Art contemporain

XXE SIÈCLE

Ipoustéguy de retour à Bar-le-Duc

Par Itzhak Goldberg · Le Journal des Arts

Le 14 octobre 2020 - 478 mots

La Meuse, son département natal, célèbre les 100 ans de la naissance de ce sculpteur de la figure humaine à travers une dizaine d’expositions.

Bar-le-Duc (Meuse). Très populaire dans les années 1980, la sculpture d’Ipoustéguy (1920-2006), malgré sa présence dans de nombreux espaces publics, se fait aujourd’hui discrète. Sa Meuse natale, où l’artiste est revenu vivre à la fin de sa vie, met en scène une manifestation, sous la responsabilité des historiennes de l’art Marie Lecasseur et Françoise Monnin, et de la fille de l’artiste Marie-Pierre Robert, permettant de redécouvrir non seulement ses travaux en trois dimensions, mais également sa peinture et ses dessins.

On peut commencer la visite avec la première statue monumentale réalisée par l’artiste et intitulée Christ (1950-1992), qui convient parfaitement à l’esprit du lieu, la chapelle Saint-Louis. Conçue en plâtre, fondue en bronze quarante ans plus tard, son corps ramené à quelques volumes stylisés, elle dégage quelque chose d’archaïque. À ses côtés, Cénotaphe (1957), une œuvre abstraite, est un « bloc » dense et puissant, traversé par des diagonales évoquant un post-cubisme tardif. Ipoustéguy se cherche, avant de trouver son style et une thématique dominante qui sera celle de la figure humaine. Rien d’étonnant à cela, ce sujet se trouvant depuis toujours au cœur de la pratique sculpturale. Cependant, dans la seconde partie du XXe siècle, ce sont plutôt les volumes abstraits ou les objets qui préoccupent les artistes. Si le corps n’est pas totalement absent, il a perdu de sa superbe ; soumis, fracturé, il subit. Dans le cas d’Ipoustéguy, la situation est différente. Selon les commissaires de l’exposition, « il choisit de se consacrer à la représentation de l’homme, dans toute la splendeur de son anatomie ». De fait, les nus, essentiellement des femmes en bronze parfois doré, sont comme des athlètes – admirés par l’artiste – prenant des postures acrobatiques. Certes, souvent une bizarrerie se glisse dans ces corps, comme un fragment de main qui manque, ou deux nus emboîtés sans que l’on puisse les distinguer l’un de l’autre. Ces mécanismes organiques parfaitement huilés peuvent séduire mais rarement émouvoir.

En revanche, les peintures et les dessins de l’artiste, dont une partie est accrochée au Musée Barrois, offrent une vraie surprise. Concentrés sur une période courte, 1965-1967, les grands formats ont peu en commun avec l’œuvre sculpté. Si Ipoustéguy ne relâche jamais son contrôle sur les volumes, les toiles sont traitées avec une spontanéité étonnante. Des morceaux de chair évanescents, des visages et des crânes sont suspendus sur des fonds comme recouverts par la brume. La mort, qui fait ici son apparition (Manolete [1967], La Mort du pape III [1967]), ne peut pas laisser le spectateur indifférent. Visiblement, ce mode d’expression que l’artiste n’a jamais cessé de pratiquer n’était pas là uniquement pour servir la ronde-bosse. Ce n’est pas un simple hasard si une très belle petite sculpture, à l’entrée du musée, s’appelle simplement Dessinant (1988).

Saison Ipoustéguy, centenaire 2020,
jusqu’au 18 décembre à la chapelle Saint-Louis, 3, rue François-de-Guise ; jusqu’au 15 novembre au Musée Barrois, 7, rue François-de-Guise, 55000 Bar-le-Duc ; et autres expositions dans la Meuse, lieux et dates divers, www.ipousteguy.com

Thématiques

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°553 du 16 octobre 2020, avec le titre suivant : Ipoustéguy de retour à Bar-le-Duc

Tous les articles dans Expositions

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque