Archéologie

Ötzi

D’Ulysse à l’Homme des Glaces

Par Emmanuelle Vigier · L'ŒIL

Le 1 octobre 1999 - 377 mots

PARIS

Lorsqu’en septembre 1991, une cordée d’alpinistes en herbe découvre un anthropomorphe prisonnier des glaces du massif de l’Ötztal (en Autriche), on croit tout d’abord à l’imprudence de quelque randonneur et l’on dépêche sur les lieux pandores et médecins légistes. Ceux-ci sont bientôt relayés par une équipe d’archéologues et de scientifiques. En fait de randonneur, il s’agissait d’un homme de quelque 4500 ans, né à l’Âge du cuivre.

À l’Âge du cuivre succède l’Âge du bronze (2200-800 av. J.-C.), et les figures mythiques, cette fois, de l’épopée homérique : Ulysse, Agamemnon et Priam. Et si l’exposition du Grand Palais ouvre sur « Ötzi » et les protagonistes de l’Iliade et de l’Odyssée, c’est bien dans l’intention de susciter l’intérêt du grand public pour l’Âge du bronze, en privilégiant une clé d’accès à forte puissance évocatrice. Avec l’ambition sous-jacente de donner une consistance archéologique au mythe, de reconstituer le cadre et le mode de vie des hommes de cette époque. Encore méconnu, l’Âge du bronze constitue une séquence essentielle dans l’histoire de l’humanité, maillon entre les communautés égalitaires agro-pastorales du néolithique et les civilisations historiques de l’Âge du fer (Grecs, Étrusques...). Durant cette période, les sociétés humaines se complexifient, se diversifient, se hiérarchisent. Leurs membres honorent une aristocratie guerrière, inhumée sous d’imposants tumulus, équivalents occidentaux des fameux « cercles » mycéniens. Des échanges à longue distance s’établissent d’un bout à l’autre de l’Europe. L’ambre baltique s’exporte jusqu’à Mycènes. On troque l’étain des Cornouailles contre le cuivre des Alpes ou des Carpates pour l’élaboration du précieux alliage d’airain. Au service de ce commerce, s’institue la domestication du cheval, l’apparition de la roue et des premières routes.

On regrette que cette première exposition d’importance sur l’Âge du bronze n’intègre aucune recherche récente, notamment sur l’habitat ou les dépôts. On s’étonne aussi de l’absence d’archéologues aussi incontournables que Daniel Mordant ou Patrice Brun, qui ont véritablement impulsé les recherches sur la période ces 20 dernières années. Au final, l’exposition manque son objectif de départ, donner corps aux mythes, pour installer une galerie de chefs-d’œuvre, qui demeure, certes, un plaisir pour les yeux.

PARIS, Galeries nationales du Grand Palais, 30 septembre-10 janvier. À lire : J. P. Mohen et Ch. Éluère, L’Europe à l’Âge du bronze, éd. Découvertes Gallimard/RMN, 160 p., 82 F.

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°510 du 1 octobre 1999, avec le titre suivant : D’Ulysse à l’homme des glaces

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