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Comment vient-on au Louvre ?

L'ŒIL

Le 1 novembre 2000 - 607 mots

Inutile de le nier, le Louvre des Antiquaires n’est pas la tasse de thé des Parisiens. Ni convivial, ni intime disent-ils, le lieu n’est pas propice à la flânerie. C’est vrai, on n’y retrouve ni l’ambiance des Puces ni celle de la Rive Gauche, en revanche, l’endroit est stratégique : au centre de Paris, facile d’accès, à deux pas du Louvre...

« Nous voyons beaucoup plus de provinciaux et d’étrangers », confirment les galeristes Xavier Pariente et Jean-Christophe Depieds. Ce dernier fait remarquer que le côté « galerie marchande » ne rebute pas les Américains, bien au contraire. Les marchands du Louvre des Antiquaires sont des passionnés, ils montrent volontiers leurs découvertes et font partager leur savoir. Et d’abord comment sont-ils arrivés là ? Chacun à sa façon. Pour Jean Christophe Depieds, c’est une vocation. Personne n’était du métier dans sa famille. Il est passé par la fac de droit avant de devenir restaurateur. Il a ainsi appris le métier de l’intérieur avant d’entrer chez un grand marchand puis il a volé de ses propres ailes. À la galerie, on découvre une paire de fauteuils superbement sculptés de Clément Bergez, début XVIIIe. Le modèle est somptueux, l’estampille rare, un lot de grande classe. Pour Bertrand de Lavergne au contraire, la tradition familiale a joué. Il est l’arrière petit-fils du marchand Paul Durand-Ruel. Avant de se lancer, il a été transitaire comme son père, puis féru de porcelaine chinoise, s’est mis à en acheter. De collectionneur à marchand, il n’y a qu’un pas vite franchi. Il présente des pièces d’origine royale telle cette paire de coupes Yongzheng, début du XVIIIe provenant de la collection d’Auguste le Fort, grand électeur de Saxe, roi de Prusse et de Pologne. Patrice Reboul, lui, est tombé dedans quand il était petit. À 11 ans, il commence une collection d’armes. À 17 ans, il ouvre boutique au marché Biron. Chez lui, les objets racontent l’histoire. Certains sont d’une étrange beauté telle cette paire de pistolets de Montigny, arquebusier du roi des Pays-Bas à Bruxelles. Les montures en ébène sont magnifiquement sculptées et les calottes figurent des têtes de guerriers de la Renaissance. À deux pas de là, on passe à l’archéologie, chez Pythéas, avec des sculptures gréco-bouddhiques du Gandhara (L’Œil n°512). Un saut dans le temps et nous voilà, à la galerie N°4, chez Guillois et Collin. Ils s’intéressent au XXe siècle. Leur dernière découverte ? Un ensemble de boiseries de Jean Dunand en bois laqué jaune à décor de singes, daté 1928, la seule bibliothèque connue de l’artiste. Côté tableaux, il y a les anciens et les modernes. Le Belge Patrick Berko est là depuis l’ouverture, il y a 22 ans. Son créneau ? La peinture académique, les peintres de salon fin XIXe, d’un réalisme précis et minutieux. Ses clients sont plutôt étrangers, les Français ne sont pas acheteurs. Pas acheteurs ? Enfin, ça dépend des générations. Les jeunes, dans le sillage de l’hyperréalisme s’intéressent beaucoup à ces artistes que leurs parents désignent du mot un peu méprisant de « pompiers ». Florence de Voldère est aussi belge d’origine. Elle est initiée par son père qui tient galerie au Village Suisse, puis s’en va s’occuper d’urbanisme et de patrimoine. Parallèlement, elle collectionne tous azimuts. Elle s’est lancée par hasard. En 1980, ne pouvant plus entasser, elle « fait » le Salon de la Bastille. Pour « faire de la place chez moi » dit-elle. Elle y présente 52 pièces, 48 sont vendues en un rien de temps. Elle est depuis dix ans au Louvre des Antiquaires avec de la peinture flamande. On peut voir chez elle cinq Brueghel. Cher ? Bien sûr mais en comparaison de la peinture moderne, c’est presque abordable. Bref, en peinture ancienne on peut encore se faire un musée à domicile.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°521 du 1 novembre 2000, avec le titre suivant : Comment vient-on au Louvre ?

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