Art déco - Biennale

Un XXe très Art déco

Par Marie Potard · Le Journal des Arts

Le 3 septembre 2014 - 1006 mots

Les arts décoratifs du XXe, et notamment l’Art déco sont très présents à la Biennale, à l’exception du design. La galerie Vallois présente une nouvelle fois une exposition muséale.

Si les arts décoratifs du XXe siècle sont très présents – une dizaine de stands en tout –, les galeries spécialisées dans les années 1940 et plus (le design donc) semblent avoir étonnament déserté le Grand Palais. Pour preuve, la galerie Dowtown (François Laffanour), encore présente en 2012 ainsi que les galeries l’Arc-en-Seine, Patrick Seguin ou Jousse ont quitté le navire. Sur les dix exposants spécialistes des arts du XXe, cinq se consacrent exclusivement à l’Art déco, deux ne ciblent pas de style en particulier et les autres traitent pour l’essentiel du tout début du XXe, voire de la fin du XIXe. Pourquoi cette tendance ? Un spécialiste du marché estime que « ces galeries ont déjà une réputation à Paris et cherchent plutôt à conquérir l’international, les stands étant par ailleurs très chers ». Pour Félix Jr Marcilhac, « c’est d’abord parce que l’Art déco est très recherché par les puristes, les collectionneurs, mais aussi les décorateurs. Ce style minimaliste et précieux colle tout à fait à la décoration d’aujourd’hui. Les pièces d’Eugène Printz, de Jean-Michel Frank, de Marc du Plantier et Jean Royère se vendent très bien grâce à leurs lignes pures ». Et de poursuivre : « le marché se porte bien et explose pour les pièces rares ». En effet, le marché s’est envolé depuis une dizaine d’années, porté par de grandes ventes telles que très récemment la vente Marcilhac (qui a totalisé presque 25 millions d’euros), celle d’Yves Saint-Laurent et Pierre Bergé ou la vente Greenberg. Comme le souligne Félix Jr Marcilhac, « dans mon domaine, la Biennale est la plus grande foire au monde ». Alors les galeries en profitent pour exposer leurs pépites, souvent des pièces uniques. Cheska Vallois, qui domine depuis longtemps le secteur, ne saurait manquer ce rendez-vous, la Biennale étant pour elle « un événement majeur pour les antiquités ». Pour cette 27e édition, la spécialiste réitère l’expérience de 2008 avec une exposition à contre-courant pour ce lieu hautement commercial… (voir encadré).

Coard, Dunand, Sornay et Ruhlmann
Toujours en Art déco, la galerie Marcilhac reconstitue un appartement des années 1930 et expose des pièces de Eugène Printz, Marcel Coard, Jean Dunand, dont une suite de huit panneaux, Oiseaux exotiques (vers 1928) peints à la laque et une commode de Marcel Coard en placage d’amarante et lapis-lazulis (vers 1928), très caractéristique de l’œuvre du créateur, rappelant les meubles de la chambre de Madame Paul Cocteau réalisés en 1928. Alain Marcelpoil, montre comme à son habitude des réalisations d’André Sornay, fauteuils, chaises, bibliothèques, tables basses… Chez Michel Giraud, un bureau de dame et son fauteuil (vers 1927), par Dominique, occupent une place de choix, tandis que la Galerie du Passage présente un lit de repos en galuchat (vers 1930), par Jean-Michel Frank, une pièce unique. Pour sa deuxième participation à la Biennale, la galerie Mathivet expose une commode de Jacques-Émile Ruhlmann pour « Le Rendez-vous des pêcheurs de truites », un ensemble réalisé pour le Salon des artistes décorateurs de 1932. Au centre, Ruhlmann a sculpté deux cœurs accompagnés de la devise « Pêcheur Volage, Pécheur Ardent », ce qui n’apparaît sur aucun autre meuble du créateur. La commode provient de l’ancienne collection de Monsieur Berger, principal fournisseur en bois précieux du créateur.

