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ENTRETIEN

Daniel Templon : « L’optimisme reste à l’ordre du jour »

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 18 octobre 2023 - 788 mots

PARIS

Le galeriste parisien commente la situation du marché, le rôle des foires, la place new-yorkaise où il s’est installé, et l’avenir.

Daniel Templon. © Luc Castel, 2013
Daniel Templon.
© Luc Castel, 2013
Paris+ est-il conforme à vos attentes ?

Nous attendions que Paris+ fasse événement. Ce fut le cas. Art Basel est une marque qui attire toujours autant. Les étrangers sont venus en plus grand nombre que les autres années. Je note cependant que la question du choix entre Bâle et Paris se pose maintenant. Beaucoup de collectionneurs ne pourront pas faire les deux pour des raisons d’emploi du temps. Il faudra arbitrer. Mais nous ne pourrons réellement juger de la plus-value de Paris+, qui s’appellera alors Art Basel Paris, que lorsque la foire reviendra au Grand Palais l’année prochaine.

Vous êtes un habitué des foires, quelle est la part de votre chiffre d’affaires réalisée dans les foires ?

Nous participons à plus d’une dizaine de foires par an où nous réalisons entre 40 et 50 % de notre chiffre d’affaires. Le coût des foires est élevé. À titre d’exemple, la Fiac, maintenant Paris+, avec un stand de seulement 64 m2, coûte environ 80 000 euros, tout compris.
L’Armory à New York, pour 90 m2, 120 000 euros, plus 20 000 euros de frais de transport ! C’est devenu très cher. Il faut donc vendre à chaque fois beaucoup. Chaque foire aux quatre coins du monde a sa spécificité et impose donc un choix d’artistes et d’œuvres différent. Pour certaines, il faut des œuvres chères, pour d’autres des œuvres à des prix très abordables. Malgré ces frais considérables, participer à ces foires est devenu indispensable. Nous y rencontrons en quelques jours beaucoup plus d’acheteurs potentiels qu’en six semaines d’exposition dans la galerie, qui est pourtant, en ce qui me concerne, très fréquentée. En outre, elles nous permettent de faire découvrir des artistes, notamment français, que les étrangers ne connaîtraient pas autrement.

Pourquoi avoir participé à l’Armory alors que vous venez d’ouvrir une galerie à New York ?

Ouvrir à New York, c’est pénétrer le continent essentiel pour le marché de l’art. Nous touchons désormais des centaines de nouveaux collectionneurs. Le fait d’être présents sur le territoire américain nous oblige à participer à l’Armory, malgré le fait que ce ne soit pas une foire majeure. Nous verrons ce qu’elle deviendra après son rachat par Frieze. Peut-être que les grandes galeries new-yorkaises y reviendront. Certains continuent à trouver qu’elle n’est pas nécessaire. Leo Castelli à qui on demandait « Pourquoi vous n’y participez pas ? » répondait « À New York, c’est la foire tous les jours ».

Comment se porte le marché ?

On disait autrefois que les crises économiques mondiales qui touchent tous les secteurs d’activité par réaction en chaîne – la bourse, l’immobilier, etc. – et donc, à la fin, le marché de l’art, ont lieu tous les sept ans. Depuis 1991, nous n’avons rien vu venir à part le ralentissement en 2008, fort heureusement. L’optimisme reste à l’ordre du jour. La mondialisation de ce marché est même une protection. Acheter de l’art, ne serait-ce que pour une petite part de ses placements, est recommandé par tous les gestionnaires de fortune. Le risque est minime, à condition de faire les bons choix.
Les galeries sont devenues ces derniers temps des PME à part entière, souvent dirigées par des gens diplômés. Le climat général est donc très satisfaisant. Si une galerie ne marche pas et doit fermer, c’est que son propriétaire est un mauvais gestionnaire.

Que vous inspire la prise de participation majoritaire de Colony dans le capital de la galerie Perrotin ?

Je suis perplexe. En ayant cédé 60 % de son capital à un investisseur – c’est ce que j’ai lu dans la presse –, Emmanuel, pour lequel j’ai beaucoup d’estime, n’a-t-il pas oblitéré son indépendance ? L’actionnaire ne va-t-il pas s’immiscer dans la programmation et, par exemple, demander à son directeur de se séparer des artistes les moins « rentables » ? En tout cas, il perd son indépendance, sa liberté de choix qui fait le plaisir de ce métier.

Qu’est-ce qui vous fait vous levez le matin ?

Cela ne vous étonnera pas si je vous dis que, depuis 57 ans – après le café et les informations (« savoir, c’est pouvoir ») –, ma pensée et mes pas se dirigent vers la galerie où tant de choses nouvelles à faire m’attendent. Comme je le disais à l’instant, c’est un métier de passion au quotidien, qui conditionne toute votre existence. Il n’y a ni limite d’âge ni retraite.

Comment voyez-vous l’avenir ?

Le plus souvent une galerie s’arrête avec la disparition de son fondateur. Moi, j’ai la chance d’avoir un fils qui dirige celle de New York, ouverte il y a un an, et qui pourra prendre la suite. Mais il n’y a pas d’urgence…

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°618 du 6 octobre 2023, avec le titre suivant : Daniel Templon « L’optimisme reste à l’ordre du jour »

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