Belgique - Art contemporain

Jim Shaw, celui qui décoiffe l’Amérique

Au Muhka, l’artiste californien livre une satire délurée de la société néolibérale américaine.

Jim Shaw devant l'œuvre Octopus Vaacum (2008) au MUHKA d'Anvers. © MUHKA / Praz-Delavallade Paris, Los Angeles
Jim Shaw devant l'œuvre Octopus Vaacum (2008) au MUHKA d'Anvers.
© MUHKA / Praz-Delavallade Paris, Los Angeles

Anvers. Jim Shaw (né en 1952 à Midland, Michigan) aime les cheveux et les aspirateurs. C’est aussi un artiste qui pose un regard ironique et détaché sur la psyché américaine à travers le prisme de sa culture populaire. La psyché américaine ou l’éternel conflit entre l’individu et le système. Un individu qui se « sublime » et qui affirme son statut dans la sophistication de son architecture capillaire. Dans sa série de dessins « Forces of Nature », Shaw dessine ainsi des tourbillons et des explosions de cheveux proches de l’abstraction. Avec « Oism », un projet en cours, l’artiste imagine une secte pseudo-religieuse où l’individu se met en marge de la société pour créer son propre système en détournant l’aspirateur et d’autres ustensiles ménagers emblématiques de l’American way of life pour faire de la musique.

Dans l’exposition que consacre le Muhka, musée d’art contemporain d’Anvers, au travail de l’artiste américain, on mesure toute la diversité de sa pratique artistique qui comprend photographies, dessins, peintures, sculptures, films et installations. Le parcours commence par son travail de fin d’études présenté à CalArts (Santa Clarita/Los Angeles) en 1979, où il détourne la peur et la fascination collectives pour les ovnis et les aliens, et s’achève avec l’installation immersive réalisée pour l’exposition, The Electronic Monster and Thirteen Ghosts. Dans cette dernière, Shaw s’inspire de vieux films de monstres mais aussi de la foi dans une science rédemptrice pour un mash-up vintage avec hommes des cavernes, perruques chantantes et aspirateur agressif. Tout à son obsession capillaire, il propose aussi son musée de la perruque (The Wig Museum, 2017). Une installation où l’on peut découvrir, derrière une enseigne en néon, des coiffures attribuées à Mozart ou répondant à des styles aussi improbables que « maelström », « explosion », « carré » ou « sphère ».

Une collection de peintures d’artistes amateurs achetées aux Puces
Dessinateur autodidacte inspiré par l’esthétique des comics tant réalistes que cartoonesques, il montre de nombreux dessins préparatoires à ses peintures où stars hollywoodiennes, personnalités politiques et personnages publicitaires sont convoqués pour dresser le paysage mental de l’Amérique qu’il soumet à la distorsion de son crayon. Dans un pays phagocyté par son industrie du divertissement, tout devient spectacle, de la consommation elle-même à la révolte, la peur, l’amour et la guerre. La création est alors une force régénératrice. Pour l’artiste lui-même, mais aussi pour toute personne qui a un jour décidé de prendre un pinceau, comme on peut le voir dans l’installation muséale Thrift Store Paintings. Dans cette collection en cours depuis les années 1970, Jim Shaw rassemble des peintures d’artistes amateurs achetées aux Puces. Paysages, natures mortes, nus, scènes surréalistes ou portraits de stars sont comme l’expression des pulsions subconscientes de ses semblables.

Jim shaw, the ties that bind
jusqu’au 19 mai, Muhka, Leuvenstraat 32, Anvers, Belgique.
Jim Shaw, Unknown Monster
galerie Praz-Delavallade, 5, rue des Haudriettes, Paris 3e, jusqu’au 13 avril.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°629 du 15 mars 2024, avec le titre suivant : Jim Shaw, celui qui décoiffe l’Amérique

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