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ARTS ASIATIQUES

Paris à la conquête du marché asiatique

Par Marie Potard · Le Journal des Arts

Le 21 juin 2023 - 750 mots

La 6e édition du Printemps asiatique est montée d’un cran pour que Paris reprenne sa place dans la spécialité. Et cela commence à porter ses fruits.

Paris. La manifestation consacrée aux arts asiatiques, qui s’est déroulée du 7 au 16 juin, s’est achevée sur une note positive. Davantage de communication, un renforcement de la présence des marchands étrangers et un programme culturel fourni ont permis de faire la différence avec les éditions précédentes. Treize musées s’étaient ralliés à l’événement – peu de pays européens peuvent se vanter d’avoir autant d’institutions exposant de l’art asiatique. « Il faut tous ces ingrédients pour que les collectionneurs internationaux se disent qu’ils ne peuvent pas se permettre de manquer ce rendez-vous », soulignait Christophe Hioco, aux commandes du Printemps. Il faut dire que Paris a une carte à jouer depuis que New York et Londres, notamment depuis le Brexit, sont en perte de vitesse. Force est de constater que la capitale française est en train de regagner du terrain dans cette spécialité.

La Pagode, cœur parisien des arts asiatiques

Temps fort de ce Printemps asiatique, l’exposition collégiale organisée à la Pagode rassemblait les grands marchands internationaux. Parmi eux figurait le marchand américain Alan Kennedy et le Néerlandais Floris van der Ven (Vanderven Oriental Art), spécialisé en céramique et arts décoratifs chinois. Venu avec un écran en jade (Chine, époque Qianlong, 1736-1795), représentant l’explorateur Zhang Qian dans un bateau (195 000 €), il a vendu plusieurs objets (à des prix entre 5 000 et 15 000 €), « notamment à un client anglais ». Était également présent le marchand londonien d’armes et d’armures antiques asiatiques, Runjeet Singh, qui avait apporté un sabre indien (Deccan) du XVIIe siècle, la poignée décorée d’incrustations d’or (au-delà de 50 000 €). « Avec le Brexit, c’est devenu très compliqué de vendre aux clients étrangers, d’où ma présence ici à Paris », confiait-il. Le marchand français Nicolas Fournery, spécialisé dans la porcelaine de Chine importée en Europe aux XVIIe et XVIIIe siècles, a vendu toutes ses pièces phares – dont une terrine armoriée aux figures chinoises pour le marché français (Chine, époque Yongzhen, 1723-1735), provenant de la collection Philibert Orry, contrôleur général des finances dans le gouvernement de Louis XV (en dessous de 60 000 €).

Le soir du vernissage, « plusieurs gros acheteurs étrangers avaient fait l’aller et retour pour être présents à la soirée, ce qui est très positif. C’est d’ailleurs notre objectif numéro un pour réussir cet événement », se félicitait Christophe Hioco. Et Alexis Renard de compléter : « Nous avons vu un certain nombre de Chinois venus de Chine. Ils commencent à revenir. » Pour autant, « ils sont surtout là pour les ventes aux enchères où ils sont prêts à payer trois fois le prix, par goût du jeu », tempérait un acteur du marché.

Des ventes aux enchères uniquement à Paris

Les maisons de ventes les plus importantes proposaient des vacations dans cette spécialité. Signal fort envoyé au marché, un Bouddha Shakyamuni en schiste gris (Gandhara, III-IVe siècle), qui a appartenu au Metropolitan Museum of Art (MET) et qui sera vendu en décembre chez Christie’s Paris (est. 400 000 à 600 000 €), était exposé à la Pagode. Quelques années avant, la sculpture aurait probablement été directement vendue à New York… En l’espèce, « c’était le souhait de son propriétaire de la vendre à Paris. Fin observateur du marché, il a constaté la vigueur croissante de Paris. Pour rappel, et cela était déjà un signe très avant-coureur de la force de Paris sur le marché de l’art asiatique – Christie’s a été précurseur en ce sens –, nous avons fermé les ventes de Londres fin 2020. Il y reste un département, mais tous les objets qu’il source sont ensuite vendus à Paris deux fois par an, en juin et en décembre », a rapporté Camille de Foresta, commissaire-priseur et spécialiste des arts asiatiques chez Christie’s. Il en va de même pour la collection Claude de Marteau dispersée en France par Bonhams Cornette de Saint-Cyr (qui a déjà rapporté 11,4 M€).

Cependant, les galeries qui n’exposaient pas à la Pagode – une vingtaine répartie dans pas moins de six arrondissements – étaient déçues. « Tout le monde croit que le Printemps asiatique, c’est à la Pagode, donc dans les galeries, il n’y a pas un chat », se désolait Frantz Fray (Espace 4), qui confiait avoir un peu vendu quand même. Impossible de faire tenir autant d’exposants à la Pagode. Les organisateurs réfléchissent donc à trouver un lieu plus vaste pour la prochaine édition, peut-être à la Monnaie de Paris.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°614 du 23 juin 2023, avec le titre suivant : Paris à la conquête du marché asiatique

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