Sous le signe du serpent à plumes

Par Laure Meyer · L'ŒIL

Le 1 octobre 1998 - 483 mots

Organisée par les musées d’art et d’histoire de Genève, et Gaston Burnand, passionné d’art précolombien, l’exposition du Musée Rath de Genève retrace plus de trois mille ans d’histoire. L’un des points forts en est l’art Mezcala du Guerrero. Parmi les quelque quatre cents œuvres exposées, L’Œil a choisi de commenter les pièces les plus évocatrices de ces civilisations disparues.

Apparues, disparues, selon un rythme cyclique, vagues d’une puissante houle dont chacune absorbe la précédente, les civilisations du Mexique se sont succédées durant plus de trois mille ans, jusqu’à 1521 après J.-C., date de l’arrivée des Espagnols. Les cultures des habitants du Guerrero, des Olmèques, Zapotèques, Mixtèques, Mayas, et finalement Aztèques, nées et anéanties au cours des siècles, avaient chacune leur spécificité tout en possédant de nombreux éléments communs pour l’architecture, les rites religieux et les connaissances intellectuelles.        
À l’époque néolithique déjà fleurit au Guerrero l’art puissant et hiératique de la culture Mezcala. Puis les Olmèques viennent occuper le devant de la scène. C’est seulement depuis le début de ce siècle que des recherches ont ressuscité cette imposante civilisation de la période préclassique, née du passage d’une vie paysanne à une société urbaine organisée. La sculpture sur pierre, admirablement maîtrisée, s’exprime dans des créations anthropomorphes, têtes monumentales du dieu jaguar, masques de jade, tandis qu’en céramique apparaissent les figurines “baby-face” à l’allure soufflée. Par ailleurs, le temps est structuré selon un double calendrier écrit. La période classique voit  la montée en puissance d’un état organisateur partout présent. Les réalisations les plus spectaculaires sont les sites de Teotihuacan, capitale politique et intellectuelle, et Monte Alban, citadelle sacrée.
Teotihuacan est dominée par une volonté de rationalité, organisée selon un plan rigoureux. La rue des morts aboutit à la Pyramide du soleil puis à celle de la Lune. Elle est bordée  d’autre part par la Citadelle contenant le temple de Quetzalcoatl, le serpent à plumes. La sculpture est à la hauteur de l’architecture. Les masques de pierre sont impersonnels, androgynes et sans âge. En céramique, des urnes anthropomorphes aux somptueuses coiffures, retrouvées dans les tombes, laissent deviner les cultes de divers dieux. Le style zapotèque se développe avec plénitude, avant d’être remplacé par les réalisations des Mixtèques, remarquables par leur connaissance des métaux et leur sens de l’histoire consigné dans les codex. Dans le Yucatan et les régions avoisinantes, la grandiose civilisation des Mayas, ces Grecs du Nouveau Monde, fleurit durant les périodes préclassique et classique. Astronomie, écriture hiéroglyphique, mesure du temps, tout tourne autour de la religion, mais les Mayas ont aussi inventé la fausse voûte et produit des céramiques de qualité, avant le déclin amorcé vers 800 après J.-C. La dernière vague est celle des Aztèques organisés autour d’une puissante monarchie guerrière qui a permis leurs vastes conquêtes. Mais l’arrivée des Espagnols, en 1521, met fin brutalement à la domination de ce jeune état en pleine expansion.

GENÈVE, Musée Rath, 8 octobre-24 janvier.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°500 du 1 octobre 1998, avec le titre suivant : Sous le signe du serpent à plumes

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