Russie - Ukraine

Éditorial

La Culture en temps de guerre

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 2 mars 2022 - 354 mots

Ukraine. Que peut la Culture quand tonnent les canons ? Le verbe et l’image sont démunis devant la force brutale qui n’hésite pas à envahir un pays et à bombarder ses populations civiles.

Les acteurs culturels prennent brusquement conscience de la vanité de leur monde face à la violence séculaire des hommes qu’on avait fini par virtualiser. D’abord parler, exprimer sa sympathie à l’égard de ses homologues ukrainiens. Apporter sa voix au concert de protestations impressionnant et inattendu de la part d’un camp occidental que l’on croyait incapable de se coordonner pour sanctionner la Russie. Et puis agir à son niveau, accueillir les réfugiés artistes ukrainiens et plus tard, en fonction de l’évolution de la situation militaire sur le terrain, participer à l’entraide des populations.

Mais il faut bien admettre que cela est dérisoire en regard du calvaire des Ukrainiens. La Culture doit se contenter de l’après. L’après, c’est déconstruire le narratif de la propagande de Vladimir Poutine s’agissant de l’histoire de l’Ukraine qui serait depuis toujours une province russe. Démonter aussi le récit des motifs de l’invasion qu’il a tenté d’imposer au monde, dépeignant un régime nazi, drogué qui persécuterait les populations d’origine russe.

L’après, c’est aussi ne pas créer d’antagonisme avec la société civile russe en coupant les ponts avec elle. De partout en Russie remontent des signes de désolidarisation d’artistes, intellectuels, scientifiques, acteurs de la vie culturelle qui rejettent cette guerre. Combien sont-ils ? On l’ignore car le régime autoritaire de Poutine s’emploie depuis plusieurs années à museler toute opinion contraire. Ce ne sont pas eux qui vont renverser l’autocrate. Mais, en influençant les oligarques qui l’entourent, par les sanctions économiques et les restrictions de déplacement de ces milliardaires, ces derniers pourraient saper l’autorité de Poutine.

L’après, c’est enfin convaincre les opinions publiques occidentales que les sanctions contre la Russie ont un coût : une envolée des prix de l’énergie, voire des difficultés d’approvisionnement si Poutine coupe ses gazoducs. Et ce ne sera pas la partie la plus facile car, dans nos démocraties, l’opinion publique peut oublier ses idéaux si son confort est trop longtemps mis à mal. Souvenons-nous de Sarajevo.

Thématiques

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°584 du 4 mars 2022, avec le titre suivant : La Culture en temps de guerre

Tous les articles dans Opinion

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque