Art contemporain

Hassan Sharif, la résistance active d’un artiste Émirati

Par Magali Lesauvage · Le Journal des Arts

Le 20 septembre 2017 - 479 mots

Paris. Révélé par la commissaire Catherine David à un public international dans l’exposition de l’Adach Platform for Visual Arts lors de la 53e Biennale de Venise, en 2009, Hassan Sharif, artiste né à Dubaï (Émirats arabes unis, EAU) en 1951 et disparu en septembre 2016, a fait son retour sur la lagune cette année dans l’exposition internationale « Viva Arte Viva » orchestrée par Christine Macel à la Biennale.

Une réelle mise à l’honneur déployée en plusieurs salles, où sont exposés sur une série d’étagères une centaine d’artefacts obsessifs formant installation et évoquant les étalages d’un grand magasin. Aujourd’hui présenté à la galerie gb agency, à Paris, son travail fera l’objet d’une vaste rétrospective cet hiver à la Sharjah Art Foundation (EAU).

Documenter un moment de vie

Artiste contestataire, caricaturiste dans les années 1970, Hassan Sharif eut un rôle fédérateur majeur auprès des artistes du Moyen-Orient, réunis au sein de la Société des Beaux-Arts des Émirats qu’il co-créa en 1980.Après des études à Londres, il développe une pratique multiple, allant de la peinture à la performance en passant par le dessin et le bricolage d’objets dont la logique interne s’associe à une répétition du geste. L’exposition se concentre ici sur les livres et boîtes, réalisés à partir de 1982, pour aller jusqu’aux œuvres fondées sur ce qu’il dénomma des « semi-systèmes », soit des formules mathématiques dont l’artiste tenta d’épuiser la cohérence. Ainsi dans ce carnet de lignes noires où vient s’intercaler l’erreur, dans ces pages de dictionnaire découpées et réorganisées en une monumentale cascade de feuillets parasitant l’ordre établi. Détachant l’objet de sa fonction, Hassan Sharif accumule (des bandes de tissus et autres éléments collectés dans la vie quotidienne), déconstruit puis reconstruit (des livres) dans un jeu où le travail de la main prime et où la répétition est un acte de résistance obtuse. Parmi les boîtes qu’il a patiemment confectionnées, certaines exhibent leur intérieur, d’autres sont impossibles à ouvrir, chacune documente un instant de vie. Tout comme les peintures qu’il réalisa en série, notamment celle, faussement naïve et très colorée, consacrée à The Flying House, une coopérative d’artistes créée à Dubaï en 2007.

Hassan Sharif est représenté par gb agency depuis 2014, ainsi que par la galerie Alexander Gray à New York. Un choix, pour la galerie parisienne, qui s’intègre à une programmation d’artistes au parcours sinueux et marqué par le politique à l’instar de celui du Tchèque Jirí Kovanda ou du Thaïlandais Pratchaya Phinthong.

Les œuvres de Hassan Sharif sont présentes dans les collections publiques (une Boîte est conservée au Centre Pompidou, don de Robert Matta, d’autres sont au Mathaf, à Doha, ou au Guggenheim Museum de New York). Chez gb agency, elles peuvent atteindre, pour Dictionary par exemple, œuvre monumentale constituée de pages de dictionnaire et de cordes, 125 000 euros. Une cote assez élevée qui dénote un fort intérêt pour les artistes d’un marché en constante redécouverte.

 

 

Hassan Sharif, Reading is making : Books and Boxes,
jusqu’au 7 octobre, gb agency, 18, rue des Quatre-Fils, 75003 Paris.

 

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°485 du 22 septembre 2017, avec le titre suivant : Hassan Sharif, la résistance active d’un artiste Émirati

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