Foire & Salon

Brafa, la nouveauté dans la continuité

Par Marie Potard · L'ŒIL

Le 20 décembre 2018 - 869 mots

BRUXELLES / BELGIQUE

La foire d’antiquité belge a su développer sa propre identité en dosant savamment les disciplines afin de rester à la fois attractive et éclectique, tout en étant plus exigeante en termes de qualité.

La première foire de l’année a pour habitude de donner le tempo pour les douze mois à venir. Alors, à un moment où il ne se passe plus grand-chose sur le marché de l’art, la manifestation a tout intérêt à braquer les projecteurs sur elle. Et visiblement, ça marche. Depuis six ans, le nombre de visiteurs venus fouler le sol du prestigieux site de Tour & Taxis ne cesse de progresser, passant de 42 000 à 65 000. Le défi de la Brafa aujourd’hui ? « Dans un monde de plus en plus perfectionné, complexe et concurrentiel, il faut surprendre les visiteurs en les emmenant dans un décor revisité, au sein d’une caverne d’Ali Baba de trouvailles », commente le président de la manifestation, Harold t’Kint de Roodenbeke. Et pour dynamiser le tout, c’est le duo Gilbert & George qui a été convié à présenter cinq œuvres de grand format, ainsi que la Chambre des antiquaires de Belgique qui organise une exposition de prestige pour son centenaire.

Le plaisir de la découverte

Pour cette 64e édition, 133 marchands ont été sélectionnés (contre 134 l’an dernier), un chiffre stable depuis que des travaux d’aménagement ont été menés en 2016. Seize nationalités sont ainsi représentées, parmi lesquelles 50 exposants belges et 44 français. Si certaines galeries ne sont pas revenues, à l’instar des Français Jacques Barrère, Ratton et Renaud de Montméat, du Canadien Jacques Germain ou encore de la Galerie Monbrison, 16 nouvelles enseignes font leur entrée. Parmi elles, certaines galeries participent à la Tefaf de Maastricht et de New York, tel le marchand anglais Robert Bowman, dont la sculpture européenne du XIXe au XXIe siècle est la spécialité, et la galerie allemande Röbbig München, spécialisée dans la porcelaine de Meissen, le mobilier et les objets d’art. Deux exposants français font également leur entrée, Brame & Lorenceau et Charles-Wesley Hourdé qui officie en art tribal. « D’après moi, la Brafa est l’un des salons européens les plus importants et les arts premiers y sont très bien représentés. Je n’ai pas fait de salon en Belgique depuis 2010, alors que de nombreux collectionneurs y résident ou s’y rendent régulièrement », indique le marchand parisien.

Foire au goût du jour, mélangeant les styles, la Brafa défend l’éclectisme. À la différence de la Tefaf, la Brafa mixe les époques « pour le simple plaisir de la découverte », lance son président, qui ajoute : « En classant par catégorie, on crée une uniformité, une monotonie, alors que, selon moi, la richesse est dans le contraste, dans la confrontation des styles et des genres. » La plupart des disciplines sont ainsi bien représentées, depuis l’Antiquité jusqu’à l’art contemporain, même si certaines sont davantage mises en avant. « Je souhaiterais intégrer des spécialités, comme le dessin ancien, mais aussi la photographie d’avant-garde, depuis le XIXe jusqu’à la moitié du XXe », confie Harold t’Kint de Roodenbeke.

L’éclectisme

Indéniablement, la foire reste incontournable pour les arts premiers. Pas moins de neuf marchands d’art tribal y participent. Parmi eux, citons des exposants fidèles comme Pierre Dartevelle, Bernard de Grunne et Didier Claes, qui expose un masque baoulé (République démocratique du Congo) du XIXe, provenant de la collection André Derain. Charles-Wesley Hourdé, quant à lui, a sélectionné des œuvres acquises récemment, notamment un important masque d’épaule baga (de même type que celui de la collection Picasso) et une rare statue maorie (collectée en 1876).

Avec dix représentants, l’autre point fort de la manifestation est l’archéologie. Chez David Aaron (Londres), l’amateur peut ainsi redécouvrir le bas-relief « Rockefeller » (Égypte, XIXe dynastie, vers 1300 av. J.-C.), provenant, comme son nom l’indique, de la collection Rockefeller, tandis que la Galerie Gilgamesh (Paris) dévoile un Torse acéphale en marbre (art romain, IIe siècle).

L’art du XXe, qui a plus que tout autre le vent en poupe, tient également une place de choix à Bruxelles, avec une soixantaine de galeries s’y consacrant. Une dizaine d’entre elles misent sur les arts décoratifs : Xavier Eeckhout (Paris) montre une Biche et ses deux faons, un bronze de Bugatti de 1904 issu de l’ancienne collection Sacha Guitry ; la Galerie Le Beau présente, pour sa part, un sofa du designer brésilien Joaquim Tenreiro (1958) ou encore un fauteuil Big Easy Volume 2, de Ron Arad, un modèle créé en 1988 et réalisé en 1991.

Quant à l’art ancien, si mobilier et objets d’art sont correctement défendus par près d’une trentaine de galeries, la peinture ancienne est quasi inexistante, sauf chez Florence de Voldère (Paris) et chez Costermans (Bruxelles), qui dévoile une huile sur cuivre représentant des oiseaux exotiques de Jan van Kessel le Vieux (1626-1679). Sur les stands dévolus aux arts décoratifs anciens, on peut admirer une paire d’encoignures à panneaux en laque de Chine, attribuée à l’ébéniste Jacques Dubois, époque Louis XV, vers 1750 (Röbbig München), un pot à moutarde du service « Enfants et Mosaïque » du roi Louis XV, en porcelaine tendre de Sèvres (1767), ancienne collection Béatrice Ephrussi de Rothschild (Art et Patrimoine, Bruxelles) ou bien un Christ en croix en émaux champlevés (Limoges, vers 1220), provenant de la collection Charles Gillot (1853-1903).

« Brafa Art Fair »,
du 26 janvier au 3 février 2019. Tour & Taxis, Royal Depot, avenue du Port, Havenlaan, Bruxelles (Belgique). www.brafa.art

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°719 du 1 janvier 2019, avec le titre suivant : Brafa, la nouveauté dans la continuité

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