Design

Le Prouvé précoce

Par Marie Potard · Le Journal des Arts

Le 15 février 2017 - 538 mots

La Galerie Downtown présente une sélection de pièces de l’architecte et designer français Jean Prouvé réalisées dans les années 1930.

PARIS - Une fois qu’un créateur est reconnu, ses œuvres de jeunesse peuvent être plus aisément appréhendées. C’est à travers ce prisme que François Laffanour, spécialisé dans le mobilier d’architectes du XXe siècle et fondateur de la Galerie Downtown, présente aujourd’hui Jean Prouvé (1901-1984). « Cela permet de donner de l’épaisseur au personnage. J’aime amener le visiteur vers une compréhension de plus en plus importante et profonde de l’artiste et de ses objets, commente-t-il. Nous nous sommes focalisés pour cette sélection sur les années 1930 car les pièces sont plus rares. » À cette époque, l’atelier de Jean Prouvé est très petit. Il reçoit peu de commandes en série, mise à part le bureau CPDE. « Le vocabulaire de Prouvé, c’est la ligne de biais. Les meubles des années 1930 sont les prémices de ce credo. À cette époque, son mobilier est plus cubiste, plus classique avec l’emploi de lignes droites », explique le galeriste. La présentation compte sept pièces de Prouvé, pour des prix allant de 30 000 à 800 000 euros, pièces auxquelles s’ajoutent quelques créations de Charlotte Perriand ou de Pierre Jeanneret.

Sculpteur forgeron
Jean Prouvé reçoit une formation de sculpteur forgeron et cet apprentissage du métal constitue le fondement de son travail. Petit à petit, il souhaite utiliser des matériaux plus faciles à manipuler et à tordre. Ancré dans son époque, il se sert de la tôle d’acier pliée. « Il a magnifié la tôle – autant le Formica – en faisant des objets totalement intemporels. » Parmi les pièces phares, toutes exécutées en tôle d’acier pliée et laquée, figurent une console-bibliothèque laquée rouge « Van Dyck » (1930), un bureau CPDE (1935) ou encore le lit Fabert (1935). Le galeriste montre également des pièces plus tardives des années 1950, tel un bureau Présidence (déjà vendu) et une table Trapèze.

Des pièces résistantes et fonctionnelles
Prouvé est à la fois un constructeur, un ingénieur et un artiste. D’une sobriété absolue, il est obsédé par la construction. Il est rigoureux et extrêmement soucieux de réaliser des pièces fonctionnelles et résistantes, sans pour autant délaisser l’esthétique et l’originalité. « Il pratique l’élitisme de la pensée mais pas l’élitisme du point de vue des matériaux précieux », résume François Laffanour. Il souhaitait réaliser des pièces pour le peuple. Toutefois, celles-ci étaient déjà chères à l’époque. Exemple, dans les années 1950, un bureau pouvait valoir 2 000 à 3 000 francs (par comparaison, le smic était réclamé à 1 000 francs en Mai 68 !).

Depuis trente ans, les prix se sont envolés. Sa cote a été stimulée par les résultats en ventes publiques qui ont conforté les amateurs et collectionneurs. Les prix ont grimpé pour tous les types de pièces, la fameuse chaise Métropole est ainsi située dans une fourchette allant de 5 000 à 10 000 euros. « Le premier bureau Présidence que j’ai acheté, je l’ai payé 158 000 francs il y a trente ans.

Aujourd’hui, il a pu se vendre jusqu’à 1,1 million d’euros [Artcurial, mai 2015]. Les prix qu’atteint Prouvé viennent consacrer sa démarche, son génie et sa philosophie de la vie », assure le spécialiste. Quant à la clientèle, elle est internationale. Au début, les Américains se montraient les plus intéressés, désormais sont aussi touchés les Coréens, les Chinois, les Sud-Américains et évidemment les Européens.

Le Prouvé des années 30

Jusqu’au 28 février, Galerie Downtown, 18, rue de Seine, 75006 Paris, tél. 01 46 33 82 41, www.galeriedowntown.com, du mardi au samedi 10h30-13h, 14h-19h.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°473 du 17 février 2017, avec le titre suivant : Le Prouvé précoce

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