Profession

Maquettiste d’architecture

Par Sophie Flouquet · Le Journal des Arts

Le 15 avril 2009 - 748 mots

Traduire un projet en trois dimensions : tel est le rôle de ces professionnels de l’architecture qui subissent la concurrence de l’imagerie numérique.

C’est avec le « trou des Halles », dans les années 1970, que Jean-Claude Marmorat a débuté sa carrière. « Le traitement des sous-sols était si complexe que même les meilleurs professionnels n’arrivaient plus à lire les plans. Les transcrire en volume était le seul moyen pour s’y retrouver » explique-t-il. Âgé de 72 ans, ce spécialiste de la maquette d’architecture installé à Paris a, au cours des décennies suivantes, œuvré pour de nombreux commanditaires, collectivités locales, promoteurs, administrations des monuments historiques, particuliers. Il a ainsi exécuté tous types de créations en volume : quartiers urbains, raffineries pétrolières, sans oublier de luxueuses villas tropéziennes ou des nœuds d’échangeurs routiers. Les monuments historiques font partie de son champ de compétences, avec une prédilection pour l’architecture byzantine. Aujourd’hui en semi-retraite, il se consacre à des travaux plus longs de reconstitution de monuments disparus, des commandes émanant principalement de l’Unesco. Architecte de formation, il avoue s’être spécialisé dans ce domaine un peu par hasard, étant plus proche de la conception de l’architecture que de son exécution. La maquette est en effet un objet au statut pluriel, servant pour l’architecte à la fois d’aide à la conception mais aussi d’outil de communication ou de promotion, voire de pédagogie. « Tous les gens travaillant dans la maquette sont issus d’une branche spécialisée, poursuit Jean-Claude Marmorat. Ainsi dans le secteur naval, mais aussi dans l’industrie ou le design. Dans le domaine de l’architecture, il est impératif de savoir lire un plan et le traduire en volume. »

Secret professionnel
Denis Leblanc, installé quant à lui à Amboise (Indre-et-Loire), a débuté des études d’architecture et obtenu un diplôme de collaborateur d’architecte, avant de s’installer en tant que maquettiste. La plupart des professionnels exercent en effet en qualité d’indépendant, même si quelques structures, de taille plus importante, emploient des salariés, rarement architectes. Seules de grandes agences d’architecture continuent encore, de leur côté, à employer des maquettistes salariés, gage de confidentialité pour les projets. « Il existe une règle d’or dans le métier, tient toutefois à préciser Jean-Claude Marmorat, c’est le secret professionnel. Il est primordial pour certains projets d’urbanisme. Imaginez ce qui se passerait si les marchands de biens ou les promoteurs étaient mis au courant ». Lecture des documents d’architecture et d’urbanisme, mais aussi maîtrise du dessin et dextérité sont donc des prérequis pour œuvrer dans ce domaine. Autrefois fabriquées en bois ou en plâtre, les maquettes sont, depuis les années 1970, plus souvent conçues en matière plastique, en particulier en Plexiglas. Ce dernier matériau « peut être usiné de toutes les manières, collé et peint facilement, précise Denis Leblanc. Nous partons de plaques vierges et nous fabriquons tout ». Échelle, taille et précision du détail (décor, mobilier, végétation) dépendent ensuite du choix et du budget du commanditaire. L’apparition de l’imagerie en trois dimensions a pourtant porté un sérieux coup à cette branche professionnelle, aujourd’hui en perte de vitesse. « Les images de synthèse ont tué la maquette-volume », tranche Denis Leblanc, qui pense aujourd’hui à une reconversion après vingt-cinq ans d’activité. Au cours de ces quinze dernières années, de nombreux ateliers ont en effet clos leurs portes. « Autrefois, pour chaque projet était commandée une maquette, regrette Denis Leblanc. Aujourd’hui, pour des questions de coût, cela se réduit aux grands projets ». Seuls les concours d’urbanisme ou les grands projets d’architecture publics sont encore traduits en maquette, afin de faciliter leur compréhension par les membres des jurys. Le modèle réduit reste en effet un outil de communication extrêmement efficace. « Toutes les grandes villes ont des maquettes urbaines de leur territoire qui permettent de replacer chaque nouveau projet dans son contexte, explique Jean-Claude Marmorat. Mais aujourd’hui, certaines architectures sont tellement complexes que des maquettistes qui ne sont que dessinateurs n’arrivent plus à en lire les plans. » Aux maquettistes donc, de suivre les évolutions de l’architecture. Ce que certains, notamment dans les sociétés spécialisées, ont déjà fait, en utilisant les nouvelles technologies pour informatiser la fabrication des maquettes. « La main-d’œuvre étant ce qui coûte le plus cher, le renouveau viendra peut-être de là », reconnaît avec lucidité Denis Leblanc.

Formation

Il n’existe pas de formation dédiée à la maquette d’architecture. Les professionnels sont en général issus des écoles d’architecture. Les formations de prototypistes qui existent dans le cadre de CAP sont plus orientées vers les métiers de l’ameublement ou de l’industrie.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°301 du 17 avril 2009, avec le titre suivant : Maquettiste d’architecture

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