Suisse - Justice

Fin du feuilleton judiciaire Bouvier-Rybolovlev

Par Ingrid Dubach-Lemainque, correspondante en Suisse · lejournaldesarts.fr

Le 12 décembre 2023 - 519 mots

GENÈVE / SUISSE

Les deux hommes ont annoncé avoir trouvé un accord pour clore un litige qui a défrayé la chronique.

Yves Bouvier © Photo Hpetit21, 2008 / Dmitry Rybolovlev © Photo Francknataf, 2012 - Montage photos Le Journal des Arts
Yves Bouvier / Dmitri Rybolovlev
Photo Hpetit21 (CC BY-SA 4.0) / Francknataf (CC BY-SA 3.0). Montage photos LeJournaldesArts.fr.

Il aura fallu huit ans pour que l’affaire qui opposait le marchand d’art genevois Yves Bouvier à l’homme d’affaires russe Dmitri Rybolovlev soit close. Entre 2003 et 2014, le Genevois, surnommé « le roi des ports francs » pour avoir été le principal locataire du port franc de Genève dont il a développé les activités dans le domaine de l’art, avait vendu au « roi de la potasse » et propriétaire du club de football de Monaco, 38 œuvres d’art pour un montant total de 2,2 milliards de francs suisses (2,33 milliards €).

En 2015, Dmitri Rybolovlev portait plainte contre Yves Bouvier pour escroquerie, blanchiment d’argent et gestion déloyale auprès de la justice monégasque. Le milliardaire russe établi à Monaco accusait le Genevois d'avoir surfacturé à hauteur d’environ 1 milliard de francs suisses (1 milliard d’euros) les œuvres qu’il lui avait vendues - signées Picasso, van Gogh ou Modigliani et sans oublier le fameux Salvator Mundi, attribué à Léonard de Vinci : acheté 80 millions de dollars en 2013 par Bouvier auprès de Sotheby’s (74 millions €), revendu 127 millions de dollars (118 millions €) dans la foulée à Rybolovlev qui l’a revendu lui-même en 2017 chez Christie’s où il a été acquis 450 millions de dollars (418 millions €) par le prince héritier d’Arabie Saoudite. Des soupçons d'escroquerie ont été instruits par la suite par la justice genevoise depuis 2017 concernant les mêmes faits.

Léonard de Vinci (1452-1519), Salvator Mundi (sauveur du monde)
Léonard de Vinci (1452-1519), Salvator Mundi (sauveur du monde), circa 1500, huile sur panneau de noyer, 64,5 x 44,7 cm
© Christie's Images Limited

L’affaire a connu maints rebondissements, Yves Bouvier étant également soupçonné par la justice helvétique d'avoir soustrait 81 millions de francs suisses (85 millions €) d’impôts sur les dividendes. En outre, ses sociétés basées à Hong Kong et aux Îles vierges britanniques, se sont vues réclamer 84 millions de francs suisses (89 millions €) au titre d'impôts sur le bénéfice. Pour le marchand genevois, c’est un coup monté qui porte la trace du camp Rybolovlev.

Le 12 décembre 2019, la procédure intentée pour escroquerie contre Yves Bouvier par Dmitri Rybolovlev était entièrement annulée par la Chambre du conseil de la Cour d'appel de Monaco : en cause, la procédure menée de « manière partiale et déloyale » en raison notamment des relations entre les avocats de Dmitri Rybolovlev, les enquêteurs et le procureur général de l'époque. « Corruption active », « trafic d’influence » et « prise illégale d’intérêts », c’est sous ces chefs d’accusation que le milliardaire russe fut alors inculpé. En 2021, l’affaire Bouvier - Rybolovlev était classée une première fois par la justice genevoise : suite à l’appel de Rybolovlev, la Cour de justice de Genève avait demandé au procureur de reprendre l'instruction de l'affaire Bouvier en 2022.

Les deux parties adverses ont annoncé il y a quelques jours avoir conclu un accord (dont les termes ne sont pas connus) et retirer leurs plaintes pénales. La procédure a par conséquent été classée par le premier procureur genevois Yves Bertossa, nonobstant des frais de procédure d’un montant de 100 000 francs suisses à charge d’Yves Bouvier. Le marchand d’art genevois qui se dit ruiné par cette longue procédure, rêve pourtant encore à l’établissement de nouveaux ports francs à Dubaï ou Vladivostok.

Erratum - 22 décembre 2023

Contrairement à ce que nous avons indiqué, la procédure devant le procureur genevois n’a pas été close en raison d’un retrait de plainte, mais parce que le procureur a estimé à la suite d’auditions, qu’il n’y avait pas matière à poursuite.

Par ailleurs, le conseil d’Yves Bouvier nous a indiqué qu’Yves Bouvier n’a aucunement l’intention d’ouvrir de nouveaux ports francs.

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