Des experts israéliens accusés d’avoir irrémédiablement endommagé l’ossuaire du supposé frère de Jésus

Par Alexandra Houël · lejournaldesarts.fr

Le 18 novembre 2013 - 622 mots

JERUSALEM (ISRAEL) [18.11.13] – L’inscription en araméen sur l’ossuaire supposé contenir les restes du frère de Jésus, dont l’authenticité a été débattue jusqu’en justice, aurait été endommagée au cours d’une expertise menée par l’Autorité des antiquités d’Israël. En raison de la destruction de sa patine, il ne serait plus possible de l’étudier pour déterminer si l’inscription est originale ou bien contrefaite.

Une nouvelle controverse est née autour de l’« ossuaire de Silwan », supposé contenir les restes du frère de Jésus, qui a été retourné à son propriétaire par la Cour Suprême d’Israël. L’inscription en araméen qui a fait sa notoriété, se traduisant par « Jacques fils de Joseph, frère de Jésus », aurait été endommagée à tel point que l’analyse de son authenticité ne serait matériellement plus possible, rapporte le journaliste israélien Matthew Kalman. Réalisé pour les besoins de l’enquête judiciaire, le moulage des signes gravés aurait détruit la « patine » - la fine couche créée par les altérations chimiques et physiques du temps qui recouvre la surface d’une roche, et qui permet en archéologie de vérifier l’authenticité d’une pièce.

Acheté par le collectionneur israélien Oded Golan en 1978, l’ossuaire daté du 1er siècle a été dévoilé au public pour la première fois en 2002 à Toronto, faisant à cette époque l’effet d’une bombe autant dans les milieux religieux, archéologiques que politiques. Accusé d’être un faussaire, le collectionneur a été poursuivi pénalement en 2003, et l’ossuaire confié à l’Autorité des antiquités d’Israël. Une expertise détaillée de l’inscription avait alors été demandée pour les besoins de l’enquête. Cette expertise n’ayant pas été assez concluante pour la justice, Oded Golan a été acquitté en mars 2012.

De récentes révélations publiées par Matthew Kalman, qui couvre l’affaire depuis ses débuts, compliquent quelque peu sa lecture. S’appuyant sur les propos du juge Farkash, il indique qu’Oded Golan aurait été acquitté notamment car l’expertise réalisée à la demande de la partie plaignante, un moulage qui ayant détruit la patine, aurait dès lors privé la défense d’une expertise contradictoire, et aurait renforcé par la même occasion le doute raisonnable quant à sa culpabilité.

Lors de cette expertise, le Laboratoire d’expertise légale d’Israël aurait appliqué sur l’inscription du silicone rouge, afin de créer un moule qui permettrait de vérifier la concordance de la mention « frère de Jésus », sur laquelle pesait le doute, avec la première partie de l’épitaphe. La procédure aurait laissé sur la roche des traces rouges, et arraché la patine. « Quand on utilise une coulée de silicone pour faire un moule, il faut séparer l’objet et le silicone d’une substance spéciale, car il s’accroche en séchant » avait déclaré à la cour Orna Cohen, membre de l’Autorité des antiquités d’Israël, confirmant l’altération de la pièce.

Selon Uzi Dahari, le directeur adjoint de l’Autorité des antiquités d’Israël, cette expertise a apporté des conclusions, qui n’ont toutefois pas convaincu les juges. Il a noté des différences d’épaisseur de profondeur de la gravure entre les deux parties de l’inscription, montrant qu’elles avaient été réalisées par deux burins différents. Les caractères des deux parties se différencieraient également par leur style. Il a également été avancé que la patine sur la deuxième partie contrastait par sa nature avec le reste.

« Je dois faire évaluer le dommage, et voir si il peut être restauré et s’il est possible de conduire d’autres analyses sur l’inscription qui nous permettrait de montrer son authenticité. Le gouvernement a dit que la seconde moitié de l’inscription était contrefaite – les mots « frère de Jésus » - et c’est à cet endroit là que le dommage a été causé » a déclaré Oded Golan. En attendant, le collectionneur a décidé d’exposer son ossuaire afin de lancer un débat public sur la question.

Légende photo

Jérusalem - Vieille ville : panorama du Mur occidental (Mur des Lamentations) surmonté du dôme du Rocher et de la mosquée al-Aqsa © Photo Assaf Shtilman - 2008 - Licence CC BY 3.0 

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque