Entre académisme et impressionnisme, la « troisième voie » de la peinture au XIXe siècle

Par Jean-Christophe Castelain · L'ŒIL

Le 29 janvier 2008 - 447 mots

Le mouvement des arts au cours du dernier tiers du xixe siècle est bien plus complexe que le schéma académie/impressionnisme habituellement mis en avant. Certes, les impressionnistes, nourris par les paysagistes de Barbizon et par Édouard Manet, ont été les premiers à remettre en cause la tradition académique. Pour la plupart issus de l’école des beaux-arts ou des enseignements privés périphériques, ils ont rompu avec le dessin soigné et sont sortis de leurs ateliers pour peindre la nature telle qu’ils la voyaient.

À la fin du XIXe siècle, le paysage domine les Salons
Pourtant, en 1874, lors de leur première exposition de groupe, le Salon, temple de la création contemporaine, ne présente pas que de la peinture d’histoire, religieuse ou mythologique, placée alors tout en haut de la hiérarchie des arts. La grande peinture ne représente que 10 % des deux mille cent toiles exposées.
Car si le faire académique s’impose aux artistes, l’iconographie s’en échappe. Les scènes de genre (32 %) et les portraits (20 %) ont détrôné les nudités grecques. Le paysage, majoritairement présent sur les cimaises du Salon (40 %), avait déjà pris quelques libertés avec le dogme, prenant le bon air dans la forêt de Fontainebleau.
Il est donc faux de penser que face à l’ancien atelier de Nadar, lieu de la première exposition impressionniste, le Salon n’est rempli que de christs en Croix ou de Troyens.Entre l’académisme
et l’impressionnisme Mais une seconde considération s’impose. S’il est indéniable que les impressionnistes ont libéré les autres rebelles du XIXe siècle que sont les symbolistes et les néo-impressionnistes, ils ont aussi fortement influencé un large pan de la création de l’époque, à commencer par les naturalistes et, plus généralement, tous les peintres de la vie moderne.
Les uns et les autres ont puisé leurs sujets dans le quotidien des « gens d’en bas » ou des bourgeois, à l’image de Jean Bérault ou de Norbert Goeneutte, et ont succombé aux charmes de la palette claire, des ombres colorées et de la lumière qui dissout les formes des impressionnistes. Ils en ont adopté la manière et les effets sans nécessairement se passionner outre mesure pour la recherche de l’instant, de l’impression liée à une lumière particulière, par exemple celle sur la neige, qui préoccupe Alfred Sisley.
Alfred Smith est caractéristique de cette génération de suiveurs qui constituent une forme de « troisième voie » entre la tradition académique, au demeurant en pleine reconsidération, et les audaces chromatiques des impressionnistes. Ses paysages urbains, destinés à une clientèle locale ravie d’accrocher sur ses murs une image de son cadre de vie, séduisent par leur effet d’esquisse. Suggérer plutôt que montrer : c’est tout le XXe siècle qui s’annonce.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°599 du 1 février 2008, avec le titre suivant : Entre académisme et impressionnisme, la « troisième voie » de la peinture au XIXe siècle

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