Pologne - Société

Pologne, la lente dérive d’un gouvernement populiste

Par Itzhak Goldberg · Le Journal des Arts

Le 13 septembre 2021 - 544 mots

POLOGNE

Le parti conservateur (PiS) au pouvoir mène une politique de plus en plus anti-démocratique, condamnée par l’Union européenne.

Jarosław Kaczyński, co-fondateur du PiS, en 2018. © Rafal Zambrzycki, CC BY 2.0
Jarosław Kaczyński, co-fondateur du PiS, en 2018.

Politique. C’est peu dire que la lune du miel entre l’Europe et la Pologne est en train de s’achever. Tout pourtant avait bien commencé en 2003 quand les Polonais se prononcent, par référendum, à une très large majorité en faveur de l’adhésion à l’Union européenne (UE). L’adhésion sera officialisée le 1er mai 2004, date qui ne manque pas de piquant quand on se rappelle que ce jour était la fête principale pendant la période communiste. Le nouveau régime, approuvé par la Constitution, est semi-présidentiel ; élu au suffrage universel, le président a surtout un rôle d’arbitre. Le pouvoir réel est aux mains du Premier ministre et de son Conseil, dépendant du Parlement – la Diète et le Sénat. Les élections de 2005 avaient vu triompher les deux formations de droite : le parti libéral Plateforme civique (PO) et le parti conservateur Droit et Justice (PiS). Fondé en 2001 par les frères jumeaux Lech et Jaroslaw Kaczynski [voir ill.], le PiS prend le pouvoir entre 2005 et 2007, puis à partir de 2015, et marque profondément le paysage politique dans le pays, privilégiant les valeurs traditionnelles, nationales et catholiques.

Depuis le milieu des années 1990, la Pologne est parvenue à maintenir un taux de croissance élevé. Avec une main-d’œuvre de plus en plus qualifiée dont le coût horaire est parmi les plus faibles de l’UE, le pays attire effectivement les investissements étrangers. Entre 2014 et 2020, il reçoit la plus grosse dotation de l’UE, 77,6 milliards d’euros, sur six ans afin de soutenir certaines régions peu développées. Pourtant, un écart persiste entre l’est – plus pauvre – et l’ouest de la Pologne, un fossé entre Varsovie et le reste du pays, et des disparités croissantes entre les grandes agglomérations et les zones rurales. C’est ainsi que le PiS recrute ses électeurs dans les couches plus populaires en mettant en place un « État-providence à la polonaise » via de nouvelles allocations enfants, la gratuité des médicaments pour les plus de 75 ans ou encore l’abaissement de l’âge de la retraite à 65 ans pour les hommes et 60 ans pour les femmes.

La Pologne ne joue pas le jeu européen

Sur le plan international, depuis 2015, le pouvoir entretient des relations difficiles avec les institutions européennes. Avec le groupe Visegrád (formé en 1991 avec la Hongrie et la Tchécoslovaquie), il refuse notamment le quota de répartitions des migrants. L’homme fort, Jaroslaw Kaczynski, qui continue à peser sur toutes les décisions officielles, a déclaré que l’Union européenne devrait « profiter à la Pologne et non l’inverse ».

Le pays fait l’objet de quatre procédures d’infractions de la part de la Commission européenne, qui se montre très critique vis-à-vis des réformes en cours qui menacent l’indépendance du système judiciaire polonais. En effet, tout laisse à penser que la démocratie est en danger quand le régime vise à augmenter les pouvoirs de l’exécutif au détriment de ceux du législatif et judiciaire, sans oublier la mise au pas des médias, le durcissement de la loi anti-avortement ou le refus du mariage homosexuel. Et que dire du rejet scandaleux de toute responsabilité polonaise dans les crimes commis par les nazis sur les trois millions de juifs.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°572 du 3 septembre 2021, avec le titre suivant : La lente dérive d’un gouvernement populiste

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