Une étude éclairante sur la situation des 2,3 millions d’artistes américains

Par Nathalie Eggs · lejournaldesarts.fr

Le 3 octobre 2016 - 696 mots

NEW YORK (ETATS-UNIS) [03.10.16] – Une étude publiée par le National Endowment for the Arts montre l’évolution des conditions de travail des artistes aux Etats-Unis, très liée aux tendances économiques. Elle souligne notamment que les enseignements des écoles d’art ne sont pas adaptés à l’évolution de la société et encourage l’interdisciplinarité.

Le National Endowment for the Arts (NEA), agence fédérale américaine indépendante chargée de promouvoir les arts, a publié une étude sur l’évolution des conditions de vie et de travail des artistes aux Etats-Unis sur la dernière décennie. Réalisée en collaboration avec le Center for Cultural Innovation (CCI), l’étude intitulée « Creativity Connects: Trends and Conditions Affecting U.S. Artists » met à jour les données de l’étude réalisée par le Urban Institute en 2003 (Investing in Creativity). Car depuis, le contexte économique a changé et les besoins des artistes ont évolué.

En 2015, il y avait 2,3 millions d'artistes aux Etats-Unis, un « artiste » étant entendu au sens de l’étude comme toute personne tirant de son activité artistique l’essentiel de ses revenus. Malgré leur niveau de qualification – supérieur à la moyenne nationale – ces revenus restent faibles selon l’étude : le salaire médian des artistes est inférieur au salaire médian de l’ensemble de la population active (39 280 $). L’étude souligne la faible mixité sociale, autant en terme d’origine géographique et sociologique que de genre.

Ainsi, elle chiffre à 32 % le pourcentage d’artistes femme montrées à New York et Los Angeles en 2013. Et à moins de 25 % le pourcentage d’expositions personnelles consacrées à des artistes femme entre 2007 et 2014 dans les cinq plus importants musées du pays (le MoMA, le Whitney Museum, le Guggenheim à New York ainsi que le MOCA et le LACMA à Los Angeles). Des inégalités structurelles qui ne font que refléter les inégalités de la société selon l’étude.

Après avoir dressé l’état des lieux, l’étude s’attache à montrer que le nouveau cadre de travail des artistes est le corolaire également des évolutions de la société : les développements technologiques, la croissance de la démographie, la perception des artistes par le public sont autant de variantes qui modifient la façon de travailler et qui créent de nouvelles opportunités pour les artistes.

Or le NEA estime qu’en amont les établissements d’enseignements supérieurs d’art ne se sont pas adaptés à ces changements : les écoles d’art ne savent pas préparer les étudiants aux lieux de travail du XXI siècle et ne leur apprennent pas à appliquer leurs compétences créatives dans des contextes non conventionnels. Il en va de même pour les résidences d’artistes, les bourses et les prix, qui selon l’étude, ne répondent plus aux nouvelles façons de travailler des artistes. En aval, le NEA constate que ces nouvelles façons de travailler dépassent le strict cadre artistique : un nombre substantiel d’artistes travaillent de façon interdisciplinaire et transdisciplinaire, la plupart d’entre eux trouvant d’ailleurs du travail en tant qu’artiste mais dans des contextes non-artistique.

L’accent étant mis sur la transversalité, le NEA ne manque pas de montrer, dans un graphique interactif, comment les arts participent à l’écosystème créatif national (le secteur artistique n’étant pas le seul à faire appel à la créativité). Les initiatives prises entre des disciplines artistiques (arts visuels, danse, théâtre, musiques, etc.) et des disciplines non artistiques (science, santé, environnement, transport,…) sont ainsi référencées par Etat et par discipline. Par exemple, en connectant les domaines des arts visuels et de l’environnement, on découvre une liste de projets collaboratifs qui ont contribué à l’écosystème.

Loin de s’arrêter à un simple constat, l’étude consacre une troisième partie à des pistes pour améliorer les conditions des artistes. Il s’agit en premier lieu de mesurer les bénéfices apportés par les artistes et la création à la santé sociétale : calculer le poids économique de la culture c’est bien, mais savoir démontrer le bien être qu’elle procure c’est essentiel. Le NEA propose ensuite de se pencher sur la précarité de la rémunération des artistes et de se préoccuper des dettes qui les accablent (66 % des jeunes diplômés sortiraient de leurs études largement endettés) ; surtout, créer des formations en phase avec le XXIe siècle et actualiser les structures qui supportent les artistes.

Légendes photos

Logos du National Endowment for the Arts et du Center for Cultural Innovation - Source www.cciarts.org et www.arts.gov

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