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Le Centre Pompidou mise sur un tandem

Le gouvernement invoque un tandem avec le directeur du Mnam pour justifier l’arrivée de Serge Lasvignes à la présidence du Centre

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 10 mars 2015 - 642 mots

PARIS

Le remplacement d’Alain Seban à la tête du Centre Pompidou par Serge Lasvignes, un haut fonctionnaire sans expérience dans le secteur culturel, fait débat. Le gouvernement argue qu’en raison de la présence d’un conservateur à la direction du Musée national d’art moderne, un profil d’administrateur convient au pilotage du Centre.

PARIS - Plusieurs membres du gouvernement sont montés au créneau pour défendre la nomination de Serge Lasvignes à la présidence du Centre Pompidou en remplacement d’Alain Seban. La désignation de cette personnalité totalement inconnue du monde culturel – lui-même admet dans un entretien au Figaro « ne pas avoir de légitimité artistique » –, a surpris tout le monde. Le seul lien qui rattache, de loin, Serge Lasvignes à la culture, est d’avoir été professeur de lettres dans un lycée du Loiret pendant sept ans. Par la suite, ce Toulousain âgé aujourd’hui de 61 ans a décidé de changer de vie, a réussi à entrer à l’ENA (École nationale d’administration), ce qui n’est pas une mince affaire, et a déroulé à partir de 1991 une carrière dans la haute fonction publique qui l’a mené jusqu’au secrétariat général du gouvernement, poste qu’il occupait depuis 2006. « Ce sont les qualités de ce très haut fonctionnaire qui ont été jugées tout à fait compatibles avec les enjeux de l’avenir du Centre Georges Pompidou », a expliqué Stéphane Le Foll, porte-parole du gouvernement. « Il a l’une des plus belles expériences dans le domaine administratif », ajoutait quelque temps plus tard Fleur Pellerin, la ministre de la Culture, sans doute peu consultée dans cette nomination et contrainte de faire l’éloge alambiqué du futur nouveau président. Selon le quotidien Les Échos, son arrivée au Centre Pompidou est la conséquence d’un jeu de chaises musicales dans les hautes sphères de l’État.

Retour au Palais-Royal
Pour l’instant, le grand perdant de ce tourniquet est Alain Seban, qui va rejoindre son corps d’origine, le Conseil d’État, après avoir occupé la présidence du Centre pendant huit ans. Le Conseil d’État ce n’est évidemment pas rien, mais quand on a géré un établissement qui compte plus de 1 000 salariés, avec un budget de près de 120 millions d’euros, et que l’on est reçu comme un ambassadeur dans le monde entier, retrouver un petit bureau, même au Palais-Royal, est moins enthousiasmant. Le départ de celui qui était pourtant candidat à un troisième mandat est d’autant plus surprenant que son bilan est plutôt positif. Durant son mandat, le Musée national d’art moderne (Mnam) a occupé quatre fois la première place du Palmarès des musées du Journal des Arts qui comporte plus de 60 critères. Si Alain Seban n’est pas à l’origine du Centre Pompidou-Metz, il a su le mettre sur les rails, compensant le demi-échec du « Centre Pompidou mobile ». L’ouverture dans quelques jours d’une antenne du Centre à Málaga (Espagne) devrait enfin donner à l’institution sa dimension internationale. Mais à l’heure des choix, l’étiquetage politique de l’homme à droite – bien qu’il ne l’ait jamais mis en avant – et sa personnalité parfois tempétueuse ont fait pencher la balance au profit d’un haut fonctionnaire à recaser.

La ligne de défense du gouvernement est habile mais risquée. Il explique que le Centre est un ensemble complexe (une bibliothèque, des salles de cinéma, un institut de recherche) dans lequel le Mnam n’est qu’une composante, c’est pourquoi un profil d’administrateur est suffisant dès lors que le directeur du Mnam « fait le job ». Cette argumentation a reçu le soutien de Frédéric Mitterrand, l’ancien ministre de la Culture (lire page 2). Le premier chantier du nouveau président consistera à finaliser le nouveau contrat de performance qui est annoncé pour 2015 et dont on espère qu’il sera rendu public afin de pouvoir en discuter le bien-fondé et en suivre l’avancement. C’est à cette aune que l’on pourra réellement évaluer la pertinence de cette nomination.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°431 du 13 mars 2015, avec le titre suivant : Le Centre Pompidou mise sur un tandem

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