Galerie

Le pôle des galeries à Matignon se renforce 

Par Anne-Cécile Sanchez · Le Journal des Arts

Le 16 septembre 2021 - 708 mots

PARIS

L’ouverture de succursales de galeries parisiennes et étrangères dans le secteur des Champs-Élysées confirme l’attractivité du « triangle d’or » pour le marché de l’art.

Vue du nouvel espace de la galerie Perrotin Second Market, avenue Matignon. © Photo Tanguy Beurdeley, 2021
Vue du nouvel espace de la galerie Perrotin Second Market, avenue Matignon.
© Photo Tanguy Beurdeley, 2021

Paris. Manifestations récurrentes place de la Bastille, circulation de plus en plus difficile dans le quartier, impossibilité d’y stationner… Les collectionneurs en seraient-ils venus à bouder les galeries du Marais ? « C’est compliqué de faire venir certaines personnes jusqu’à notre galerie de la rue du Bourg-Tibourg », constate Nathalie Obadia. La défection d’une partie de sa clientèle étrangère n’est pas l’unique raison pour laquelle la marchande, établie depuis vingt-huit ans à Paris et Bruxelles, a décidé de prendre un nouveau pas de porte rue du Faubourg-Saint-Honoré, dans le 8e arrondissement. Et Nathalie Obadia n’est pas la seule à opérer un mouvement vers l’avenue Matignon, qui s’affirme comme le troisième pôle majeur du marché de l’art à Paris à côté, rive gauche, de Saint-Germain et, rive droite, de l’axe dessiné entre la Bourse de commerce et le Centre Pompidou.

Annoncée en décembre 2020, la création de « Perrotin Second marché », associant Emmanuel Perrotin, Tom-David Bastok et Dylan Lessel, s’est concrétisée avec l’ouverture le 4 septembre d’une structure qui occupe un hôtel particulier entièrement rénové – mais dont les trois complices restent locataires. L’exposition inaugurale entend couvrir « un large spectre d’artistes et d’époques, à l’image de cette nouvelle activité » : sur les cinq étages sont ainsi présentées des œuvres de Georg Baselitz, Alexander Calder, Maurizio Cattelan, Lucio Fontana, Peter Halley, Keith Haring, Yves Klein, Glenn Ligon, Georges Mathieu, François Morellet, Ugo Rondinone, Peter Saul, Lee Ufan, Andy Warhol, Tom Wesselmann, parmi d’autres… Soit un savant mélange d’artistes modernes historiques et de contemporains en passe de le devenir, l’aura des premiers cautionnant les seconds.

L’adresse est la deuxième à avoir été investie sur cette artère par Emmanuel Perrotin, qui a d’abord planté son drapeau au 2 bis, avec un modeste rez-de-chaussée de 70 mètres carrés venus s’ajouter aux 2 300 mètres carrés d’exposition dont il dispose déjà, rue de Turenne et impasse Saint-Claude, (3e). Nathalie Obadia affirme quant à elle ne pas avoir voulu se contenter d’une vitrine, aussi prestigieuse fût-elle. « Je me suis décidée car j’ai trouvé un très bel espace », dit-elle : 420 mètres carrés avec verrière, inaugurés le 9 septembre après quelques travaux durant l’été afin d’aménager 100 mètres carrés d’exposition et deux salons privés où montrer des œuvres en toute discrétion. Un investissement que la galeriste assure avoir fait seule : « Je ne veux pas d’investisseur à mes côtés. »

À proximité des clients américains

Le pôle Matignon, où la succursale française de Gagosian s’est installée dès 2010, se consolide également avec l’arrivée annoncée de Cécile Fakhoury, installée à Abidjan (Côte d’Ivoire) et Dakar (Sénégal), qui promeut l’art contemporain africain sur la scène internationale. Ayant dû retarder l’ouverture d’une nouvelle antenne dans un pays africain anglophone, la Française a opté pour Paris et le quartier Matignon où « une nouvelle histoire est en train de s’écrire». La proximité de son emplacement avec celui de sa consœur Mariane Ibrahim, qui soutient les artistes de la diaspora africaine, est une coïncidence. Comme Cécile Fakhoury, cette Franco-Somalienne, qui célèbrera les 10 ans de sa galerie en janvier 2022, a choisi la France pour lancer sa première succursale européenne après des débuts remarqués à Chicago. En prenant part à « la renaissance de l’avenue Matignon », Mariane Ibrahim se positionne dans le secteur de prédilection de ses clients américains lorsqu’ils sont de passage dans la capitale française, à proximité de leur pied-à-terre, des grands hôtels et des boutiques de luxe qu’ils affectionnent. Et dans le voisinage immédiat des maisons de ventes Christie’s et Sotheby’s, respectivement sises avenue Matignon et rue du Faubourg-Saint-Honoré. « Aujourd’hui Paris renoue avec son faste culturel, artistique et historique d’antan », estime-t-elle. Sa première exposition, collective, reprend, en référence à ses deux sites de Chicago et Paris, les paroles célèbres d’une chanson de Joséphine Baker : « J’ai deux amours ». L’entrée de la chanteuse de music-hall au Panthéon est peut-être le signe que la capitale française se voit à nouveau comme une terre d’élection pour les artistes, et comme une destination de choix pour les collectionneurs en quête de placements judicieux. Cela vaut bien une fête : celle qu’a organisée Emmanuel Perrotin à l’hôtel Salomon de Rothschild, rue Berryer, a été la première de la rentrée.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°573 du 17 septembre 2021, avec le titre suivant : Le pôle Matignon se renforce

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