Art contemporain - Art urbain

Sous le parvis, le « Monstre » de Moretti

Par Olympe Lemut · Le Journal des Arts

Le 23 février 2024 - 460 mots

À l’occasion du festival « Les Extatiques », les sous-sols de la Défense offrent au public un parcours artistique et des visites de l’atelier de Raymond Moretti.

Paris. Enfermé dans un espace de plus de 1 000 mètres carrés sous la dalle de béton du parvis du quartier d’affaires de la Défense, Le Monstre construit par Raymond Moretti à partir de 1973 prend la poussière depuis le décès de l’artiste en 2005. Œuvre en perpétuelle évolution commencée à Nice en 1962, cette installation de 30 mètres de long a occupé Moretti pendant plus de trente ans : morceaux de bois, pièces métalliques, tableaux abstraits et plexiglas composent une œuvre unique devenue rapidement mythique. Car Moretti s’est installé en 1973 dans un« espace résiduel sous la dalle en construction », comme l’explique Noëllie Faustino, directrice du pôle événementiel de l’Établissement public Paris-La Défense. Cet espace vide n’avait pas de fonction spécifique, contrairement aux parkings ou locaux techniques : il existe plusieurs espaces résiduels sous la dalle, mais aucun autre n’a fait l’obet d’une telle appropriation. Si jusqu’aux années 1990 il ouvrait ses portes aux visiteurs et amis pour des soirées culturelles, l’atelier est fermé au public depuis les années 2000. Pour expliquer cette fermeture, Noëllie Faustino évoque des questions de sécurité et de « nouvelles normes ERP », car les sous-sols ne sont pas censés recevoir du public sans aménagement.

Une réhabilitation des lieux en projet

Le Monstre se contemple donc depuis la coursive, où quelques cartels sommaires résument son histoire : il faudrait à l’évidence revoir cette présentation et remettre en contexte le travail de Moretti. L’atelier reste sous la gestion de l’établissement public, qui le fait visiter, avec la collaboration de l’association Paris Face cachée, pendant l’événement « Les Extatiques » à des groupes de « dix-neuf personnes maximum ». À terme, une restauration de l’œuvre est envisagée ainsi que des travaux d’aménagement : un projet de réhabilitation des sous-sols est en cours de réflexion. Un concours lancé avant la crise sanitaire a permis de sélectionner ce projet, mais la question du financement reste en suspens. En attendant, le festival présente dans l’espace adjacent d’une surface de 5 000 mètres carrés appelé « Cathédrale » l’exposition du collectif Les Interstices, réunissant des artistes venus principalement du milieu de l’« urbex » (exploration urbaine), « habitués aux lieux inaccessibles ou interdits », résume Noëllie Faustino. Entre photographies de lieux abandonnés et fresques énigmatiques (Cassandre Charpentier, Stéphane Babatasi, Olivier Dexheimer), sculptures en matières recyclées (Déchets d’arts, Saint-Denis), impressions photographiques sur tissus (Mel) et une installation géante de calligraphie et néons (Katre, Obsolettrisme), les œuvres s’adaptent à un environnement souterrain où le bruit et la poussière sont omniprésents. Si l’éclairage laisse parfois à désirer, l’exposition témoigne d’une réflexion sur les lieux en marge de la société, non sans une touche d’inquiétude, perceptible dans la vidéo de Rozetta Emka.

Le monstre de Raymond Moretti
Les Extatiques,
jusqu’au 25 février, Paris-La Défense, visite à réserver sur parisladefense.com

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°627 du 16 février 2024, avec le titre suivant : Sous le parvis, le « Monstre » de Moretti

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