Question d’identité

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 30 mars 2010 - 535 mots

Trouver son identité. Tel est le souci de la plupart des foires. Quelques-unes, comme le Salon du dessin et Paris Photo, n’ont guère besoin de se poser la question, car leur spécialisation en est garante. Mais pour la plupart des salons, le problème reste entier.

Certains ont tenté de se refaire une santé en déménageant. Passé l’effet de curiosité cependant, un nouveau lieu ne suffit pas à imprimer une identité à un événement. D’autres manifestations multiplient les nouveaux secteurs. La sectorisation poussée à son comble avait longtemps été l’une des caractéristiques de l’ARCO à Madrid. Sauf qu’il faut plus qu’un foisonnement continu pour donner un axe fort à un salon. En février, la foire d’art contemporain madrilène était essoufflée, désaxée, après avoir perdu pied avec la jeune scène émergente et l’art latino-américain. Art Paris est lui aussi à la croisée des chemins.

En voulant se défaire d’une certaine image bourgeoise, le salon a cédé au charivari. L’éclectisme est une chose, le chaos en est une autre. Le problème ne tient pas tant à la formule des « Guests » (invités), qu’à la qualité de ces derniers et à l’éventuel effet de parasitage. « Le fait de présenter des maquettes d’architecture comme je l’ai fait peut détourner de l’objet principal du commerce », admettait le marchand parisien Jean Brolly, exposant d’Art Paris.

« La définition de l’art contemporain sera à l’avenir de moins en moins restrictive, mais de plus en plus proche du Gesamtkunstwerk [œuvre d’art totale]. C’est un développement que l’on doit montrer sur une plateforme de marché », martèle pourtant Lorenzo Rudolf, nouveau patron du salon. Sauf que les foires actuellement en progression, comme Art Brussels, tendent à se caler sur le modèle éprouvé de la Foire de Bâle, en s’autorisant quelques variantes comme l’introduction du design dans le cas de la Foire internationale d’art contemporain (FIAC), à Paris.

Dans la précipitation
Autre sujet de préoccupation récurrente : devenir international. Encore faut-il savoir ce qu’on entend par là. Art Basel est la foire censée être la plus globale. Mais sur le plan des exposants, elle ne compte que peu de recrues issues de Chine, d’Inde ou du Moyen-Orient. Question visiteurs, elle n’attire pas non plus toutes les zones géographiques.

Le gros du contingent latino-américain lui préfère Art Basel Miami Beach. Les amateurs chinois ou indiens se comptent sur les doigts d’une main. L’impératif de la mondialisation a aussi des effets pervers : la précipitation. ShContemporary, (Shanghaï) Abu Dhabi Art ou Art Dubaï ont voulu d’emblée se placer à un échelon international alors même que leur marché local est faible. ShContemporary s’est depuis sinisée, chose logique.

Art Dubaï est lui aussi redevenu régional. Ces replis forcés ne sont pas une mauvaise chose. On ne peut accélérer artificiellement un marché dans une zone où l’acheteur principal n’est que la famille royale d’Abou Dhabi, et où la clientèle privée dépense rarement au-delà de 20 000 dollars.

La « macdonaldisation » des salons n’est pas non plus souhaitable. Pourquoi les collectionneurs prendraient-ils des longs courriers pour voir au bout du monde ce qu’ils ont déjà chez eux ? Les amateurs locaux ont eux aussi envie que leur art, quel qu’en soit le stade de développement, ait enfin une plateforme.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°322 du 2 avril 2010, avec le titre suivant : Question d’identité

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