Picasso et Rodin, deux pédagogues de génie

Par Jean-Christophe Castelain · L'ŒIL

Le 20 février 2009 - 373 mots

Alors que « Picasso et les maîtres » vient de fermer ses portes aux Galeries nationales du Grand Palais, s’ouvre bientôt, à Orsay, une exposition sur la sculpture après Rodin : « Oublier Rodin ? » De nombreux points communs unissent ces deux génies bien qu’une génération les sépare. L’un et l’autre sont des figures de proue de la modernité. Et dans un registre plus anecdotique (encore que), Rodin et Picasso sont d’éternels amoureux des femmes. Ils ont produit tout au long de leur vie des dessins et tableaux érotiques, comme en atteste une autre exposition sur Rodin, cette fois à la fondation Gianadda en Suisse. L’œil rend compte de ces deux manifestations dans cette parution.

Le propos des expositions du Grand Palais et d’Orsay est le même : montrer la filiation entre les créateurs, les influences des maîtres sur les générations suivantes. En amont pour Picasso, en aval pour Rodin. Ce principe d’exposition a des vertus pédagogiques. Il incite le public à exercer son regard, à comparer les œuvres afin d’analyser les réinterprétations, à identifier les citations iconographiques ou formelles, à repérer les emprunts, en somme à mieux regarder. Ce faisant, le regardeur entre dans l’acte proprement dit de création, pénètre la pensée de l’artiste. À la délectation des œuvres s’ajoute une démarche réfléchie ou ludique. Le public, notamment le public occasionnel, devient plus actif, s’investit dans sa visite et, dès lors, prend goût à une fréquentation plus assidue de l’art.

C’est en cela que « Picasso et les maîtres » a été une exposition remarquable. L’argument scientifique est certes mince, mais l’enjeu ne se situe pas sur ce terrain. L’accumulation de chefs-d’œuvre et un marketing assumé ont convaincu 783   000 personnes de s’y rendre. Un record pour le Grand Palais auquel s’ajoutent les déclinaisons à Orsay (« Picasso/Manet », tout aussi intelligent) et au Louvre. Ce sont au moins 200   000 à 300   000 visiteurs intermittents qui vont aller plus souvent au musée. Tous les professionnels de l’art devraient se féliciter de cet immense succès, notamment vis-à-vis de leurs collègues étrangers. Ils en tireront profit à un moment où à un autre. Rodin ne sera pas « oublié ». Et en ces périodes de spleen économique, tout est bon à prendre.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°611 du 1 mars 2009, avec le titre suivant : Picasso et Rodin, deux pédagogues de génie

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