14 fév. - 12 mai. 2008

États-Unis / New York

MoMA PS1

Wack ! Art and the feminist revolution

Il est difficile de saisir un fil directeur à travers cette exposition foisonnante qui nécessiterait des heures et des heures de visite notamment en raison du grand nombre de vidéos exposées. Néanmoins, des thèmes récurrents unissent les oeuvres de ces femmes artistes, comme le corps, sujet et média de l’oeuvre dans une culture qui oblige la femme à être avant tout un corps. Un corps maquillé, superficiel que Martha Rosler dénonce dans des photomontages des années 70, un corps qui s’impose un régime amincissant, celui d’Eleonor Antin, qui photographie sa perte de poids dans un oeuvre intitulée « Carving a traditional sculpture ».

Le corps est démantelé dans les sculptures informes d’Eva Hesse ou l’installation arachnéenne de Senga Nengudi, réalisée avec des bas nylon remplis de sable, 20 ans avant que les installations d’Ernesto Neto soient achetées par les grands musées.

Les artistes remettent en cause les tabous sexuels et exhibent le sexe féminin. Au rez-de-chaussée, le visiteur est alpagué par la voix d’Orlan « 5 francs, un vrai baiser d’artiste, un vrai de vrai » : prostitution et mercantilisme de l’art sont mis en parallèle dans cette performance de l’artiste à la FIAC de 1977. A New York, pendant le Perpetual Fluxus Festival, Shigeko Kubota réalise une « vagina painting », accroupie un pinceau plongé dans la peinture rouge entre les cuisses, donnant l’impression de peindre avec le sang de ses menstruations. Alors que certaines artistes reprennent le mythe de la déesse-mère, telle Niki de Saint-Phalle et sa gigantesque Hon dont une vidéo accueille le visiteur dès l’entrée du PS1, d’autres présentent des images plus violentes, telle Cosey Fanni Tutti et ses photographies pornographiques où elle est elle-même le sujet de l’oeuvre.

En effet, nombreuses sont les femmes artistes à ouvrir les frontières entre l’art et la vie, entre leur expérience et leur création. Certaines utilisent leur expérience quotidienne domestique, comme Sylvia Plimack Mangold peignant la pile de linge sale qui s’accumule sur son plancher. D’autres artistes travaillent à partir d’un documentaire moins prosaïque. Les dessins et textes de Suzanne Lacy sont les témoins de ses rencontres avec des prostituées de Los Angeles et San Francisco ; en 1974, Nil Yalter, Judy Blum et Nicole Croiset montrent de l’intérieur les conditions carcérales dans la prison des femmes de la Roquette.

Ces oeuvres ont presque toujours une dimension politique : les artistes femmes des années 70, lasses de l’histoire exclusivement masculine, voulaient écrire une « Herstory » faite par ces femmes représentées dans les affiches féministes de Mary Beth Edelson. Cependant, la frontière entre féminisme et histoire de l’art des années 70 est souvent floue, car Wack montre avant tout un art contestataire qui en plus d’un message politique, remet en cause le marché de l’art et les formes traditionnelles de l’art. Certaines oeuvres pourraient avoir leur place au milieu de pièces contemporaines masculines, davantage qu’au sein d’une exposition sur l’art et le féminisme, comme les Atmospheres que Judy Chicago crée avec du feu entre 1967 et 1974, nuages et lignes de feux multicolores réalisés avec le public dans des lieux divers.

Cependant, il y a encore un sens à rassembler le travail de toutes ces artistes, si différentes soient-elles, dans une exposition, car, si beaucoup d’artistes femmes sont aujourd’hui reconnues, il reste encore beaucoup à faire pour les inscrire dans l’histoire de l’art « officielle », celle du MoMA, plutôt que celle du PS1. Mais c’est peut-être une chance, le moyen d’éviter la canonisation mortifère.

 

Informations pratiques
MOMA PS1

22-25 Jackson Ave
11101 NY
États-Unis

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