Analyse

La Chine, bientôt au sommet

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 28 mars 2011 - 537 mots

La pilule est difficile à avaler pour les Britanniques. D’après le rapport d’Arts Economics commandé par Tefaf, la Grande-Bretagne est rétrogradée en troisième position dans le palmarès des grands centres du marché de l’art, devancée pour la première fois par la Chine, qui détient 23 % de part de marché.

Après avoir éjecté la France du podium en 2007, l’empire du Milieu continue à grimper les échelons jusqu’à tutoyer désormais l’Amérique. D’après le rapport, ces deux pays ont d’ailleurs connu la meilleure résilience en 2010. Le marché chinois a ainsi doublé de valeur depuis 2009. Il faut dire que ce continent a aussi vu le nombre de grandes fortunes progresser de 31 % durant la même période, la Chine étant au quatrième rang en termes de population à fort potentiel économique. Comme partout, le pays a connu une contraction du volume d’objets vendus, mais une hausse importante des prix. Ainsi en art contemporain, le nombre de lots vendus a-t-il chuté de 47 % en 2010, mais les prix ont simultanément progressé de 121 %. Il est d’ailleurs probable que la vente de la collection Ullens, le 3 avril à Hongkong, provoquera une nouvelle poussée des prix, d’autant plus que la dispersion comporte cinq tableaux ayant figuré dans l’exposition séminale « China, avant-garde » de février 1989. D’après Artprice, le top 10 des artistes mondiaux recensés par produit de vente annuel récompense quatre Chinois contre un seul en 2009. Plus impressionnante, la jeune garde s’impose dans le top 10 des artistes contemporains, où elle décroche six places contre trois pour les Américains. Il faudra dorénavant compter avec des noms comme Zeng Fanzhi, Chen Yifei ou Zhang Xiaogang, de la même manière qu’on a assimilé Jeff Koons ou Richard Prince.

Comment le monde de l’art réagit-il à ce déplacement ? « Si je ne suis pas surpris que cela se produise, je le suis en revanche par la vitesse à laquelle cela s’est produit, confiait Ben Janssens, président du comité exécutif de Tefaf. Les Chinois sont passés, en huit ans, de zéro à 23 % de part de marché ! » La foire a d’ailleurs accueilli davantage d’acheteurs chinois cette année. « Nous ne pouvions nous concentrer sur la clientèle chinoise que si nous avions assez de marchands d’art asiatique, poursuit Ben Janssens. Nous en avons plus maintenant, et comme le goût des Chinois lui-même a changé, nous verrons de plus en plus de visiteurs de ce pays. » Pour Jean-Marc Decrop, spécialiste en art asiatique et grand connaisseur de la région, ce développement n’a rien d’inattendu. « Comment s’étonner qu’un pays, qui a sept mille ans d’histoire et qui devient la deuxième puissance mondiale, soit aussi sur la première ou deuxième marche pour l’art dans le monde, s’interroge-t-il. Toutes les personnes impliquées de près dans l’art chinois contemporain avaient d’ailleurs prédit que les artistes chinois allaient rattraper, puis dépasser les artistes américains. De la même façon, les ventes de vins à Hongkong ont dépassé en chiffre d’affaires celles à Londres, et le chiffre d’affaires de Macao est supérieur à celui de Las Vegas dans le domaine du jeu. » Il ne serait d’ailleurs pas surprenant que, dans peu d’années, la Chine supplante même l’Amérique à la première place…

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°344 du 1 avril 2011, avec le titre suivant : La Chine, bientôt au sommet

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