Peu d’exposants couvrent tout le XXe siècle comme la galerie Yves Gastou, qui montre une table de salle à manger et ses huit chaises par Jean-Charles Moreux (vers 1940) et un ensemble monumental de vitraux, vers 1970, de la Maison Polloni. Sur le stand de Jean-David Botella, qui participe pour la première fois à la manifestation, figure un ensemble de trente miroirs de Line Vautrin dont certains jamais vus sur le marché, environ trente-cinq pièces de forme de Jean Després, un guéridon de Diego Giacometti, des sculptures de Claude et François-Xavier Lalanne… Une œuvre de ces derniers, monumentale cette fois, figure sur le stand de la galerie Xavier Eeckhout, La Pomme de Ben (2007). Deux galeries se cantonnent au tout début du XXe siècle. C’est le cas d’Oscar Graf, qui présente notamment une chaise d’Hector Guimard (1898) pour la Maison Coilliot à Lille ainsi qu’un fauteuil pour Sonja Knips, Vienne, 1902, par Josef Hoffmann ; et Franck Laigneau, qui fait comme à son habitude un focus sur les arts décoratifs scandinaves en 1900, avec par exemple un banc de style viking par Johann Borgersen.

Hommage à Jacques Doucet

La galerie Vallois surprend une nouvelle fois avec un hommage rendu à Jacques Doucet (1853-1929), le plus célèbre des couturiers de la Belle Époque mais aussi un grand collectionneur et mécène, une image emblématique de l’Art déco. « Ce n’est pas une reconstitution historique mais un hommage à son goût, à son œil, d’une extrême sophistication. » Le stand montre une quinzaine de pièces et une dizaine d’objets, dont la plupart sont uniques, qui étaient chez lui, auraient pu l’être ou ressemblent à celles qu’il avait. Ces pièces sont un jour passées entre les mains de la galeriste et étaient chez ses collectionneurs. Outre le sujet inédit de l’exposition, son originalité réside dans le fait qu’elle est non commerciale. « Cela me fait plaisir de ne rien vendre et montrer au grand public ces objets rarissimes et sublimes. Trouver quinze pièces correspondant au goût de Doucet et qui seraient à vendre est mission impossible. » Chez Doucet, trois noms reviennent inlassablement : Eileen Gray, Pierre Legrain et Paul Iribe. La pièce la plus remarquable est La table aux chars (vers 1915), d’Eileen Gray en laque rouge orangé, qui provient du vestibule du studio de Doucet rue Saint-James à Neuilly. Il ne faut pas non plus manquer d’observer une petite commode à deux tiroirs, en galuchat et ébène, vers 1912, de Paul Iribe, semblable à celle de Doucet qui, elle, est au Musée des arts décoratifs de Paris. Des œuvres de Joseph Csaky et Gustave Miklos sont également présentées.

Les articles du dossier : La Biennale des antiquaires et ses satellites

 

  • La Biennale marque la rentrée des foires ></a></li>	
    <li>Une Biennale malmenée <a  data-cke-saved-href=></a></li>
    <li>Une fenêtre sur la rareté <a  data-cke-saved-href=></a></li>
    <li>Le prestige au secours du mobilier ancien <a  data-cke-saved-href=></a></li>
    <li>L’éclat de la peinture ancienne <a  data-cke-saved-href=></a></li>
    <li>Le XXe en force <a  data-cke-saved-href=></a></li>
    <li>Les joyaux de la Biennale <a  data-cke-saved-href=></a></li>
	<li>Un parcours céramique plus étendu <a  data-cke-saved-href=></a></li>	
	<li>Un nouveau salon <a  data-cke-saved-href=></a></li>	
	<li>La multiplication des « off » <a  data-cke-saved-href=></a></li>	
	<li>Les arts tribaux au sommet <a  data-cke-saved-href=

Thématiques

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°418 du 5 septembre 2014, avec le titre suivant : Un XXe très Art déco

Tous les articles dans Marché

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque