Ventes aux enchères

VENTES PUBLIQUES

Ventes aux enchères, un calendrier chargé en juin

Par Marie Potard · Le Journal des Arts

Le 6 juin 2022 - 1036 mots

Si juin a toujours constitué un temps fort pour les enchères en France, cette année, les collections et lots rares dispersés sont particulièrement nombreux.

Bouddha en schiste gris, art du Gandhara, IIIe siècle, h. 147 cm. © Bonhams
Bouddha en schiste gris, art du Gandhara, IIIe siècle, h. 147 cm.
© Bonhams

Paris. Traditionnellement, juin concentre une très riche programmation de ventes aux enchères. Mais cette année, les foires s’en mêlent, avec un calendrier exagérément encombré, du fait de leur report pour cause de crise sanitaire. Les collectionneurs vont-ils suivre la cadence ? Jusqu’ici, leur appétit ne s’est pas démenti. « Le marché est vivace et il ne demande qu’une chose, c’est de fonctionner ! Il y a beaucoup de liquidités et des gens ont besoin de placer des fonds sur des secteurs diversifiés par rapport au marché boursier. Et il y a des signaux forts, quand on voit les prix stratosphériques enregistrés à New York en mai », commente le commissaire-priseur David Nordmann (Ader). Il poursuit : « Je ne suis pas inquiet car le marché a une énorme capacité d’absorption. Et il n’y a pas tant de pièces disponibles que ça, rares et de qualité, sur le marché. Aujourd’hui, ça nous paraît énorme mais si on compare aux générations passées, il y avait beaucoup plus de choses qui sortaient. »

Dispersion des grandes collections

Plusieurs collections importantes vont être dispersées dans la capitale en ce mois de juin. Dans ce domaine, Christie’s frappe fort avec la collection Hubert de Givenchy (1927-2018), du 14 au 17 juin (ainsi qu’une vente en ligne du 8 au 23 juin) avec près de 1 200 lots, du XVIIe au XXe siècle, provenant de son hôtel particulier parisien et de son château du Jonchet (Eure-et-Loir) – le tout pour une estimation avoisinant les 60 millions d’euros. Parmi eux, Femme qui marche, d’Alberto Giacometti (30 M€ *) ou un bureau plat en ébène, époque Louis XVI, attribué à Joseph Baumhauer (800 000 à 1,2 M€). La galerie Kugel (Paris) profite de cette occasion pour exposer en amont, du 9 au 15 juin, un ensemble d’œuvres ayant appartenu au grand couturier, dont la célèbre Armoire au char d’Apollon, par André-Charles Boulle. À la fin du mois, le 30, la maison de ventes de François Pinault disperse aussi l’ensemble d’un appartement situé sur le quai d’Orsay et décoré par Alberto Pinto (26 à 40 M€). Cette collection renferme un trésor, l’illustre Penseur, d’Auguste Rodin, une fonte vers 1928, estimée entre 9 et 14 millions d’euros.

Nouvelle venue sur l’échiquier parisien, Bonhams s’impose avec la collection de Claude de Marteau dévolue à l’art du Tibet, du Népal, d’Inde et d’Asie du Sud-Est. Quatre ventes sont prévues en 2022 et 2023, pour une valeur globale de plus de 10 millions d’euros. Le premier volet comporte soixante-cinq lots, estimés entre 2,5 et 3,5 millions d’euros, dont un Bouddha du Gandhara en schiste, du IIIe siècle, proposé entre 500 000 et 700 000 euros [voir ill.]. Parmi les autres collections, il y a aussi celle de Lili Grenier, muse des impressionnistes chez Millon le 13 juin ou encore le fonds photographique de Dora Maar composé de 750 clichés, chez Artcurial, les 27 et 28 juin.

Un violon Guarnerius de plus de 4 millions d’euros

Hormis les collections dispersées ici et là, plusieurs lots retiennent l’attention. En art ancien, un violon Guarnerius, fabriqué à Crémone en 1736, apparaît pour la première fois sur le marché depuis plus de dix ans, chez Aguttes, le 3 juin. Propriété du violoniste Régis Pasquier, il est estimé 4 à 4,5 millions d’euros. Le 18 juin, à Corbeille-Essonnes chez Camper Dabernat, un relief en terre cuite du sculpteur génois Angelo de Rossi représentant l’Adoration des bergers – morceau de réception à l’Académie de Saint-Luc, 1711 – est mis au feu des enchères (300 000 à 500 000 €). Le 22 juin, Tajan vend une grande esquisse préparatoire pour la voûte de la sacristie de l’église de San Domenico Maggiore à Naples par Francesco Solimena. Inédit, ce modello découvert dans une demeure en Bourgogne et marquant le passage du baroque au rococo est proposé entre 500 000 et 700 000 euros. Toujours du côté de la peinture ancienne, Aguttes cède, le 28 juin, Le Christ bon pasteur, de Bartolome Esteban Murillo. D’estimation modeste – 300 000 à 400 000 euros –, l’œuvre a un atout de taille puisqu’elle est restée dans la même collection française depuis 1764 !

Côté arts extra-européens, le 8 juin, Sotheby’s vend un masque Léga cornu, de la République Démocratique du Congo, issu de la collection Benoît Rousseau, se distinguant par la couche épaisse de kaolin qu’il a conservé (150 000 à 250 000 €). À Drouot, chez Aponem (le 15 juin), c’est une pendule à automate impériale en bronze doré et incrustations de pierres, Chine, époque Qianlong, qui est mise à l’encan (800 000 à 1,2 M€).

Art moderne

L’art du XXe siècle n’est pas en reste. Le 2 juin, deux huiles sur toile de Sanyu (1901-1966), chef de file de l’art moderne chinois, sont proposées à la vente chez Aguttes, dont Le Maître de piste, Monsieur Loyal, à cheval (1926), pas vu sur le marché depuis trente ans (475 000 à 600 000 €). Le lendemain, Ader cède – en collaboration avec sa filiale Ader Entreprises & Patrimoine – deux tables Trapèze, de Prouvé (1956), provenant du réfectoire de la résidence universitaire Jean-Zay à Antony et conservées par le Crous de Versailles. Chacune est estimée de 500 000 à 800 000 euros. Le 9 juin, c’est Georges Mathieu qui est à l’honneur chez Bonhams avec Exil de Go-Daigo dans l’île d’Oki, une grande toile peinte en 1957 à Tokyo (800 000 à 1,2 M€), jamais vue sur le marché alors que la veille, Sotheby’s vend une rare toile double face de Simon Hantaï, Étude / Blancs, datée de 1969-1973, restée en main privée pendant quarante ans (1 à 1,5 M€). Quant à Cannes Enchères, c’est une suite complète de vingt-quatre plats en argent repoussé, conçue par Picasso (1955-1956), qui est mise en vente le 14 juin (700 000 à 1 M€).

ERRATUM - 7 JUIN 2022

(*) Depuis la parution de l’article dans Le Journal des Arts n°590 du 27 mai 2022, Christie's Paris a revu l’estimation de Femme qui marche d’Alberto Giacometti. Celle-ci n’est plus de 20 à 30 millions mais est désormais fixée aux alentours de 30 millions d’euros.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°590 du 27 mai 2022, avec le titre suivant : Ventes aux enchères, un calendrier chargé

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