Histoire

RENAISSANCE

Henri II en sa demeure royale

Par Margot Boutges · Le Journal des Arts

Le 9 mai 2019 - 906 mots

Longtemps négligé, Henri II bénéficie à l’occasion du 500e anniversaire de sa naissance d’une exposition à Saint-Germain-en-Laye. Axée sur son château préféré, celle-ci présente une vision réduite de son règne.

Saint-Germain-en-Laye (Yvelines). Il aura fallu attendre le 500e anniversaire de sa naissance pour qu’une première exposition soit consacrée à Henri II (1519-1559). Les commissaires Hilaire Multon, directeur du domaine national de Saint-Germain-en-Laye, Thierry Crépin-Leblond, directeur du Musée national de la Renaissance, et Étienne Faisant, post-doctorant, en livrent leur explication dans l’introduction du catalogue. Ce roi fut longtemps « négligé », et « occulté par la renommée de son père et par la personnalité légendaire de sa femme ». Qui ne connaît en effet François Ier, archétype du roi-chevalier et ami des arts, et Catherine de Médicis, dont le nom, bien que réhabilité au XXe siècle, reste étroitement associé aux guerres de religion et au déclenchement du massacre de la Saint-Barthélemy ? Victime d’un accident à l’âge de 40 ans, Henri II est quant à lui mort trop tôt pour marquer durablement les esprits. Le monarque, souvent réduit à l’attachement à toute épreuve qu’il portait à sa gouvernante devenue maîtresse, Diane de Poitiers, est connu surtout pour avoir engendré quantité d’enfants qui se succèdent sur le trône avant que la lignée des Valois ne s’éteigne. C’est le domaine national de Saint-Germain-en-Laye qui, en partenariat avec le Musée national de la Renaissance, jette la lumière sur ce roi éclipsé par son entourage. Et le château est sans conteste le lieu plus adapté : il fut son lieu de naissance en 1519 et l’endroit que sa cour itinérante fréquenta le plus assidûment. Saint-Germain est pour lui « ce que Fontainebleau était pour François Ier », résume le catalogue.

À la cour d’Henri II

L’exposition se focalise sur la place de Saint-Germain pendant le règne d’Henri II. Une approche intéressante car ce château, qui abrite le Musée d’archéologie nationale, est probablement une des demeures royales les moins connues. Henri II, qui goûta moins que son père les plaisirs de la vallée de la Loire, plébiscita Saint-Germain qui était proche de Paris tout en étant riche en terrains de chasse. Sur ce château en grande partie reconstruit par François Ier, il fit exécuter plusieurs travaux (aujourd’hui disparus) tel le réaménagement de la chapelle dont témoignent les plans et devis ici présentés.

À Saint-Germain, il multiplia les bals, les festins, les jeux, lors de fêtes particulièrement somptueuses. Outre les structures destinées à la paume et aux tournois, il fit bâtir un logis pour les combats de bêtes sauvages. Les affrontements devant public étaient légion et Henri II ressuscita même la pratique du duel judiciaire pour dénouer une intrigue de cour : c’est à Saint-Germain que fut porté le fameux « coup de Jarnac » en 1547.

Grâce à un plan interactif, l’exposition fait revivre la disposition des pièces du château, ce qui permet d’appréhender la position occupée par les proches d’Henri II : la chambre du premier conseiller, Anne de Montmorency, était située en face de celle du monarque, et Diane de Poitiers avait droit aux appartements les plus beaux. Les enfants de la Couronne, sur lesquels le parcours s’étend largement, étaient aussi en excellente place à Saint-Germain. C’est dans cette demeure réputée pour son bon air qu’ils étaient logés en l’absence de leurs parents, afin de les protéger des maladies colportées par la foule de courtisans. Le dauphin François II y fut élevé avec ses sœurs et sa future épouse, Mary Stuart, reine d’Écosse, dans une cour enfantine où gravitaient les héritiers des grands de ce monde.

Sans surprise, cette place surplombante conférée à la demeure royale et à ses occupants éclipse certaines facettes du règne d’Henri II. Si l’exposition illustre largement la prise de Calais aux Anglais en 1558 (cette victoire militaire fut préparée à Saint-Germain), elle n’aborde pas les actions très répressives qu’Henri II, fervent catholique, mena contre les protestants. Cette petite exposition, parfaitement menée mais assez limitée, permet avant tout de saisir l’ambiance d’une cour luxueuse et fourmillante que Madame de Lafayette s’était employée à ressusciter en son temps. « La magnificence et la galanterie n’ont jamais paru avec autant d’éclat que dans les dernières années du règne d’Henri second. » C’est sur ces mots extraits de La Princesse de Clèves que s’achève le parcours.

Une galerie de portraits de toutes provenances  

Prêts. Parmi la centaine d’œuvres présentées, figure une large sélection de portraits d’Henri II et ses familiers. Huiles sur bois ou sur toile, émaux peints sur cuivre, dessins…, les supports sont divers et nombreuses sont les institutions à avoir joué le jeu. Ainsi, le Musée Crozatier du Puy-en-Velay a prêté le tableau reproduit pour l’affiche : un portrait d’apparat où le souverain est représenté de face, disposition rare en France, conduisant à voir en cette œuvre une réponse au portrait d’Henri VIII par Holbein. Deux portraits en pied d’Henri II et de Catherine de Médicis, emportés en Italie dans les bagages de Christine de Lorraine, ont fait le voyage depuis le palais Pitti de Florence. Ce type de portraits au visage tourné vers la gauche, conçu par François Clouet, a été décliné à de multiples reprises, comme en témoignent les répliques prêtées par Versailles et Chantilly. La Bibliothèque nationale de France a quant à elle sorti de ses réserves une sélection de dessins à la pierre noire et à la sanguine figurant les enfants royaux ou bien le baron de Jarnac, des feuilles sublimes qui, à elles seules, justifient largement la visite.

 

Margot Boutges

Henri II. Renaissance à Saint-Germain-en-Laye,
jusqu’au 14 juillet, Musée d’archéologie nationale, Domaine national de Saint-Germain-en-Laye, place Charles-de-Gaulle, 78100 Saint-Germain-en-Laye.

Thématiques

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°523 du 10 mai 2019, avec le titre suivant : Henri II en sa demeure royale

Tous les articles dans Expositions

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque