Bronzes animaliers, une sélection naturelle

L'ŒIL

Le 1 février 2004 - 693 mots

Le prix des bronzes animaliers connaît, depuis dix ans, une augmentation régulière et prononcée. Depuis deux ans, cette tendance à la hausse doit cependant être modérée : elle ne concerne, de plus en plus, que les bronzes de très haute qualité. Par ailleurs le goût évolue, et les collectionneurs se tournent vers de nouvelles espèces animales.

« Les collectionneurs qui viennent à la galerie ne réclament que le haut de gamme ; les pièces moyennes s’effondrent », explique Alain Richarme, de la galerie Univers du Bronze. On achète des fontes d’atelier ou réalisées du vivant de l’artiste. La sélectivité des acheteurs s’attache à la couleur de la patine, parfois au détriment de bronzes de qualité. « La patine verte, répandue dans les années 1880, est impopulaire, constate Alain Richarme. Celle qui a le plus de succès est marron, nuancée de rouge. Une tendance très nette porte les acheteurs vers trois animaux cette année : les ours, les éléphants et les chevaux. On apprécie moins qu’il y a quelque temps les sujets romantiques, combats de fauves, plus difficiles. Au XXe siècle, on est attiré par les signatures : Bugatti, Pompon, Sandoz, Righetti, Guyot. Un mouvement général pousse les acheteurs vers la sculpture du XXe siècle. Mais le XIXe est toujours aussi recherché. » Entre tous, Barye et Fratin ont les meilleures cotes. La vente réalisée par Christie’s le 24 avril dernier et consacrée à Barye a remporté un succès triomphal, avec deux records mondiaux, pour des sujets mythologiques. Côté animaux, un Python étouffant un crocodile fut adjugé 101 600 dollars. Bugatti reste le sculpteur animalier le plus cher, sa cote s’échelonnant de 100 000 à 500 000 euros. Le 13 décembre 2003, un lion de Nubie vendu par Sotheby’s à New York, atteignait 377 600 dollars. Pompon, Guyot, Sandoz se portent bien également. Le 18 novembre 2003, Sotheby’s Paris adjugeait une panthère de Guyot 15 600 euros, prix normal et une paire d’appliques aux singes de Sandoz montait à 35 600 euros. La cote de Pompon reste solide, autour de 30 000 euros. « On ne doit pas prendre pour la baisse de cote d’un sculpteur les faibles adjudications sanctionnant des fontes de mauvaise qualité », avertit Alain Richarme. Par ailleurs, les faux menacent toujours le marché des bronzes. Certains, d’une exécution parfaite, déconcertent les meilleurs professionnels. Les salles de vente ne permettent pas un examen prolongé des pièces. « À mon sens, les plus grandes collections se constituent auprès des marchands et avec l’aide de conseils », conclut Alain Richarme. Les bronzes de chasse, quant à eux, ont subi une décote. « Ces bronzes ont été plébiscités, en salles de vente, il y a quelque temps. La demande a enflé et elle était en partie de nature spéculative. Depuis, les prix ont beaucoup baissé et il est désormais possible d’en acquérir à des prix très intéressants », explique Stanislas Pytel, de la galerie Chasseur d’objets. On trouvera de petits bronzes de qualité dès 1 200/1 500 euros. Cette baisse des prix ne doit pas faire oublier qu’il reste, pour ces bronzes, de nombreux amateurs. Leurs critères de choix sont précis et stables. Les sculpteurs appréciés sont Mène, Cain, Dubucamp, Fratin, Moigniez, Comte du Passage. Les sujets affectionnés, les oiseaux, bécasses, bécassines, perdreaux ; les sangliers et toujours les chiens, au rapport, en travail… Les cerfs, répandus, sont moins recherchés que les chevreuils. « On apprécie, dans les bronzes, la précision “cygénétique”, les animaux représentés tels que l’on pourrait les rencontrer dans la nature. » Une connaissance profonde de l’animal distingue les meilleurs sculpteurs. Les amateurs de petits bronzes peuvent aussi se retrouver dans la tendresse, l’humour qui émanent des portraits d’animaux réalisés au xxe siècle. Cette tendance sort de l’ombre des artistes, comme Richard Fath. Les éditions de ses chiens, réalisées en bronze par son fils le sculpteur Richard Camille Fath, ont une petite clientèle d’amateurs. « Le sculpteur animalier a, avec les bêtes, un contact simple et naturel, explique ce dernier. Fath s’efforçait de saisir le naturel de la bête et se refusait à toute stylisation. Il aurait couru le risque, en la transposant, de perdre l’extraordinaire richesse de la nature. »

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°555 du 1 février 2004, avec le titre suivant : Bronzes animaliers, une sélection naturelle

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