Collection Gachet : une exposition mal soignée

Le Journal des Arts

Le 19 février 1999 - 609 mots

L’exposition sur la collection Gachet possède tous les ingrédients du succès. Elle réunit une centaine d’œuvres de Cézanne à Van Gogh, autour des figures mystérieuses du docteur Gachet et de son fils. Cependant, malgré quelques prêts de l’étranger et la présence de pièces peu montrées, le parcours est dominé par les collections du Musée d’Orsay. Son intérêt dépend donc de la pertinence de l’accrochage, qui hésite hélas entre plusieurs directions.

PARIS - À l’origine conçue comme un simple accrochage thématique des collections du Musée d’Orsay, l’exposition Gachet s’est enrichie d’œuvres extérieures, quand le Metropolitan et le Van Gogh Museum ont décidé de s’associer à l’événement. La polémique sur les faux Van Gogh a par ailleurs contribué à en étoffer le propos. Enfin, les grèves du personnel au Musée d’Orsay ont provoqué son déménagement au Grand Palais, alors que la muséographie était déjà bien avancée.

Est-ce cette série d’avatars qui rend la démonstration un peu floue ? On ne sait si le but est de participer au débat sur l’authenticité des Cézanne et des Van Gogh de la collection ou de rendre hommage aux Gachet, à leur côté artiste – Madame compose pour le piano, Monsieur grave et peint sous le nom de Paul van Ryssel, suivi dans cette voie par son fils, dit Louis van Ryssel –, à leurs goûts éclairés – le médecin achète des œuvres de Pissarro, Cézanne, Guillaumin, Monet, Renoir, Alfred Sisley et Van Gogh, bien avant que leur cote ne s’envole – et à leur générosité – le père épaule les peintres dans le besoin et le fils offre plusieurs chefs-d’œuvre aux musées de France.

Le parcours de l’exposition laisserait pencher pour la seconde hypothèse : il s’ouvre sur le docteur Gachet portraituré par divers peintres, se poursuit avec la production artistique de l’amateur, présente la majeure partie de sa collection et se clôt sur la personnalité de Paul Gachet fils. Cependant, la présence de deux salles entières de copies de Cézanne et de Van Gogh, d’un panneau sur la polémique des faux Van Gogh et d’une section consacrée aux résultats des examens en laboratoire montre une nette réorientation du sujet.

Un accrochage peu convaincant
Or, là non plus, la cohérence n’est pas au rendez-vous. Si le discours est clair – rien “n’autorise aucunement à douter de l’authenticité [des œuvres]” –, la démonstration et l’accrochage le sont moins. Une partie des arguments est distillée en filigrane tout au long de la visite, laissant un sentiment de parti pris. Ainsi, lorsqu’ils abordent la collection proprement dite, les commissaires de l’exposition soulignent le gros travail d’inventaire auquel s’est livré le donateur et son souci “que les copies ne passent [pas], après sa mort, pour des originaux”. Ce qui ne les empêche pas, dès la salle suivante, d’exposer un Cézanne désattribué. Par ailleurs, dans le cas d’œuvres douteuses de Vincent appartenant à une paire, pourquoi ne pas les avoir confrontées à leur double ou – dans la mesure où ce n’était pas possible – à une grande reproduction photographique de ce double ? Surtout, pourquoi avoir systématiquement séparé les originaux de leurs copies, à l’exception d’Une moderne Olympia de Cézanne et des Deux fillettes de Van Gogh ? Pour comparer, le visiteur doit sans cesse revenir sur ses pas. Un vrai parcours du combattant, étant donné le circuit très directif de l’exposition, l’accrochage serré et la foule.

UN AMI DE CÉZANNE ET VAN GOGH : LE DOCTEUR GACHET (1828-1909)

Grand Palais, entrée Clemenceau, 75008 Paris, tél. 01 44 13 17 17, tlj sauf mardi 10h-20h, mercredi 10h-22h, réservation obligatoire avant 13h au 0803 808 803. Catalogue 300 p., 315 ill., dont 75 ill. couleurs, 240 F. Petit journal, 15 F.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°77 du 19 février 1999, avec le titre suivant : Collection Gachet : une exposition mal soignée

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