Bangkok, voie de garage pour l’art

Le Journal des Arts

Le 25 octobre 2002 - 439 mots

Lancé par l’ancien gouverneur de Bangkok Bhichit Rattakul, l’audacieux projet de centre d’art contemporain BMAC (Bangkok Metropolitan Art Center) est aujourd’hui menacé par son successeur Samak Sundaravej, qui souhaite construire à la place un parking géant et un centre commercial. Les artistes, réunis en groupe de protestation, semblent être parvenus à faire boycotter
le projet du gouverneur.

BANGKOK - Le projet du gouverneur de Bangkok, Samak Sundaravej, de transformer l’important projet de centre d’art BMAC (Bangkok Metropolitan Art Center) en structure purement commerciale, s’est heurté à des obstacles plutôt inattendus. De nombreux artistes ont protesté contre cette décision qui a fait les gros titres des journaux thaïlandais, et des entreprises de travaux publics ont refusé de participer à ce projet. L’idée du BMAC a vu le jour durant le mandat de l’ancien gouverneur, Bhichit Rattakul, qui s’illustra également par la création d’espaces verts et la prise de mesures énergiques contre la pollution. Soutenu par l’homme politique libéral Kraisak Choohaven, fils de l’ancien Premier ministre du pays, le projet de ce lieu dédié à l’art contemporain, mis en place avec des fonds publics mais géré de façon indépendante, était considéré comme un modèle en Asie. L’architecte américain Robert Boughey, qui vit depuis longtemps dans ce pays, a signé les plans de l’élégant bâtiment qui devrait laisser filtrer le bruit du principal quartier marchand de Bangkok. Plus largement,  ce centre devait symboliser l’ouverture de ce pays démocratique du Sud-Est asiatique. Bhichit Rattakul, qui ne s’est pas présenté à sa propre succession, a été remplacé par Samak Sundaravej, un virulent conservateur. Ce dernier a rapidement estimé que la Ville ne pouvait supporter le coût d’une opération de 300 millions de baht (7 millions d’euros).

Sans consulter la population, il a décidé de construire, à la place du BMAC, un immense parking dont le sommet devrait accueillir un centre commercial “culturel”. Indignés, les artistes se sont réunis au sein d’un groupe de protestation conduit par le conservateur de musée Chumphon Apisuk, et ont fait éclater au grand jour le dessein de Samak Sundaravej. Aucune entreprise de travaux publics n’a dès lors voulu répondre à l’appel d’offre concernant le parking, et de nombreux hommes d’affaires ont exprimé leurs doutes sur le bien-fondé de ce projet, dans une ville qui a déjà subi les conséquences catastrophiques d’une urbanisation à outrance. “C’est scandaleux, a déclaré M. Chumphon. Le BMA (Bangkok Metropolitan Administration) n’a fait aucune étude préalable et n’a contacté aucune personnalité artistique. Nous devons forcer ce gouvernement à consulter les citoyens, car il s’agit d’un projet qui concerne l’espace public.” Ses protestations sont désormais entendues du grand public, mais le seront-elles de Samak Sundaravej ?

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°157 du 25 octobre 2002, avec le titre suivant : Bangkok, voie de garage pour l’art

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