Ventes aux enchères

Drouot aiguise toujours l’appétit des investisseurs

Les 110 commissaires-priseurs parisiens devraient choisir avant l’été le candidat repreneur

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 3 mai 2002 - 845 mots

Les 110 commissaires-priseurs parisiens devraient se décider en faveur de l’un des candidats au rachat de Drouot avant cet été. Barclays, ABN Amro et Axa sont en lice. Mais Pierre Bergé n’a pas dit son dernier mot.

PARIS - Au sentiment général d’inertie qui règne à Drouot, Dominique Ribeyre qui préside les compagnies parisienne et nationale des commissaires-priseurs répond : “Rome ne s’est pas faite en un jour.” De fait, en période électorale, l’attentisme est de mise. Depuis quelques mois, après la toute première proposition de rachat de l’homme d’affaires Pierre Bergé qui s’est retiré de la course faute d’avoir convaincu la majorité souhaitée, Drouot aiguise les appétits de plusieurs groupes financiers. La banque Lazard a été chargée  d’effectuer une évaluation des actifs de Drouot et de vérifier la faisabilité des propositions d’achat. En cas de vente, elle s’occupera de la transaction. À ce jour, trois prétendants ont été retenus : Barclays Private Equity, ABN Amro Capital France et Axa Private Equity. Il semblerait que les actionnaires de Drouot aient une petite préférence pour cette dernière, la seule qui propose l’offre la plus large, c’est-à-dire la reprise de Drouot SA et du pôle presse – mais aussi de l’immobilier qui n’est pas pris en compte par la Barclays – à quoi il faut ajouter une participation dans les études ce qui n’a pas été envisagé par ABN Amro. Pour le reste, c’est bonnet blanc, et blanc bonnet. Les investisseurs potentiels semblent vouloir réaliser une opération financière qui mènera à une revente du nouveau groupe Drouot à court ou moyen terme. “Ils nous considèrent comme un fonds de placement alors que nous engageons notre vie entière. Cela demande réflexion”, poursuit Dominique Ribeyre. Le 14 mai, les intéressés seront réunis lors d’une assemblée générale. L’ordre du jour portera sur la constitution de la holding Drouot, la distribution des actions, le vote des nouveaux statuts et l’élection de son président. L’ancien président de Drouot, Joël-Marie Millon, est pressenti pour ce poste. “À partir de cette date, les choses vont se décanter rapidement, assure Dominique Ribeyre. Mes confrères vont certainement se déterminer avant l’été.” Mais, alors que les repreneurs sont acheteurs de 51 % des parts de la holding, la majorité des commissaires-priseurs a plutôt tendance à rester divisée. Le président de la compagnie parisienne affirme vouloir rester neutre indiquant “qu’il appartient à chacun de faire son choix”.

Hubert-Patrick Cheval, dont le cœur balance entre “un patron pour le monde de l’art, Pierre Bergé, et Axa, une boîte qui s’investit, reproche aux dirigeants de Drouot leur manque d’engagement. Depuis que Tajan, Poulain, Picard et Briest se sont mis à part, il n’y a plus d’homme fort au sein de Drouot. En l’absence de ligne directrice politique de la part du président et de son conseil, il n’est pas possible de lever une majorité. Nous parvenons seulement à créer différentes factions d’une douzaine de personnes qui ne résolvent rien. Or, il faut vraiment que le système change. On ne peut plus fonctionner comme une bonne salle de province. Du fait d’une conjoncture calme, les maisons de vente anglo-saxonnes récemment installées sur la place parisienne n’ont pas atteint leur vitesse de croisière. Mais nous avons tort de continuer à vivre sur une fin de monopole dont les effets différés n’en seront que davantage catastrophiques”. Pierre-Yves Lefèvre, de l’étude Beaussant-Lefèvre qui, avec 16 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2001, est l’un des meilleurs éléments de Drouot, “ne veut pas entrer dans une usine à gaz qui obère notre efficacité. Je ne me vois pas salarié d’une maison de vente selon le modèle anglo-saxon. Garder notre indépendance, nos spécificités et nos réseaux tout en regroupant une partie de nos prestations me semble la meilleure solution”. Il ajoute : “il paraît essentiel, quelles que soient les destinées de chacun, de créer des conditions pour que nous tous – y compris une étude comme PIASA qui a aussi des intérêts en dehors de Drouot – continuions à vendre à l’hôtel Drouot qui est un endroit irremplaçable”.

Pierre Bergé n’a pas dit son dernier mot
Réunir la moitié des forces vives de Drouot autour d’un même projet n’est pas gagné d’avance. Il existe également des ouvertures du côté du groupe financier Dassault qui a déjà réuni les études Briest et Aguttes. Mais les partisans du projet Bergé ne désespèrent pas de voir réapparaître l’homme d’affaires. Un noyau dur constitué des études Chayette & Cheval, Nicolay, Artus & Associés et aussi d’Antoine Godeau, d’Éric Buffetaud, de Frédéric Chambre et de Vincent Fraysse le voit volontiers comme patron de Drouot. Pierre Bergé ne déplaît pas non plus à quelques autres qui regrettent un manque de tact dans sa première approche. Joël-Marie Millon se dit “favorable à la philosophie du projet Bergé mais beaucoup de points sont à revoir dont un manque de générosité financière par rapport à la valeur de nos actifs”. Pierre Bergé qui s’était retiré de la course début janvier, pourrait bientôt revenir. Il n’a échappé à personne qu’il vient de recevoir son agrément du Conseil des ventes sous le nom “Pierre Bergé et Associés”.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°148 du 3 mai 2002, avec le titre suivant : Drouot aiguise toujours l’appétit des investisseurs

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