Arts d’Orient

Paris se positionne

Le Journal des Arts

Le 7 novembre 2003 - 662 mots

La vente « Arts d’Orient » du 19 octobre de la SVV Boisgirard confirme le niveau de la capitale.

 PARIS - La vente « Arts d’Orient » organisée par la SVV Boisgirard et associés, le 19 octobre à l’hôtel Drouot, proposait 272 lots divisés en trois catégories : l’archéologie (lots 1-168), l’art islamique (lots 169-240), et l’art du monde ottoman (lots 241-272). L’intérêt de cette vente réside dans son rôle d’indicateur de tendance du marché des antiquités en Europe, et plus particulièrement de l’art ancien du Moyen-Orient, un domaine fragilisé par les événements récents – notamment la mise à sac du Musée national de Bagdad et la condamnation du marchand d’art Frederick Schultz (lire le JdA no  176, 12 septembre 2003). La plupart des pièces importantes se sont vendues à leur estimation basse – et quelquefois en dessous ; le succès relatif de la vente indique cependant que le marché des antiquités, spécialement en Europe, reste en bonne santé.
Expertisée par Annie Kevorkian, cette vente se distingue par son nombre impressionnant de lots estimés à plus de 100 000 euros, des enchères animées, mais aussi un nombre élevé de pièces ayant dépassé leur estimation haute. Plusieurs lots figurant au catalogue présentaient des estimations stupéfiantes, et certaines d’entre elles n’étaient communiquées que sur demande. Si Annie Kevorkian annonçait la provenance de quelques lots avant leur adjudication, aucune collection connue n’était citée. Par ailleurs, l’exposition n’était visible que la veille et une heure avant la vente, attirant une foule de collectionneurs enthousiastes parmi lesquels les plus importants marchands de Londres, d’Allemagne et de Suisse.
La section d’archéologie incluait une majorité de lots des plus intéressants, dont un grand nombre de pièces en argent, plaqué argent et or. Les objets en bronze, os, verre et terre cuite dataient du IIIe millénaire avant J.-C. jusqu’au VIe siècle. Les cultures égyptiennes, grecques, romaines, coptes et celles du Moyen-Orient – de Bactrie, Mésopotamie ou Louristan, pré-achéménide et sassanide – étaient toutes représentées.
La section islamique se composait d’objets en verre, argent et or, mais aussi de poteries, céramiques et textiles. Le superbe chandelier en cuivre incrusté d’or et d’argent, aux motifs animaliers et végétaux élaborés, qui figurait sur la couverture du catalogue, a été adjugé sans surprise à 1 130 000 euros (est. 850 000 euros à 1 million d’euros). Originaire d’Iran, il daterait de la fin du XIIIe siècle et son acheteur serait le cheikh Saud al-Thani du Qatar. Point fort de la vente, la salle s’est quasiment vidée après l’adjudication de ce chef-d’œuvre. Une idole composite de Bactriane du IIIe millénaire avant J.-C., faite de lapis et représentant une femme, s’est vendue à son estimation basse de 150 000 euros à la galerie suisse Phoenix Ancient Art S.A. Les objets en argent des anciennes cultures du Moyen-Orient et de Grèce présentant des estimations trop élevées, la clientèle n’a pas suivi, exception faite pour une bouteille sassanide en plaqué argent avec des danseurs (V-VIe siècle, est. 250 000 à 300 000 euros). Mesurant à peine 20 centimètres de haut, dans un très bon état de conservation et d’une finesse exceptionnelle, la pièce est partie à 230 000 euros.
La vente s’est conclue sur la section ottomane et orientale, plutôt mineure en comparaison des deux catégories précédentes. Les vaisseaux en cuivre, les textiles, les bijoux, les céramiques et les lithographies ont permis à cette partie de la vente d’obtenir un résultat tout à fait satisfaisant. Les enchères animées et le nombre important de lots vendus reflètent l’intérêt grandissant pour les antiquités en tout genre de la période gréco-romaine, du Moyen-Orient et de l’Islam, et ce, en dépit des événements récents et de la question des provenances. Les ventes d’antiquités organisées par la SVV Boisgirard sont sans aucun doute les plus importantes et les plus impressionnantes du moment à Paris. Il sera intéressant d’observer la riposte de Christie’s et de Sotheby’s, et de comparer la vivacité du marché parisien avec les prochaines ventes de Londres et de New York.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°180 du 7 novembre 2003, avec le titre suivant : Paris se positionne

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