Foire & Salon

FOIRE D’ART CONTEMPORAIN

Art Brussels au pays des collectionneurs

Par Stéphane Renault · Le Journal des Arts

Le 19 avril 2018 - 873 mots

BRUXELLES / BELGIQUE

Du 20 au 22 avril, la foire bruxelloise célèbre son 50e anniversaire. Cette longévité s’explique par un terreau des plus fertiles.

Les bâtiments de Tour & Taxis aux couleurs d'Art Brussels.
Les bâtiments de Tour & Taxis aux couleurs d'Art Brussels.
Photo David Plas
© Art Brussels

Bruxelles. La Belgique, terre de collectionneurs. Telle demeure la réputation du plat pays « avec la mer du Nord pour dernier terrain vague ». Cette année encore galeristes et clients wallons et flamands, français, luxembourgeois, hollandais, anglais et allemands se sont donné rendez-vous outre-Quiévrain pour une nouvelle édition d’Art Brussels, fringante quinquagénaire. Par sa qualité et son esprit de découverte, la plus importante foire du Benelux continue d’attirer amateurs et marchands, en particulier de l’Hexagone. Autrefois discrets, les collectionneurs d’art contemporain belges n’hésitent plus à montrer leurs trésors, suscitant de nouvelles vocations. La région est réputée de longue date pour receler d’exceptionnelles collections. Il suffit pour s’en convaincre de visiter le vaste espace industriel de Vanhaerents Art Collection, ou, jusqu’au 27 mai, « Private choices. 11 collections bruxelloises d’art contemporain » à la Centrale. Acheteurs très actifs, Frédéric de Goldschmidt, Alain Servais, Hubert Bonnet, parmi bien d’autres, devraient figurer en bonne place au nombre des VIP à l’ouverture de la foire.

Dans les allées d'Art Brussels, en 2017
Dans les allées d'Art Brussels, en 2017
Photo David Plas
© Art Brussels

Cette tradition bien ancrée de collectionneurs avisés et curieux, couplée à une fiscalité avantageuse qui a fait passer la frontière à des milliers de Français, contribue à faire du royaume un petit paradis pour les amateurs d’art. Bruxelles est devenue ces dernières années une annexe des beaux quartiers parisiens. Une nouvelle clientèle a émergé, installée dans de spacieuses demeures à Ixelles ou Uccle, quartiers cossus n’ayant rien à envier à Neuilly. Le dynamisme du marché s’en ressent, soutenu par les acheteurs belges historiques comme ces récents résidents étrangers et les visiteurs des pays limitrophes. Les maisons de ventes l’ont bien compris, à l’égal des galeristes, qui ont ouvert pour certains il y a quelques années déjà des antennes dans la capitale belge.

Une foire historique

Art Brussels fête en 2018 son 50e anniversaire dans la halle industrielle de Tour & Taxis. Plus internationale, la foire s’affirme aussi plus belge, renforçant son ancrage local avec près d’une cinquantaine de galeries nationales participantes. Au total, quelque 147 galeries issues de 32 pays présentent leurs artistes au sein de trois sections : « Discovery » (33 jeunes galeries promouvant des artistes prometteurs, innovants et non établis au niveau international), « Prime » (110 galeries établies représentant des artistes de renommée internationale) et « Rediscovery » (axée sur l’art de 1917 à 1987, elle présente des artistes, vivants ou disparus, peu reconnus, sous-estimés ou oubliés), ainsi que 21 présentations « Solo », soit des projets consacrés au travail d’un seul artiste. Les comités de sélection ont retenu au total 36 nouvelles galeries et 111 ayant déjà participé à l’édition 2017. « Pour célébrer le 50e anniversaire de la foire cette année, précise Anne Vierstraete, directrice générale d’Art Brussels, nous revenons à nos racines avec un fort soutien des principales galeries belges ainsi qu’un retour important de galeries parmi les plus importantes de la scène internationale. Art Brussels continuera à être une plate-forme passionnante pour la découverte et un rendez-vous incontournable pour des galeries reconnues internationalement. » La foire new-yorkaise Independent, dont une bouture faisait concurrence depuis deux ans à Art Brussels en se déroulant aux mêmes dates – mais sans réel succès commercial –, a été décalée en novembre.

Une ville bouillonnante

Depuis le début des années 2000, Bruxelles s’est affirmée comme l’une des villes européennes les plus dynamiques sur la scène contemporaine. Son paysage artistique s’est enrichi de nouveaux musées, de nombreuses collections privées se sont ouvertes au public. Des galeries de premier plan y sont désormais installées, en particulier aux alentours de l’avenue Louise. La ville de Victor Horta, Magritte et Hergé abrite une multitude d’institutions publiques et privées à la programmation ambitieuse et internationale : le Wiels, Bozar, le CAB (Contemporary Art Brussels), le Mima (Millenium Iconoclast Museum of Art), la Villa Empain-Fondation Boghossian… Et bientôt « Kanal-Centre Pompidou », le futur centre culturel et musée construit sur le site de 35 000 mètres carrés de l’ex-garage Citroën. On ne compte plus les lieux de création et d’exposition privés et indépendants, les espaces gérés par des collectifs d’artistes.

Cosmopolite, ouverte aux influences, Bruxelles bénéficie d’une situation géographique centrale au cœur de l’Europe, à moins de deux heures en train de Paris mais aussi de Londres, Cologne, Amsterdam. La capitale européenne a accueilli ces dernières années des commissaires d’exposition et des artistes du monde entier, attirés par des loyers modestes, une qualité de vie, une ouverture d’esprit et un goût pour l’innovation. Un mouvement tel que le T Magazine du prestigieux New York Times consacrait en décembre 2015 à cette bouillonnante énergie un long article intitulé « Pourquoi Bruxelles est le nouveau Berlin », n’y voyant rien de moins qu’« un des hubs créatifs les plus excitants du continent ». Depuis, l’euphorie est quelque peu retombée, Molenbeek n’a pas supplanté Kreuzberg à Berlin sur la carte des destinations de prédilection des artistes. Reste que la conjonction d’un vivier créatif, d’une situation géographique centrale et de collectionneurs locaux et étrangers à l’écoute de la création européenne actuelle, enthousiastes à l’idée de découvrir et acheter des talents montants, crée un cercle vertueux. Et devrait cette année encore faire le bonheur des marchands sur les stands de la foire.

Art Brussels, du 20 au 22 avril, Tour & Taxis, avenue du Port 86C, Bruxelles, www.artbrussels.com
 

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°499 du 13 avril 2018, avec le titre suivant : Art Brussels au pays des collectionneurs

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