Biennale

La Biennale de Moscou s’éloigne du Kremlin

Par Emmanuel Grynszpan, correspondant à Moscou · lejournaldesarts.fr

Le 16 juin 2015 - 571 mots

MOSCOU / RUSSIE

MOSCOU (RUSSIE) [16.06.15] – Financée en partie par le gouvernement russe, la 6ème Biennale de Moscou qui se tiendra à l’automne en dehors du centre-ville, tente de fuir les sujets qui fâchent. Le directeur du Musée d’art contemporain d’Anvers en est le commissaire.

La 6ème biennale d’art contemporain de Moscou se déroulera du 22 septembre au 1er octobre 2015 sous le thème : « Comment vivre ensemble ? Œuvrer au centre-ville, au cœur de l’île eurasienne ». Cette manifestation publique, financée par le ministère de la Culture russe, avec le soutien de mécènes et de sociétés privées, a très tardivement révélé cette semaine les détails de son organisation.

En dehors de Bart de Baere (directeur du Musée d’art contemporain d’Anvers), désigné en novembre dernier, le conseil des experts de la manifestation a choisi deux autres commissaires : Defne Ayas (directrice du centre d’art contemporain Witte de With de Rotterdam) et Nicolaus Schafhausen (directeur de la Kunsthalle de Vienne). Le directeur de la biennale moscovite, Iossif Backstein, fondateur de la manifestation, reste le même. 70 artistes participeront à cette édition, dont certains noms sont déjà connus : Flaka Haliti, Rana Hamadeh, le français Fabrice Hybert, Suchan Kinoshita, Hanne Lippard, Ho Tzu Nyen, Amalia Ulman, Anton Vidokle, Peter Wächtler et Qui Zhijie.

Probablement préoccupée par sa propre survie, qui ne tient qu’à un fil, la biennale pose des questions et ne veut pas apporter de réponses. Lors de la conférence de presse présentant le projet, ses organisateurs ont déroulé un grand nombre d’interrogations : A quoi peut mener l’art, comment vivre ensemble, quels sont les principes fondamentaux d’une vie meilleure, que sera Moscou dans le futur, et même des questions existentielles tout droit sorties de Hamlet : qui sommes-nous (individus, ville, nation, empire, espace), etc.

La biennale se déroulera en deux temps. 10 journées de biennale proprement dite, suivies d’un mois d’exposition documentant l’évènement. Le cœur de la biennale sera un « Work in progress », une sorte de laboratoire de création évoluant sous les yeux des visiteurs jusqu’à fleurir en une exposition spectaculaire. Cette « pensée en mouvement », selon l’expression des organisateurs, doit rendre visible tous le processus de création.

Une quarantaine de lieux accueilleront la manifestation. Son coeur sera situé au « VDNKh », (acronyme pour Parc Panrusse des Expositions), situé à 8 km au Nord du Kremlin. VDNKh est connu des Russes comme un parc d’exposition permanent poussiéreux, à l’atmosphère encore très soviétique à cause de l’architecture néo-classique stalinienne des pavillons. La Biennale occupera trois pavillons, dont celui de l’énergie atomique. Hasard ou pas, l’entreprise d’Etat Rosatom manifeste depuis peu un intérêt remarqué pour l’art contemporain. Des hauts lieux artistiques moscovites hébergeront des projets de commissaires indépendants : la Galerie Tretiakov, le Garage et le Musée Juif.

La biennale garde le soutien du ministère de la Culture en dépit des commentaires très négatifs du ministre Medinsky après sa visite de la 5ème biennale en 2013. Pourtant les commissaires avaient déjà adopté un profil bas, taisant le fait que l’argent public avait été débloqué tardivement. Ils avaient aussi pris grand soin de ne pas toucher aux thèmes tabous : politique, religion, qui entre temps, ont considérablement enflés. C’est sans doute pour se faire remarquer le moins possible des autorités que les organisateurs ont choisi cette année de s’éloigner géographiquement du pouvoir. Depuis sa création il y a douze ans, la biennale se déroulait quasiment aux pieds des murs du Kremlin.

Légende photo

Le Kremlin et la Moskova, avec la tour Vodovzodnaïa au centre © Photo Ikar.us - 2004 - Licence CC BY-SA 3.0

Thématiques

Tous les articles dans Création

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque