La ministre de la Culture brésilienne débarquée en pleine foire de Rio

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Le 13 septembre 2012 - 499 mots

RIO DE JANEIRO (BRÉSIL) [13.09.12] - Après deux ans de mandat, la ministre de la Culture du Brésil, Ana de Hollanda, laisse sa place à Marta Suplicy. Eclairage sur un changement orchestré par la Présidence, pour qui l’argument politicien semble avoir largement prévalu sur les autres.

On imagine l’agitation si pour l’ouverture de la FIAC, notre ministre de la Culture quittait son poste. Dans les allées de la foire de Rio, qui a débuté mercredi 13 septembre, c’est à peine si l’on croise la une du grand quotidien populaire O Globo affichant le visage de la nouvelle ministre, Marta Suplicy. Pourtant, la foire est placée sous le haut patronage du ministère. C’est là tout le paradoxe d’un pays qui peine à proposer une « politique culturelle » cohérente, pourtant réclamée par un secteur ultra dynamique.

Ana de Hollanda peut, comme Gilberto Gil en 2008, retourner à sa carrière musicale. A la différence qu’elle n’a pas choisi le moment, poussée dehors par la présidente Dilma Roussef qui clôt de manière opportuniste une mandature de désamour. En effet, en s’opposant dès son arrivée aux professionnels qui souhaitaient rendre plus flexible la loi sur les droits d’auteur (votée par Gilberto Gil sous le premier mandat de Lula), Ana de Hollanda s’est isolée. Elle oblige la présidente à payer le prix politique de sa confiance maintenue.

Cet été, elle envoie à une consoeur une lettre dans laquelle elle se plaint du budget de son ministère, évoque « l’absence de marge de manœuvre », voire « l’impossibilité de maintenir un ministère de la Culture utile » dans ces conditions. La presse publie la lettre, le gouvernement tolère mal le désaveu.

D’une pierre deux coups

Cette maladresse arrive à point nommé pour Dilma Roussef, qui doit trouver à Marta Sulpicy, vice-présidente du Sénat, une compensation : cette dernière avait dû s’effacer contre son gré pour les municipales à Sao Paulo. La presse conclut : silence soutien = ministère...

La victime de ce feuilleton politique, comme le Brésil les adore, est avant tout la politique culturelle : Ana de Hollanda avait le mérite de porter une vision, et d’aller au bout de ses idées. Corollaire fréquent de l’indépendance, elle a été critiquée pour sa mauvaise gestion et son manque de communication. C’est l’opposé qui attend désormais les professionnels : gestionnaire expérimentée, Marta Sulpicy est une politicienne rompue aux luttes de pouvoir. Ministre du Tourisme sous Lula et maintes fois élue locale, elle a évoqué avec un naturel troublant sa « surprise » d’être nommée à ce poste. Elle se plongera « rapidement dans les dossiers pour découvrir [sa] mission ».

Si la majeure partie des réactions dans la presse semble adouber ce changement, quelques voix critiquent son absence de compétence pour un ministère redevenu « consolation ou gratification », selon les mots de l’artiste Ernesto Neto. L’agenda est pourtant dense : fiscalité de l’art et valorisation du patrimoine sont des dossiers prioritaires, à l’heure où le Brésil émerge enfin comme une puissance artistique sur la scène mondiale.

Légende photo

Ana de Hollanda, ministre de la Culture brésilienne (2010-2012) - © Photo Wilson Dias / Abr - 2011 - Licence CC BY 3.0

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