Art moderne

Riehen/Bâle (Suisse)

Un peintre géorgien

Fondation Beyeler – Jusqu’au 28 janvier 2024

Par Ingrid Dubach-Lemainque, correspondante en Suisse · L'ŒIL

Le 25 octobre 2023 - 324 mots

Héros  - Soyons francs, ce nom-là a toutes les chances de vous être inconnu, à moins que vous n’ayez eu l’occasion de visiter les expositions de l’Albertina à Vienne ou de la Fondation Van Gogh à Arles consacrées en 2018 et 2019 au peintre géorgien Niko Pirosmani (1862-1918).

En son pays natal, il est célébré comme un héros, et son effigie orne les billets de banque. Que voit-on dans cette présentation d’une cinquantaine d’œuvres, saluée comme la plus importante exposition internationale lui ayant jamais été consacrée ? Des figures d’hommes ou de femmes, fortes et massives, aux contours nets et aux coloris tranchants, ou des animaux (girafe, sanglier, biche de profil) qui s’affichent sur des toiles de grand format sur un fond noir opaque ou uni ; des scènes de village ou de fêtes rituelles sous forme de longs panoramas. Un terme nous accompagne durant la visite : « art naïf ». Voilà à quoi fait penser cette peinture simple et directe, minimaliste dans ses moyens et son expression. Comme le Douanier Rousseau, Pirosmani était autodidacte. L’exposition et le catalogue offrent un panorama érudit, mais aussi très didactique sur les inspirations, le parcours et le contexte de travail du peintre, grâce à la collaboration avec des historiens d’art géorgiens. Qualifier cette peinture d’expression naïve ou authentique est pourtant « une stratégie qui montre des parallèles avec le colonialisme », nous avertit Daniel Baumann, le commissaire de l’exposition. Il n’a certes pas tort : Pirosmani demande à être, comme tous les artistes, découvert « couche après couche », dans toutes ses dimensions, pour être bien compris. Peintre d’avant-garde, traditionnel, typiquement soviétique, typiquement géorgien, naïf : Pirosmani a été perçu (et catégorisé) selon les époques comme tout et son contraire. L’exposition fait fi de présenter cette peinture pour ce qu’elle est, en toute objectivité. Une louable intention qui n’est pas sans écueil, car en prônant l’abolition de termes consacrés et aujourd’hui désavoués, le risque de former un nouveau diktat du goût est grand.

«Niko Pirosmani »,
Fondation Beyeler, Baselstrasse 101, Riehen/Bâle (Suisse), www.fondationbeyeler.ch

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°769 du 1 novembre 2023, avec le titre suivant : Un peintre géorgien

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