Politique

Des changements à la marge pour la « Mission patrimoine » 2019

Par Margot Boutges · Le Journal des Arts

Le 19 mars 2019 - 797 mots

FRANCE

Si la première édition des jeux de grattage a été un succès, elle a suscité plusieurs critiques. Certaines ont été prises en compte dans l’organisation de la prochaine édition qui sera lancée en juillet autour de 18 édifices.

La glacière municipale d'Étel dans le Morbihan fait partie des dix huis sites retenus © Photo OuiFlash pour la Fondation du Patrimoine
La glacière municipale d'Étel dans le Morbihan fait partie des dix huis sites retenus.
© Photo OuiFlash pour la Fondation du Patrimoine

France. Lancés en 2018 par l’animateur Stéphane Bern – auquel le président de la République a confié la tâche de trouver des moyens de financements « innovants » pour restaurer le patrimoine bâti en péril –, les jeux de grattage « Mission patrimoine » seront reconduits en 2019. Dans une « mission flash » qui a effectué en janvier une première évaluation de ce dispositif, les députés Sophie Mette (Modem) et Michel Larive (La France insoumise), ont jugé cette initiative « à plusieurs égards [comme] un succès » et « structurante pour l’avenir ». Ces tickets de grattage et ces grilles de Loto ont en effet rencontré un vif intérêt populaire et médiatique et un gros succès commercial entre septembre 2018 et janvier 2019. Chargée de redistribuer une partie des gains à 269 édifices nécessiteux, la Fondation du patrimoine a pu récolter 22 millions d’euros. C’est certes une goutte d’eau dans l’océan des besoins de ces bâtiments. Mais ces jeux ont permis de lancer des travaux, d’inciter des collectivités hésitantes à compléter des dotations et de susciter du mécénat. Aussi, et afin de maintenir cet élan, de nouveaux jeux seront mis en vente chez les buralistes à partir de juillet.

Des monuments emblématiques souvent ni classés ni inscrits

La première édition des jeux « Mission patrimoine » avait donnné lieu à des critiques. Certaines ont été prises en compte dans l’organisation du deuxième round. Des acteurs patrimoniaux, auditionnés dans le cadre de la mission parlementaire, ont déploré que les édifices choisis conjointement par la Fondation du patrimoine, les services du ministère de la Culture et Stéphane Bern comme bénéficiaires des jeux soient en grande majorité des monuments protégés au titre des monuments historiques, dont les travaux, par conséquent, peuvent recevoir des subventions de l’État.

En 2019, un rééquilibrage a été effectué. Parmi les 18 édifices emblématiques – de type et d’implantation géographique variées – qui seront les premiers récompensés par les jeux, 7 ne sont ni classés ni inscrits (contre 2 en 2018). Ainsi d’une glacière du Morbihan, à Etel [voir ill.], où était fabriquée de la glace pour conserver les poissons : des travaux doivent permettre de réhabiliter le bâtiment en lieu culturel. Ou d’un moulin du XIXe siècle de l’Aube dévasté par les fuites d’eau et les insectes. Ou encore du château-atelier en Seine-et-Marne de l’artiste Rosa Bonheur qui a besoin en urgence d’une réfaction de ses toitures.

Alors qu’en 2018 ce sont surtout des bâtiments gérés par des collectivités qui avaient été mis sur la liste des édifices prioritaires, la sélection de 2019 réserve une large place aux lieux appartenant à des particuliers, telle une abbaye normande que ses propriétaires veulent ouvrir plus largement au public et dont le chœur menace de s’écrouler.

L’année dernière, le choix du château de Bussy-Rabutin (Côte-d’Or) parmi les premiers bénéficiaires des jeux avait été critiqué, car celui-ci n’est pas exactement en péril et il est placé sous la responsabilité du Centre des monuments nationaux, lequel ne fait pas partie des gestionnaires les plus démunis. Cette année, aucun site de cet opérateur de l’État ne fait partie des monuments emblématiques.

Au printemps, 100 sites disséminés sur l’ensemble du territoire métropolitain et ultramarin seront choisis afin d’être les seconds destinataires des gains. En 2018, la sélection trop large – et donc moins avantageuse pour chaque lieu – avait fait l’objet de débats.

Un nouveau ticket

Mais le principal reproche formulé à l’encontre de la première édition des jeux « Mission patrimoine » concerne la faible proportion des recettes reversées au sauvetage des monuments. Le ticket de grattage s’est révélé en effet très attractif pour les joueurs (qui ont eu une chance plus élevée que d’ordinaire de remporter la mise), mais assez peu philanthropique, car seuls 10 % de son prix d’achat record (15 euros) ont été concédés à la Fondation du patrimoine. La saison 2019 en tiendra-t-elle compte ? Oui et non. La Française des Jeux (FDJ) a annoncé que ces mêmes tickets seront mis en vente sans que le taux de reversement aux joueurs (et à la FDJ) ne soit modifié. Mais, suivant les recommandations de la mission parlementaire, elle va également commercialiser un ticket à 3 euros, où le pourcentage revenant au patrimoine sera un peu plus élevé (16 %).

Concernant les taxes, 2019 ne changera pas la donne et Stéphane Bern n’a pas fini de grincer des dents. Pour apaiser les plaintes de « Monsieur patrimoine » – furieux que l’État n’exonère pas ce jeu en faveur du patrimoine de différents prélèvements –, le ministère de la Culture avait dégelé en décembre 21 millions d’euros de crédits dévolus aux monuments historiques. Cette « astuce » sera renouvelée cette année.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°519 du 15 mars 2019, avec le titre suivant : Des changements à la marge pour la « Mission patrimoine » 2019

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