Alvar Aalto : pas d’architecture sans design

Par Bénédicte Ramade · L'ŒIL

Le 19 juin 2008 - 503 mots

Le designer d’objets iconiques est aussi un architecte qui a laissé à Helsinki nombre de joyaux disséminés dans la ville, des constructions finlandaises et universelles.

Finalement tout le monde connaît Aalto, au moins un de ses meubles, luminaires ou objets produits par la maison Artek, structure de développement, de fabrication et de commercialisation, créée dès 1935 avec sa femme, Aino, et un couple d’amis. Ce que l’on sait moins, c’est que toutes ces créations sont liées à des bâtiments, l’architecte ne concevant pas de livrer une coquille vide.
Ainsi, le tabouret n°60, un basique de l’ameublement, a été créé pour la bibliothèque de Viipuri en 1933 et la fameuse chaise de repos aux lignes courbes si élégantes pour le sanatorium de Paimio, le premier bâtiment complexe d’Aalto qui le propulsa immédiatement au sommet. C’est aussi pour une institution d’Helsinki qu’Aalto créa son vase en ligne courbe, le fameux restaurant Savoy, dont il signa l’aménagement en 1936. L’endroit est resté quasiment intact et le vase, un des best-sellers de la « marque » Aalto.

Monument national historique
Sur le plan architectural, sa maison et première construction à Helsinki matérialise à merveille cet alliage de tradition locale avec ses matériaux traditionnels, d’une admiration sans limites pour le classicisme italien et d’engouement pour les fondamentaux modernistes. Rationnel, Aalto aimait cependant les détails et certains raffinements qui rendent la pratique de ses intérieurs beaucoup plus douce et chaleureuse que ceux de Le Corbusier par exemple. La visite de la maison mais aussi de l’atelier, siège de la fondation Aalto, atteste du caractère particulièrement vivable de ses créations. Simples, efficaces, les matériaux naturels y tiennent une place de choix avec une dimension sensible qu’on ne devine pas toujours à la vue de ses façades austères.
La maison de la culture de sa période brique, de pur style Aalto, fut créée dans le quartier d’Alppila pour le compte du parti communiste entre 1952 et 1958. Elle est aujourd’hui classée monument national historique. L’orchestre symphonique de la radio nationale y joue régulièrement et offre ainsi l’occasion d’entrer dans la salle. La signature d’Aalto, c’est ce plafond courbe dont l’ondulation douce reprend le lent mouvement imprimé dans la façade aveugle en brique. Le contraste est saisissant entre la lourdeur de la coque extérieure et l’amplitude aérienne de la salle.
Tel est le secret d’Aalto : avec ou sans courbe, cette habilité à sculpter les espaces, à les aménager à la perfection, sans ostentation, maîtrisant la modestie de la brique et du bois avec style. Que l’on se rende en banlieue à Espoo pour visiter le campus de l’école polytechnique et son auditorium radieux ou en centre-ville dans les rayonnages de l’Academic Bookshop (1962-1969), on apprécie les plus belles heures de l’architecture finlandaise.
Jusqu’à l’apothéose, le palais Finlandia, Parlement immaculé quoiqu’un peu massif, véritable fierté nationale et dernière grande réalisation du maestro. Dès 1927, il énonçait un principe dont il ne se sera jamais départi : « Créer de nouvelles formes lorsqu’il n’y a pas de nouveau contenu est dépourvu de sens. »

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°604 du 1 juillet 2008, avec le titre suivant : Alvar Aalto : pas d’architecture sans design

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