villefranche-sur-Saône, qui se consacre aux arts en région Auvergne-Rhône-Alpes, était donc tout désigné pour organiser une rétrospective après celle qui eut lieu au Musée de Tessé au Mans en 2005.

Le sous-titre, « La tentation du cubisme », dit la difficulté qu’a l’histoire de l’art à classer Roger de La Fresnaye. Toute sa vie, celui-ci a cherché, expérimenté : « Il a franchi rapidement plusieurs étapes entre l’impressionnisme, le nabisme, le cubisme modéré puis une forme de néoclassicisme. Les historiographes n’aiment pas ça », résume la commissaire de l’exposition, Christelle Rochette.

Dans les musées new-yorkais

Gazé pendant la Première Guerre mondiale La Fresnaye succomba à une maladie pulmonaire après des années d’agonie, souvent trop épuisé pour peindre. On ne retient donc souvent de son œuvre que la période faste, les années 1912-1914 pendant lesquelles il connaît le succès. « Il a été célébré après sa mort, précise Christelle Rochette. Entre les années 1930 et 1950, toutes les grandes toiles des années 1912-1914 partent aux États-Unis où certaines sont aujourd’hui dans les musées. En France, à partir des années 1960, il est décroché des cimaises. Le cubisme, alors, c’est Braque et Picasso et, dans une certaine mesure, Léger et Robert Delaunay. » Déjà, en 1922, le critique Roger Allard écrivait à son propos : « Cette liberté d’allures ne pouvait manquer de déplaire aux esprits prévenus en faveur du mystère et des sublimités inextricables. Le Cuirassier, Artillerie leur parurent des œuvres ressortissant à la peinture d’amateur, et l’on ne manqua pas, à l’époque, d’en signaler le caractère “anecdotique”. Je ne sais plus, ou plutôt, je ne veux plus savoir quel critique disait, en parlant de la Conquête de l’Air : “Peinture de fils de famille”. »

C’est ce peintre resté librement « aux abords du cubisme », selon les mots du critique René Schwob, qu’analyse l’exposition, en présentant précisément Cuirassier (vers 1910-1911). Si Artillerie et La Conquête de l’air (deux œuvres de la collection du MoMA de New York) sont absentes, la première est évoquée par l’étude du même titre (1911) pour une illustration de Tête d’or de Paul Claudel, la seconde par une xylographie portant le bon à tirer de l’artiste (1913).

En 76 œuvres, sa carrière est décrite chronologiquement depuis le premier Autoportrait (1905) jusqu’aux dernières années, d’un classicisme qui le rapproche de De Chirico. Cuirassier, qui a fait sensation au Salon des Indépendants de 1911, est présenté dans une salle consacrée au cubisme des Salons où figure, outre le lumineux La Fresnaye, le cercle de ses proches : Gleizes, Metzinger, Lhote, Jacques Villon, Henri Le Fauconnier, Paul Vera, Luc-Albert Moreau, Yves Alix, Charles Dufresne… En fin de parcours, une salle est consacrée à ses rares mais intéressants disciples : l’étonnant Jean Jacques Moreau et l’inclassable et magnifique Alfred Courmes.

Roger de La Fresnaye, la tentation du cubisme,
jusqu’au 10 février 2019, Musée Paul-Dini, 2, place Faubert, 69400 Villefranche-sur-Saône.

Thématiques

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°513 du 14 décembre 2018, avec le titre suivant : La Fresnaye, auteur d’une “peinture d’amateur” ?

Tous les articles dans Expositions

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque