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ARTS PREMIERS

Le Parcours des Mondes élargit son horizon

Par Marie Potard · Le Journal des Arts

Le 7 septembre 2018 - 810 mots

PARIS

Confronté à un manque de renouvellement des collectionneurs d’arts premiers, le salon spécialisé étend ses explorations à l’archéologie et l’art contemporain.

Portrait de reine, fin de la XVIIe - début de la XVIIIe dynastie, vers 1600-1545 av. J.-C. Stéatite vernissée. 3,7 x 3,3 cm
Portrait de reine, fin de la XVIIe - début de la XVIIIe dynastie, vers 1600-1545 av. J.-C. Stéatite vernissée. 3,7 x 3,3 cm
Photo Lucien Viola

Paris. Voilà maintenant dix-sept ans que le Parcours des mondes se tient en septembre à Paris dans six rues du quartier Saint-Germain-des-Prés pour fêter les arts premiers. Réunissant les plus grandes galeries du monde spécialisées en art africain, océanien et américain, l’événement à ciel ouvert rassemble aussi des marchands d’art asiatique ainsi que deux galeries d’art contemporain (la galerie Vallois et la galerie Stéphane Jacob, spécialisée en art contemporain australien). Par ailleurs, le salon n’a jamais compté autant de galeries d’archéologie, puisque cette année, elles sont au nombre de trois : Kevorkian, La Reine Margot et Arteas. Une intention manifeste d’extension et de diversification affichée par le Parcours. « Il y a une logique dans cette ouverture, car les arts antiques, notamment l’art de l’Égypte, sont les ancêtres de l’art africain », commente Pierre Moos, aux commandes de l’événement. « J’ai constaté à plusieurs reprises en exposant dans d’autres salons une sensibilité immédiate de la part des collectionneurs d’arts africain et océanien à certaines expressions artistiques de l’Orient ancien », rapporte Corinne Kevorkian, qui expose à la fois dans sa galerie et dans celle d’Anthony Meyer. Confrontées, les deux disciplines échangeront peut-être leurs collectionneurs.

S’inscrivant dans cette volonté de conquérir de nouveaux horizons, chaque édition choisit un président d’honneur. Cette année, cette tâche a été confiée à Adam Lindemann, collectionneur d’art contemporain, africain et océanien, qui s’est distingué pour avoir vendu en 2016 Sans titre (tête de diable) de Basquiat pour 57,3 millions de dollars. « Le choix du président d’honneur est toujours réfléchi. Depuis quelques années, il se porte sur des collectionneurs qui ont franchi le pont entre l’art moderne ou contemporain et l’art tribal, car aujourd’hui, le pouvoir d’achat est aux mains de ceux qui s’offrent des Basquiat ou des Picasso. La clientèle des passionnés d’art africain vieillit et ne peut ou ne veut plus suivre les prix des très belles pièces », explique Pierre Moos.

Amputé d’une douzaine de galeries l’an passé histoire de préserver sa qualité, le Parcours a trouvé sa vitesse de croisière avec 63 participants (64 en 2017), dont huit nouveaux. La section principale, celle dévolue à l’art tribal, regroupe 49 marchands, soit un de moins que l’an passé. Les Américains Donald Ellis et Michael Evans n’ont pas fait le déplacement, tout comme les Belges Joaquin Pecci et Didier Claes. « J’ai fait le bilan et finalement, le Parcours n’a jamais vraiment été fructueux pour moi. De plus, je participe dans la même période au Brussels Art Week-end (art contemporain) qui fonctionne mieux pour moi », indique le marchand bruxellois. En contrepartie, ce sont les galeries Brant Mackley (États-Unis), Nast (Paris), SAO (Paris) ou Ben Hunter (Londres) qui intègrent la manifestation. Côté art asiatique, ils sont huit exposants comme en 2017. Si Thomas Murray (États-Unis), Jacques How-Choong (Bruxelles) et la galerie Jacques Barrère ne sont pas revenus, en revanche Renault de Montméat effectue un retour après un an d’absence.

Des pépites réservées pour l’occasion

Indéniablement, le point fort de l’événement parisien réside dans les nombreuses expositions thématiques accompagnées de catalogues que les marchands préparent pour l’occasion. Ainsi, Martin Doustar (Bruxelles) propose une exploration de l’Extrême-Orient russe à travers un ensemble d’objets en ivoire marin provenant des régions côtières de la mer de Béring, telle cette vénus sibérienne, de la région d’Okhotsk, 500-1 500 apr. J.-C. (45 000 €). La galerie Abla et Alain Lecomte se focalise sur les objets sacrés et de médecine, comme ce masque-autel Komo, Bambara ou Malinké (Mali ou Guinée) ayant conservé sa parure de porc-épic (autour de 20 000 €). –Philippe Boudin (Galerie Mingei), spécialisé en arts du Japon, présente en parallèle de « Enfers et fantômes d’Asie » au Musée du quai Branly, l’exposition thématique « Supranatural crânes, squelettes, fantômes et démons », dont un okimono en bois sculpté de la fin du XIXe siècle représentant un serpent explorant un crâne, par Izumi Sukeyuki (autour de 100 000 €). Et parmi les objets incontournables, il ne faut pas manquer d’aller admirer chez Bernard Dulon (Paris) ce masque Dan (Côte d’Ivoire) XIXe siècle, provenant de la collection Rasmussen, invisible sur le marché depuis 1979. « Ce masque est considéré comme un chef-d’œuvre, d’abord parce qu’il est extrêmement ancien, mais surtout, esthétiquement, c’est un objet d’une perfection absolue, de forme, de lignes, de volume, de matière. Déjà à l’époque, René Rasmussen disait qu’il avait le plus beau masque Dan du monde ! », raconte le marchand. Autre pépite, un cavalier Baoulé figurant un chef (Côte d’Ivoire), collecté avant 1920 chez Charles-Wesley Hourdé.

Temps fort de cette édition, l’hommage rendu à l’exposition mythique de la Galerie du théâtre Pigalle en 1930, la première très grande exposition en art africain. Conçue par Charles-Wesley Hourdé et Nicolas Rolland, la présentation rassemble des pièces montrées à l’époque et prêtées notamment par Tristan Tzara, Charles Ratton, Pierre Loeb, Picasso…

Parcours des mondes,
du 11 au 16 septembre, quartier Saint-Germain-des-Prés, www. parcours-des-mondes.com

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°506 du 7 septembre 2018, avec le titre suivant : Le Parcours des Mondes élargit son horizon

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