Une installation contestée par des associations de musulmans va réintégrer l’exposition à Clichy-la-Garenne

Par Christine Coste · lejournaldesarts.fr

Le 28 janvier 2015 - 623 mots

CLICHY-LA-GARENNE (HAUTS-DE-SEINE) [28.01.15] - L’installation de Zoulikha Bouabdellah, retirée il y a deux jours d’une exposition en cours au Pavillon Vendôme de Clichy-la-Garenne après des pressions d’une fédération d’associations de musulmans, reviendra finalement sur les lieux. Retour sur les faits.

Vendredi 23 janvier, à la veille du vernissage de « Femina ou la réinterprétation des modèles », actuellement en cours au Pavillon Vendôme à Clichy-la-Garenne (Hauts-de-Seine), l’artiste Zoulikha Bouabdellah et les commissaires de l’exposition, Charlotte Boudon et Christine Ollier de la galerie Les filles du Calvaire, ont décidé de ne pas montrer l’installation Silence face aux mises en garde émanant de représentants de la Fédération des associations musulmanes de Clichy. La vidéo Dansons de l’artiste s’est ainsi substituée à une installation d’escarpins sur des tapis de prière.

Le lendemain du vernissage, Orlan diffusait via son site Internet une lettre ouverte sur la censure de l’œuvre de Zoulikha Bouabdellah et sur l’attitude de la mairie de Clichy, le pavillon Vendôme étant un établissement municipal. « La mairie a cédé à ces pressions et s’est désolidarisée de l’exposition si l’œuvre devait être présentée » écrit-elle en demandant que son œuvre à elle soit décrochée.

Mardi 27 janvier, c’était au tour des deux commissaires de donner leur version des événements et sur leurs conséquences via une lettre cosignée par des artistes. Plusieurs artistes et prêteurs ont demandé à retirer leurs œuvres par solidarité avec Zoulikha Bouabdellah. « A ce jour nous demandons une prise de position claire du maire de la ville Gilles Catoire sur les propositions que nous faisons concernant la suite à donner à l’exposition devant cette atteinte rampante à la liberté d’expression : soit assumer la présentation de la pièce Silence, soit décider de la fermeture de l’exposition privant de son accès les Clichois et l’ensemble du public. »

Interpellé, Gilles Catoire a rejeté, quelque peu agacé, toutes ces accusations de censure. « Ce n’est pas à la mairie que sont décidés les choix des artistes ou de leurs œuvres. Je n’ai jamais demandé à qui que ce soit de déprogrammer cette installation », déclare-t-il. « Le maire adjoint à la culture Nicolas Monquaut m’a tenu informé que l’une des artistes de l’exposition « Femina » avait décidé de remplacer l’une de ses œuvres par une autre. Je ne vois donc pas où serait le problème. »

Nicolas Monquaut précise de son côté « qu’à titre personnel et en tant qu’adjoint à la culture je souhaitais que cette œuvre soit maintenue et que l’exposition se réalise dans sa complète intégrité. Dès la réception du courrier de la fédération que j’ai communiqué à l’ensemble de l’équipe municipale de la majorité, j’ai entamé une correspondance avec ses membres que j’ai rencontrés vendredi 23 janvier avec les services culturels de la ville et Guillaume Lasserre (NDLR directeur du Pavillon Vendôme, centre d’art contemporain de Clichy programmateur de l’exposition) ». Et Nicolas Monquaut de rajouter que contrairement à ce que dit Orlan la mairie « n’a jamais cédé aux pressions, ni ne s’est désolidarisée de l’exposition ».

Pour justifier l’autocensure des deux commissaires de « Femina ou la réinterprétation des modèles », Stéphane Magnan, directeur de la galerie Les Filles du Calvaire, rappelle que « le maire n’a garanti à aucun moment la liberté d’expression ». Christine Ollier et Charlotte Boudon déplorent de leur côté qu’elles n’ont jamais réussi à joindre Gilles Catoire durant le montage de l’exposition. « Nous ne pouvions prendre la responsabilité qu’il arrive quoi que soit », disent-elles.

Stéphane Magnan regrette qu’il « ait fallu déclencher tout cela pour que le maire ouvre sa porte et garantisse la sécurité de l’exposition ». Exposition qui devrait, dès la semaine prochaine, avoir réintégré l’installation Silence après le feu vert donné mardi soir par Zoulikha Bouabdellah.

Légende photo

Zoulikha Bouabdellah, Silence, 2014, Pavillon Vendôme de Clichy-la-Garenne - © Photo Alexandre Mayeur / Galerie Anne de Villepoix.

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