La 2e Berlin art week sort ses atouts

BERLIN - Les plaies laissées par l’annulation d’Art forum en 2011 sont-elles en voie de cicatrisation ? Pour la première fois depuis deux ans, la fin précipitée d’Art forum ne domine pas les débats du rendez-vous d’automne. Le projet ne fait pas pour autant l’unanimité. « La Berlin art week ? Du folklore municipal ! », déclare un galeriste sous couvert d’anonymat. La Berlin art week, concept marketing élaboré par le Sénat de Berlin en urgence l’an passé, s’étoffe cette année. Alors que l’an dernier, les institutions participantes avaient dû se contenter, faute de temps, de prolonger leurs expositions d’été, elles ont élaboré cette année un réel projet commun. « Painting Forever ! », (« La peinture pour toujours ! ») rassemble quatre institutions publiques et privées. La Berlinische Galerie présente Franz Ackermann, tandis que le KW, centre d’art contemporain de Berlin, expose plus de 70 œuvres de peintres berlinois, aussi bien établis qu’inconnus. La Neue Nationalgalerie et la Deutsche Bank Kunsthalle participent également au projet. Autre nouveauté, un jury composé de Kasper König, Monica Bonvicini et Claudia Wahjudi a sélectionné dix projets temporaires répartis dans toute la ville. La sénatrice de Berlin en charge de l’Économie, Cornelia Yzer, révèle le montant attribué à la Berlin art week cette année : 350 000 euros, dont la moitié provient de fonds européens. Elle affirme vouloir « créer un format qui lie art et marché de l’art », lesquels ne sont pas incompatibles selon elle. La Berlin art week débutera le 17 septembre avec une fête en plein air dans la Auguststrasse, dans le quartier de Mitte. De nombreux prix artistiques seront remis pendant la semaine, dont le Prix bisannuel de la Nationalgalerie pour le jeune art. Ce programme d’expositions et événements très attractif vise à mettre en valeur les deux principaux rendez-vous commerciaux de la Berlin art week, les deux foires Preview et ABC. Preview, la foire consacrée principalement aux artistes émergents, s’internationalise cette année avec dix-huit nations et cinq continents représentés, et quitte les entrepôts de l’ancien aéroport de Tempelhof, pour revenir s’installer à Mitte.

ABC se positionne comme référence professionnelle
La foire principale de Berlin, ABC, poursuit sa professionnalisation sous la houlette de sa nouvelle directrice artistique, Maike Cruse. ABC tient cependant à conserver son titre d’exposition-vente. « Bien qu’il s’agisse d’une plateforme commerciale pour les galeristes, nous n’appelons pas ABC une foire pour deux raisons. Tout d’abord, nous essayons de développer un format très différent, expérimental, qui se réinvente chaque année. Par ailleurs, il s’agit d’une initiative privée, avec une structure très légère et un petit budget. Nous n’avons pas de société d’organisation de foire, ni d’investisseurs pour nous épauler », déclare Maike Cruse. Les mauvaises langues ajoutent une raison beaucoup plus prosaïque : les membres du comité de sélection d’Art Bâle ne peuvent ni diriger une autre foire, ni être membre d’un autre comité de sélection. Refuser le titre de foire à ABC permet ainsi aux organisateurs d’échapper de manière un peu artificielle aux conditions drastiques imposées par Art Basel. ABC présente cette année environ 120 propositions artistiques individuelles, présentées pour la moitié par des galeries berlinoises. Maike Cruse est à l’initiative d’un projet expérimental d’expositions tournantes, dont le commissariat est assuré par le collectif Shanaynay de Paris. « Upcoming Exhibitions », financé avec le soutien de l’Institut français en Allemagne, allouera un laps de temps de deux heures à chaque exposition, à l’entrée de la foire. Le format original d’ABC permet aux galeries allemandes et internationales de montrer leur créativité dans la présentation des œuvres d’art. Seule une chose manque, comme l’indique le surnom ironique donné par la presse allemande à la foire : « ABC, anything but collectors » (« ABC, tout sauf des collectionneurs »). Pourtant, cinquante collectionneurs français seront présents grâce à un échange organisé par le Bureau des arts plastiques de l’Institut français. Il s’agit bien d’un échange, puisque cinquante collectionneurs allemands feront le voyage inverse lors de la Fiac. Enfin, l’Institut français est décidément très présent en marge de la Berlin art week, avec l’organisation d’un atelier destiné à cinq jeunes commissaires venus de France.