Histoire

Musée

La Résistance en capitale

Par Daphné Bétard · Le Journal des Arts

Le 11 décembre 2012 - 693 mots

Repensé et rénové, le Centre d’histoire de la Résistance et de la déportation de Lyon a rouvert ses portes. Les fac-similés ont été remplacés par les originaux.

LYON - Déclarée « capitale de la Résistance » par le général de Gaulle en septembre 1944, Lyon inaugurait, près de trente années plus tard, en 1992, son Centre d’histoire de la Résistance et de la déportation, le « CHRD ». S’appuyant sur la collection rassemblée par une association d’anciens Résistants et déportés, et présentée depuis 1965 dans une dépendance du Muséum municipal, le musée était installé dans l’ancienne école du service de santé militaire qui fut, en 1943, le siège de la Gestapo dirigé par Klaus Barbie.

Fermé pendant un an, ce lieu d’histoire et de mémoire a bénéficié d’une grande rénovation à l’occasion de son vingtième anniversaire. L’ouverture de douze fenêtres, jadis obstruées, a fait entrer la lumière dans un parcours permanent plus fluide, jalonné de petits espaces semi-circulaires en bois où sont développées des thématiques. Le grand changement réside dans la présentation non plus de fac-similés, mais de pièces originales : des courriers manuscrits jetés depuis un train en partance pour l’Allemagne, un télégramme informant de rafles à venir, du matériel de transmission de la Section des atterrissages et des parachutages, des tracts, le fonds de la Fédération des femmes de prisonniers de guerre, les dessins de Ravensbrück par Nina Jirsikowa, les photographies du maquis du haut Beaujolais…

Une centaine de pièces, sur les cinq mille que compte la collection, sont ainsi exposées. « Tous les objets désormais visibles sont inédits. Nous avons fait le choix de montrer des originaux. Cela nous contraint à renouveler les pièces tous les dix mois, mais le processus permettra de présenter l’ensemble des collections », précise la directrice des lieux, Isabelle Doré-Rivé. Certaines pièces uniques risquent néanmoins de poser problème, à l’instar du registre d’écrou de la prison de Montluc (Lyon) signalant la présence en ses murs de Jacques Martel, pseudonyme de Jean Moulin – un document très fragile, sans équivalent. Autre point fort du parcours : une trentaine de bornes audiovisuelles diffusent les témoignages d’anciens Résistants et déportés. Grâce au travail de mémoire entrepris dans les années 1990, le CHRD a recensé près de 700 témoignages audiovisuels. « Il était indispensable de valoriser cet ensemble. La dernière génération de Résistants et témoins de cette époque est en train de nous quitter », rappelle Isabelle Doré-Rivé.

Dons de particuliers
Les équipes de la conservation ont également choisi de mettre en exergue le fonds photographique du musée, et particulièrement le travail de trois photographes : André Gamet, Charles Bobenrieth et Émile Rougé. L’intégralité du fonds Émile-Rougé, soit quelque 300 clichés sur plaque de verre réalisés de 1939 à 1945, a été déposée par la famille en 2011, après l’exposition que le CHRD lui avait consacrée. Tous les ans, de nouvelles pièces entrent ainsi au musée sous la forme de dons de particuliers sensibles au travail de l’institution.

Les nouveaux espaces ont été conçus comme un va-et-vient entre la vie lyonnaise et l’histoire nationale, révélant aux visiteurs les principales figures et les différents mouvements de la Résistance, la lutte armée, les lieux de répression, le quotidien dans les camps, la persécution des Juifs dans la région lyonnaise. Souvenir de l’ancienne scénographie, la reconstitution de l’intérieur d’une maison de Résistants dans les années 1940, avec son imprimerie clandestine en sous-sol, a été conservée car très appréciée des scolaires. En conclusion : un petit film sur la Libération et la célèbre phrase attribuée à Éluard, « Si l’écho de leurs voix faiblit, nous périrons. » Les espaces d’expositions temporaires demeurent au sous-sol ; le deuxième étage abrite le centre de documentation tandis qu’un espace spécifique diffuse des extraits du procès de Klaus Barbie, jugé en 1987 coupable de crimes contre l’humanité par la Cour d’assises du Rhône. Un épisode qui fut décisif pour la création de ce lieu primordial pour la mémoire collective.

Centre d’histoire de la résistance et de la déportation, 14 avenue Berthelot, 69007 Lyon, tél. 04 78 72 23 11, www.chrd.lyon.fr, du mercredi au dimanche, 10h-18h.

Catalogue, Une ville dans la guerre, éd. Fage, 192 p., 19,80 €.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°381 du 14 décembre 2012, avec le titre suivant : La Résistance en capitale

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