La culture du paradoxe

L'ŒIL

Le 1 septembre 2002 - 469 mots

C’est confirmé, « Images 2004 » n’aura pas lieu. En effet, l’exposition internationale dédiée à l’image et qui devait se tenir dans 2 ans en Seine Saint-Denis a été annulée, en pleine période estivale, sur décision du conseil des ministres. Et même si le montage de l’événement était, semble-t-il, un peu bancal, était-il judicieux, après une première annulation en 1989 d’un événement similaire, de rejeter à nouveau en bloc cette seconde initiative déjà bien lancée ? N’aurait-il pas été préferable de repousser de quelques mois l’ouverture des festivités, comme les Suisses l’ont fait avec « Expo 02 », pour s’assurer d’un plein succès de l’exposition ? Car demain, quels seront les a priori du Bureau International des Expositions ou de tout organisme international face à une nouvelle candidature de la France pour la mise en place d’une manifestation de ce genre ?
Quoi que l’on en pense, cette décision semble bien refléter les remises en cause actuelles en matière de politique culturelle. Certes, le gouvernement, à l’écoute des Français, s’est fixé des priorités qui nécessitent grand besoin d’argent. De fait, il devient plus facile de remettre en question les projets de la Maison du Cinéma à Bercy, dans le bâtiment de Frank Gehry où l’on a pourtant déjà engagé plus d’un million d’Euros de travaux ou encore la cité de l’architecture et du patrimoine à Chaillot que de partir dans des coupes au sein des ministères régaliens. D’ailleurs, qui s’étonnera encore d’apprendre que le budget du ministère de culture est en passe de redescendre en dessous de la barre fatidique des 1%.
Et à la fois, tout ceci a quelque chose de bien paradoxal. La nomination de Jean-Jacques Aillagon à la tête de la culture est sans aucun doute la plus inespérée et la plus judicieuse des décisions prises en matière d’attribution ministérielle culturelle depuis longtemps.
Successivement en charge des affaires culturelles de la Ville de Paris et président du Centre Pompidou, l’homme bénéficie d’une expérience de terrain hors pair qui le place désormais au plus proche des enjeux du patrimoine et de la création. D’ailleurs, lors de sa première conférence de presse, ne s’est-il pas engagé à se tenir à l’écoute des acteurs du tissu culturel de l’Hexagone en allant régulièrement à leur rencontre avec son équipe de travail ?Alors, gageons que Jean-Jacques Aillagon conserve l’oreille du président et puisse lui expliquer haut et fort que la richesse d’une politique culturelle d’un pays tient parfois plus à l’émulation entre les ministères, véritable bras de levier d’une dynamique culturelle. Et il est vrai que si le Quai de Bercy s’efforçait de concéder quelques allégements financiers au domaine privé, le cas de LVMH dans son soutien à l’exposition
« Matisse/Picasso » ne serait plus aussi isolé et la situation de dépendance à l’égard de l’institution n’en serait que d’autant réduite.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°539 du 1 septembre 2002, avec le titre suivant : La culture du paradoxe

Tous les articles dans Opinion

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque