Vitraux de Chartres

Par Sophie Flouquet · L'ŒIL

Le 1 février 2004 - 390 mots

« On n’en finira pas de s’étonner de l’inventivité et de la science déployées pour écrire toutes ces images pourtant si difficiles à lire : très hautes, complexes à déchiffrer dans leurs sens multiples, elles nécessitent, si on veut les comprendre, l’aide d’un théologien... et de jumelles.

Qui donc remplissait cet office au Moyen Âge ? » Question essentielle que celle posée par Colette et Jean-Paul Deremble, en conclusion de cet ouvrage consacré aux vitraux de Chartres. Si l’objet du livre n’est pas d’y répondre dans le détail – il s’agit de décrypter l’iconographie – les deux auteurs mettent toutefois les choses au clair : pour eux, le programme de vitrerie de Chartres n’est nullement « une bible pour illettrés », mais plutôt un programme érudit, retranscrivant les préoccupations théologiques des chanoines qui l’ont mis au point.
Ces vitraux, fruits d’un travail collectif anonyme, n’ont aujourd’hui rien perdu de leur pouvoir de fascination, notamment dans la cathédrale beauceronne, où est conservé le plus vaste ensemble médiéval du monde (80 % du programme d’origine). Composé pour partie de verrières romanes (la très hiératique « Notre-Dame de la Belle Verrière » et le triptyque occidental avec son fabuleux « bleu » de Chartres), rescapées de l’ancienne cathédrale après l’incendie de 1194, l’ensemble est dominé par les panneaux gothiques conçus et mis en place dans le premier quart du XIIIe siècle, à l’initiative de l’évêque Renaud de Mouçon. Restaurés patiemment depuis 1986, ils retrouvent progressivement leur éclat d’origine, la remise en état des verrières basses venant de s’achever. Toutefois, malgré cet « éblouissement kaléidoscopique », le visiteur peine toujours à en comprendre le langage. C’est pour remédier à ce problème que les deux universitaires ont conçu ce beau livre comme un véritable guide iconographique. Soutenu par une reproduction de la totalité des vitraux étudiés, l’ouvrage, qui regroupe les verrières de manière thématique, met en exergue la cohérence de l’ensemble, mais aussi la présence de certaines innovations. Ainsi de ce vitrail des apôtres placé dans la verrière d’axe du chœur, traditionnellement occupée par un arbre de Jessé (déjà présent dans le triptyque occidental de la façade du XIIe siècle). À Chartres, il faut y voir le signe d’une nouvelle orientation de l’action pastorale, désormais tournée vers la ville.

Colette et Jean-Paul Deremble, photos Henri Gaud, Vitraux de Chartres, Zodiaque, 2003, 256 p., 48 euros.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°555 du 1 février 2004, avec le titre suivant : Vitraux de Chartres

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