Collectionneurs et producteurs

Par Bénédicte Ramade · L'ŒIL

Le 26 septembre 2011 - 495 mots

Exposer des collectionneurs, le parti pris n’est pas nouveau. Mais l’originalité de l’exposition de l’EAC est de les avoir invités moins à exposer leur ego qu’à devenir les producteurs des œuvres avant de les accueillir à demeure.

Michel Fedoroff
Tout le monde a remarqué leur 2 CV détruite de l’intérieur avec lenteur par un vérin hydraulique et exposée au Palais de Tokyo en 2009. Le duo Pugnaire et Raffini a séduit Michel Fedoroff. Le collectionneur, installé dans le Var où il a établi une structure d’atelier-résidence pour les artistes, se passionne pour les jeunes créateurs. Pugnaire et Raffini lui offrent ici une imposante sculpture composée de cinq feuilles de métal progressivement froissées, comme un hommage au culte de la vitesse du futuriste Giacomo Balla.

Arsfutura
Cube aux couleurs trop flashy pour être purement minimal, la sculpture architecturale de Krijn de Koning impose d’emblée son ambiguïté. Son titre fonctionnel – Bureau – nous entraîne vers un usage muet. Le Néerlandais excelle dans l’analyse critique des espaces qui s’engagent dans un dialogue acéré dès lors que l’échelle architecturale des modules y est installée. L’œuvre a été commandée par Arsfutura, autoproclamée « unité de production » par Maurice Gozlan et Jean-François Torrès, associés à Serge Le Borgne.

LGR
Derrière ce sigle énigmatique, LGR, se cachent Laurence, Gaétane et Roland. Une histoire de famille et une passion contagieuse pour l’art. Ils ont choisi les œuvres savantes à la séduction glacée de Pascal Pinaud, une référence niçoise. Ses toutes nouvelles Patères suspendent des plaques de métal et de verre peintes en rouge, blanc ou noir, un geste prosaïque pour composer un assemblage abstrait dans la tradition constructiviste. Tout l’art de contrebalancer les standards dans lequel brille l’artiste est synthétisé dans cette production qui donne une nouvelle amplitude à son œuvre. 

F. et F. Carrère
Collectionneurs agenais, les Carrère ont produit les œuvres du Niçois Cédric Teisseire, habituellement plus porté sur la peinture. Ici, il propose un coup de poing dans la rectitude minimaliste du tableau monochrome blanc dont la surface glacée est assortie d’une radiance fluorescente à son endos. Il joue sur les deux tableaux, le recto et le verso, avec cette surface froissée, martyrisée pour le meilleur, et fait se rejoindre ici deux pans de sa pratique : la peinture abstraite et la sculpture architectonique simplifiée, au plus près du frottement avec les murs. Ses Points d’impact en sont la parfaite jonction.

Gilles Fuchs
À 20 ans, il craquait pour un Magritte. Gilles Fuchs, juriste international, ne s’est plus arrêté depuis ce geste fondateur. Avec sa femme, il forme un couple de collectionneurs influents dont l’énergie est dévolue à la promotion de l’art français depuis 1994 avec l’Adiaf, qu’ils ont contribué à créer. Le couple a plébiscité Céleste Boursier-Mougenot qui leur a concocté une structure sonore et grillagée pour le jardin. Le cube rappelle From Here to Ear (2002), environnement sonore qui contenait des cintres et des mangeoires pour les oiseaux, le tout relié à des capteurs. Le moindre mouvement produisait des sons. 

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°639 du 1 octobre 2011, avec le titre suivant : Collectionneurs et producteurs

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