François Jonquet, chroniqueur du monde de l’art

Le journaliste et écrivain souhaitait également écrire un livre sur le marché de l’art et ses mécanismes, selon lui emblématiques du capitalisme. Ou l’étrange alchimie qui fait que la volonté d’un marchand, le goût d’un collectionneur, les caprices de la mode peuvent du jour au lendemain conférer une valeur précieuse à ce qui n’en avait aucune.

Mêlant imaginaire et réalité, l’histoire met en scène deux personnages clés : Christian Boltanski, dans le rôle du maître à penser génial et néanmoins jovial, et Annette Messager, en artiste fascinante aux allures de vamp impériale et maternante. Les citations, authentiques, retranscrites en italique, ajoutent une dimension savoureuse de témoignage vécu, tel ce chapitre de verbatims consacrés aux souvenirs de Christian Boltanski et de ses débuts, au tournant des années 1970, chez la marchande Ileana Sonnabend, qui présentait alors Andy Warhol à Paris et lui ouvrit les portes de sa galerie, le faisant bénéficier de son aura, de son réseau planétaire comme de ses colères telluriques. D’autres figures familières telles que la tante de l’auteur, son père ainsi que, de façon plus subliminale, un ancien élève de l’atelier de Boltanski, le cinéaste Virgil Vernier, aux confidences duquel ce texte doit aussi quelques accents de vérité, s’invitent dans le décor. Ils contribuent à la vivacité de cet ouvrage au style enlevé, non dénué d’humour, qui professe une certaine liberté d’esprit vis-à-vis des dogmes, mais aussi de la ponctuation, pour adopter un ton personnel et attachant, dans le registre d’une ambivalence très contemporaine entre document et fiction.