Dégâts des eaux

Dresde doit repenser ses priorités

Le Journal des Arts

Le 8 novembre 2002 - 540 mots

Bien que sans conséquences graves sur les collections, les crues du mois d’août ont sinistré de nombreux bâtiments de la ville de Dresde. La ville, qui finissait à peine de ressusciter un patrimoine ruiné par la Seconde Guerre mondiale, doit repenser ses priorités.

DRESDE - Lorsque la crue de l’Elbe s’est annoncée, rien ne laissait prévoir l’ampleur et la vitesse de propagation des inondations. Martin Roth, directeur général des collections nationales de Dresde, était à Berlin où il assistait à une réunion lorsque les événements se sont produits. Après être resté en contact avec Dresde pendant toute la nuit du 13 août, il a donné l’ordre d’évacuer les sous-sols à six heures du matin, puis a fait la route en voiture depuis Berlin pour rejoindre son équipe. “Nous n’avions même pas de plan d’évacuation, a-t-il déclaré. L’armée et la police étaient tellement occupées ailleurs que nous avons dû nous en remettre presque entièrement au personnel du musée.” Le 16 août, le niveau de l’Elbe a dépassé de plus d’un mètre celui enregistré lors de la dernière grande crue de 1849, submergeant le musée une deuxième fois. Miraculeusement, aucune œuvre d’art n’a été perdue, mais les dégâts engendrés aux bâtiments du musée – dont le palais Pillnitz, situé hors de la ville –, se chiffrent au minimum à 20 millions d’euros.

Le coup est d’autant plus rude que Dresde se bat encore pour mener à son terme la reconstruction de son centre historique détruit par les bombardements des Alliés en 1945. Outre le Frauenkirche, un autre grand projet de restauration reste inachevé : la résidence royale. Elle devait accueillir en 2006 le superbe Kunstkammer et la collection de bijoux d’Auguste le Fort, qui rejoindront ainsi la Voûte verte, leur lieu d’origine. Mais ces projets de restauration devront peut-être attendre. L’argent qui leur a été alloué va en effet devoir être utilisé dans les travaux de réparation des lieux endommagés par les inondations. “Les propositions d’aide ont afflué des musées du monde entier. Le premier à nous avoir contactés est la National Gallery de Dublin, explique Martin Roth. C’est un élan merveilleux, mais, sachant qu’aucun de nos objets n’a été endommagé, nous avons dans l’immédiat plus besoin d’argent que de l’intervention des experts.”

Parmi les bâtiments les plus touchés figurent la galerie des Maîtres anciens dans l’aile est du palais Zwinger et l’Albertinum. En sept heures, 4 000 tableaux et 16 000 objets ont été évacués des réserves des sous-sols avant que l’eau n’atteigne le plafond. Les tableaux sont conservés dans les salles des étages supérieurs. Bien qu’il s’agisse, pour la plupart, de pièces non exposées, la moitié d’entre elles sont des œuvres de premier ordre. On dénombre ainsi dans ces “sauvées des eaux” une trentaine de Cranach. Quant au système de climatisation et aux installations techniques des bâtiments, ils ont été détruits. La priorité à présent est de trouver de nouveaux lieux de conservation pour la collection. Martin Roth affirme que les tableaux ne retourneront pas dans les sous-sols, mais il s’agit clairement ici d’une question litigieuse, les sous-sols ayant été modernisés très récemment. “Il y a peu de chance pour que de telles inondations se reproduisent avant cinq cents ans, a-t-il déclaré. D’un autre côté, cela pourrait recommencer en novembre.”

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°158 du 8 novembre 2002, avec le titre suivant : Dégâts des eaux

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