Allemagne

Un cadre trop étroit

Des foires qui tournent à la\"démonstration germano-allemande\"

Le Journal des Arts

Le 1 février 1995 - 663 mots

Si les foires de dimension nationale se portent relativement bien, les marchands allemands ne sont toujours pas arrivés à mettre sur pied une manifestation qui attire les exposants étrangers. 1994 aura vu la création de la foire de Schwetzingen et l’annulation de l’Ars Antiqua de Francfort.

MUNICH - Le commerce d’art allemand a beaucoup de mal à organiser une foire internationale. La plupart des membres de l’Association bavaroise des marchands d’art et d’antiquités ont refusé de coopérer dans ce domaine avec The Euro­pean Fine Art Foundation (TEFAF). Celle-ci organise pourtant la foire de Maastricht, référence en la matière, mais également, en septembre, la nouvelle foire de Bâle. Konrad Bernheimer, un des marchands allemands basé à Munich et à Londres, déplore cet état de fait :"Le train semble parti sans nous, et la seconde foire internationale d’art et d’antiquités aura désormais lieu à Bâle".

Les tentatives en vue d’internationaliser la foire de Munich – la plus ancienne foire spécialisée d’Allemagne – sans l’intermédiaire de la TEFAF ne sont promises qu’à des succès très relatifs : en 1994, seuls 17 des 114 stands étaient tenus par des marchands étrangers."Il reste, au mieux, à faire de Munich la foire allemande pilote", estime Heide Hübner, spécialiste des maîtres anciens. Munich, ville traditionnelle du commerce d’art, continue de bénéficier de meilleures conditions d’exposition que Hanovre, Cologne et Düsseldorf – dont les foires connaissent pourtant un immense rayonnement en Allemagne du Nord et en Rhénanie.

Grâce à une conception d’ensemble intégrant une architecture de stand mo­derne, la foire de Munich a été un succès économique pour les exposants : la"scénographie" en est devenue, en Allemagne comme ailleurs, un élément déterminant auquel les foires doivent s’intéresser plus que jamais.

L’annulation de l’Ars Antiqua
Parallèlement, la tendance aux manifestations régionales s’est renforcée. Sur le modèle du Würz­burger Kunst-Markt – organisé par des marchands de Würzburg et des environs –, l’Association des marchands d’art et d’antiquités du Bade-Wurtemberg a tenu sa première foire-exposition dans les salles historiques du château de Schwetzingen. Cette initiative, essentiellement due au marchand Peter Bausback, a été bien accueillie par la profession et par le public. Selon Albrecht Neuhaus,"des manifestations de cette qualité ont absolument leur place dans le cadre de la région."

La nouvelle foire de Schwetzingen sera reconduite en 1996, contrairement à l’Ars Antiqua de Francfort, brutalement annulée en 1994. La plus jeune des quatre grandes foires professionnelles allemandes offrait pourtant aux marchands (de mobilier surtout) de grandes surfaces d’exposition. Une expérience qui risque de ne plus être renouvelée, du moins sous sa forme traditionnelle.

L’inquiétude qui a saisi Francfort est aussi perceptible à Berlin. Il n’est pas encore tout à fait décidé si Orangerie, dont le concept s’est toujours distingué des autres, aura bien lieu cette année. De même, la foire qui devait être organisée par l’Association des marchands berlinois et les industries de luxe, projetée sous l’appellation de Signum, a été récemment annulée : les marchands locaux auraient signalé des déficiences dans sa préparation.

"Fidéliser" sa clientèle
À la différence des marchands d’art et d’antiquités, les propriétaires de galeries ne sont pas organisés en associations régionales, mais regroupés en une association fédérale. Celle-ci soutient Art Cologne, une manifestation qui a réuni, en 1994, trois cent vingt exposants et qui s’est imposée juste derrière Bâle. Tel est du moins le bilan établi par un important galeriste de Cologne, Karsten Greve.

La grande foire d’art moderne de Francfort, Art Frankfurt, a rencontré la faveur du public grâce à des prix accessibles. La participation internationale y a été relativement faible, et la foire a tourné en 1994, selon le mot de Christian Herchenröder,"à la démonstration germano-allemande".

Néanmoins, pour certains galeristes, la participation aux foires ne présente pas d’intérêt."Ce n’est pas là que l’on touche les authentiques collectionneurs des grands modernes", déclare Wolfgang Werner, de Brême. Les marchands d’antiquités Renate et Wolfgang Neidhard n’exposent pas non plus dans les foires, mais préfèrent publier régulièrement des catalogues et organiser des voyages à vocation artistique afin de"fidéliser" leur clientèle autour d’activités communes.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°11 du 1 février 1995, avec le titre suivant : Un cadre trop étroit

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