Un algorithme pour mesure la créativité dans les arts visuels

Par Julie Paulais · lejournaldesarts.fr

Le 17 juin 2015 - 613 mots

NEWARK (NEW JERSEY, ETATS-UNIS) [17.06.15] – Deux chercheurs en informatique ont développé un algorithme qui mesure la créativité dans les arts visuels, essentiellement les peintures occidentales. Selon l'algorithme, les 50 dernières années ont été un moment de créativité artistique aussi intense que la Renaissance.

Deux chercheurs en informatique ont développé un algorithme qui mesure la créativité dans les arts visuels, rapporte le site Hyperallergic. A la fin du mois, Ahmed Elgammal et Babak Saleh, respectivement professeur agrégé et candidat au doctorat dans le département d'informatique à l'Université Rutgers, présenteront leur article, intitulé « Quantifier la créativité dans les réseaux artistiques » à la Conférence internationale sur la créativité informatique. Ils y expliqueront les résultats de leur tentative de créer un algorithme informatique évaluant l'originalité et l'influence sur les autres artistes des oeuvres. Les résultats sont pour le moins curieux : Johannes Vermeer, Claude Monet, et Georgia O'Keeffe sont à un niveau assez élevé, tandis que Jean-Auguste-Dominique Ingres, Albrecht Dürer, et Camille Pissarro sont considérés comme peu créatifs.

Leur algorithme a été développé en utilisant la technologie de reconnaissance par ordinateur pour évaluer les caractéristiques visuelles des 1710 œuvres issues de la base de données Artchive et des 62 254 œuvres issues de WikiArt. Ils se sont concentrés spécifiquement sur les peintures, et même plus spécifiquement sur la peinture occidentale, tandis que les genres et les supports qui ne sont pas appropriés pour l'analyse sur critères visuels, comme la sculpture, le graffiti, la mosaïque,l'installation, la performance, les photos, etc., ont été éliminés de cette étude. En analysant les images de ces deux bases de données, l'algorithme a isolé un certain nombre de concepts visuels (jusqu’à 2 659) dans chaque œuvre sur la base de la présence d'objets représentés comme des croix, des chevaux, des visages, et ainsi de suite. L'algorithme, en d'autres termes, a été calibré pour l'art figuratif, ce qui explique le classement élevé de l'art abstrait du début du XXe siècle.

Ahmed Elgammal et Babak Saleh ont ainsi défini la notion de créativité qui a guidé leur recherche : « parmi les diverses définitions de la créativité, il semble qu'il y ait une convergence de deux principales conditions pour qu’un produit soit décrit comme créatif. Ce produit doit être nouveau, par rapport aux travaux antérieurs, et doit également être de valeur ou d'influence ». C’est-à-dire que les caractéristiques visuelles jugées originales dans l’œuvre analysée doivent réapparaître dans les œuvres ultérieures. Dans le cas de l’étude des œuvres issues d’Artchive, Bananes et Pamplemousses de Lichtenstein (1972), ou la Crucifixion de Goya (1780) sont en haut sur l'échelle de créativité de l'algorithme, tandis qu’en bas on retrouve Mantegna, Dürer et Ingres. Pour la base WikiArt, les œuvres les plus créatives sont par exemple L’Adoration des Mages de Léonard de Vinci (1480) et #121 de Fernando Calhau (1998).

« La tendance générale montre des pics de créativité autour de la fin XVe et du début du XVIe siècle, la fin du XIXe et le début du XXe siècles, et une augmentation significative dans la seconde moitié du XXe siècle », expliquent les deux chercheurs. Selon l'algorithme, les 50 dernières années ont été un moment de créativité artistique aussi intense que la Renaissance. L'algorithme a également déterminé que l'année 1700 a marqué la période la plus faiblement créative dans l'histoire de l'art occidental.

Les chercheurs, anticipant les réactions négatives des historiens de l’art, précisent que leur but n’est pas « de remplacer le rôle des historiens d'art ou des artistes pour juger de la créativité des œuvres d'art. Dans la majorité des cas, les résultats de l'algorithme mettent en avant des œuvres d'art que les historiens de l’art soulignent en effet comme innovantes et influentes ».

Légende photo

Capture d'écran de l'article d'Ahmed Elgammal et Babak Saleh : Quantifying Creativity in Art Networks © Photo Ahmed Elgammal, Babak Saleh - 2015 © Ahmed Elgammal et Babak Saleh

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